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Geoffroy: le jeune homme et la mer (ENTREVUE)

Geoffroy: le jeune homme et la mer
Marc-Étienne Mongrain

Figurez-vous un littoral musical. Imaginez le rivage chanté. Dessinez un écopaysage sonore où l’ondée numérique arrose sans embouer le verdoiement analogique. Parachutez-y l’éphèbe alangui, pétard au bec, un œil sur la courbe demoiselle, l’autre embrassant l’horizon. Vous obtiendrez à quelques traits près le tableau que brosse Geoffroy avec Coastline, un album qui s’écoule au bon débit, comme le fleuve côtier au confluent du suave et du saumâtre.

L’appel du large

Sachez d’abord que le jeune - mais bien mûr - auteur-compositeur est parti de loin… pour mieux nous revenir. On a ici affaire à un voyageur né chez qui les parcours initiatique et académique s’entremêlent, et pour qui la rue et l’école sont conciliables. Titulaire d’une maîtrise en «Music Business» de la Berklee College of Music, à Valence, Geoffroy s’est aussi, et surtout, fait la main en faisant la manche. «Je traîne toujours ma guitare avec moi en voyage», nous raconte-t-il. «C’est avec elle que j’ai commencé à me produire devant public, dans les restos et les bars. À vingt ans, j’ai passé un été en Grèce, près d’une plage où les gens se réunissaient tous les soirs pour écouter de la musique. J’ai roulé un set de covers de trois heures pendant trois mois là-bas, puis pour une période de 3 à 4 ans un peu partout ailleurs.»

Virage électronique

Au fil de ses pérégrinations et comme en témoigne un premier EP envoûteur (Soaked in Gold) paru à l’automne 2015, Geoffroy a succombé aux attraits du soul blanc électrocentrique. Guidé par l’esthétique d’un Bon Iver, Chet Faker, SOHN et autres chantres du néo-R&B, il se garde de tomber dans le piège tendu par l’échantillonnage. «Cette musique crée une ambiance particulière, avec des sonorités nouvelles qui permettent de transmettre et provoquer des émotions de manière limpide. Je suis un fan de musique électronique, mais pas tant de son aspect métronomique. Selon moi, c’est l’ajout d’une dose organique qui assure la longévité d’un morceau.»

Un souci qui se transpose sur scène, nous précise-t-il. «Je ne fais pas de DJ set. On est trois sur scène. Je joue et de la guitare et du clavier et je suis accompagné d’un batteur-échantillonneur et d’un bassiste. On essaie autant que possible de tout reproduire en live, même si certains samples sont indispensables.»

À petits pas

Pour bien saisir l’essence de Coastline, il importe aussi de définir le tempérament de son géniteur. Laborieux à ses heures, Geoffroy nous avoue un penchant pour l'oisiveté contemplative. «Je suis assez control-freak en affaires, mais j’ai souvent besoin d’une tape dans le dos, voire d’un coup de pied au derrière pour m’atteler à la tâche. J’aime chiller et voyager, je ne suis pas pressé et je n’ai pas l’ambition de devenir célèbre du jour au lendemain. Je fais les choses à mon rythme. C’est ce qui m’a permis de vivre pleinement ma vingtaine. C’est seulement depuis l’intérêt suscité par mon EP que je m’y suis mis sérieusement. Je suis beaucoup plus discipliné aujourd’hui que par le passé.»

C’est donc naturellement que l’idée de l’album a jailli. «Après le EP, son réalisateur Max Gendron et moi sommes immédiatement retournés en studio pour composer de nouvelles pièces. Rapidement, trois ou quatre squelettes de chanson sont apparus. Et comme je n’avais pas envie de faire paraître un autre EP, j’ai fait appel à Gabriel Gagnon pour coréaliser ce qui allait devenir un LP. C’est lui qui a établi la direction artistique de l’album et réuni tous les morceaux pour en faire un tout cohérent.»

Suivre le littoral

Si vous cherchez le titre phare de l’album, arrêtez-vous à la pièce qui en partage le nom. On découvre dans la chanson «Coastline» la métaphore filée et le cachet sonore qui dictent le tempo et les paroles de l’ensemble des morceaux. «C’est l’ambiance du Nord-Ouest Pacifique, dans la nature sauvage, près de la côte, à l’écart de la société. C’est le décor qui a inspiré les textes, dans une période de remous, à la fin d’une relation amoureuse. C’est l’image de la falaise. Quand on se retrouve à quelques pieds du vide, sur le point d’opérer un changement de vie radical.»

Décidément, au point du jour à l’autre bout du monde comme au couchant de retour chez soi, il fait bon pour le cœur mélancolique de respirer les embruns sur la côte Geoffroy.

Ça risque même de vous inspirer un peu de poésie.

Coastline, Geoffroy, disponible dans les magasins et en version numérique le vendredi 10 mars.

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