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«Un coup de queue de vache» de Thomas Fersen: Par-delà la fable (ENTREVUE)

Thomas Fersen: Par-delà la fable
Courtoisie

Conteur, fabulateur, anecdotier, monologuiste, Thomas Fersen échappe depuis plus de 25 ans à la définition stricte et consensuelle du chanteur populaire. Avec Un coup de queue de vache, 10e album au compteur, le maître en fantasmagories nous propose une fois encore une excursion dans un univers où la métaphore règne et où la légèreté et l’esprit fin font bon ménage.

Malgré une pochette qui nous présente Fersen chevauchant la vache sur un arrière-plan de morosité urbaine, et malgré la mise en scène en chanson d’une bonne vingtaine de bêtes de ferme, l’album ne doit pas être abordé comme un simple recueil de fables animalières cocasses. «Le thème du disque, c’est la nature qui déménage en ville, dans un lieu triste et sauvage, avec ses devantures et ses corridors sombres, dans la promiscuité citadine. La nature surgit souvent de façon plus forte et plus violente dans les villes que dans les campagnes où est elle rationalisée et cultivée, presque méprisée».

Thomas à la ferme

C’est autour de la pièce Les Petits Sabots, rare chanson d’amour de l’auteur, que s’articule l’ensemble du projet.

«J’ai imaginé une petite fille de ferme qui préfère la solitude des bois aux jeux traditionnels de ses camarades. Dans un buisson, elle se fait un petit salon et s’imagine y recevoir un lièvre, un oiseau et un hérisson à qui elle offrirait des feuilles et de l’eau de la rivière. L’histoire se termine avec cette petite fille devenue femme qui retrouve son paradis perdu dans les bras de son amoureux».

Une fillette qui allait au fil des morceaux donner naissance à tout un clan. «J’ai ensuite imaginé son frère benjamin au tournant de l’adolescence, tourmenté par la puberté et obsédé par les pies de vache et les soutiens-gorge (Tu n’as pas les oreillons). Puis, leur sœur aînée qui quitte la campagne pour travailler dans un cabaret comme strip-teaseuse (Big Bang) et ainsi de suite. »

À la recherche d’un nouveau modèle

Un coup de queue de vache marque aussi pour Thomas Fersen l’accès à l’autonomie complète, dégagée des contraintes de l’étiquette. Pour celui qui fait fi des codes et des règles de notre époque, la démarche s’inscrit dans un désir de liberté, mais prend aussi en compte les nouvelles réalités de l’industrie.

«Aujourd’hui, le seul modèle viable semble être celui du streaming. Et pour que ça fonctionne, il faut faire de gros volumes de fréquentation et miser sur le comportement compulsif des ados qui cliquent sans cesse sur les mêmes chansons. Ce public-là est devenu la cible de l’industrie. On m’a d’ailleurs conseillé l'indépendance en raison de ce modèle économique… De toute façon, je suis arrivé à un âge et à une étape de ma carrière où je veux éviter toute forme de contrainte. Je fais les choses qui ont un sens pour moi, que j’ai envie de porter en tournée, que j’ai envie de vivre. Ensuite, les gens qui s’y intéressent viennent voir le spectacle, les autres, non.»

Place à la scène

Est-il pour autant pessimiste quant à l’avenir de la chanson et de ceux et celles qui veulent en faire carrière? Non, si on se rappelle que rien ne sert de courir et qu’il faut partir à point. «On doit commencer par le spectacle et tenter de séduire un petit public qui sera appelé à grossir. On doit aussi garder le contrôle sur sa destinée, en avançant pas à pas et à sa mesure. Si on évite de tomber dans le panneau dangereux du succès immédiat et qu’on se concentre sur un répertoire et des bases solides, on peut y arriver. Le métier du spectacle vivant n’est pas prêt de disparaître.»

En attentant son passage parmi nous, seul ou accompagné de son quatuor à cordes, le chanteur «à tout faire» nous offre un album tel un baume pour la grisaille. À nous de prendre la clé des champs et de suivre l’exemple de notre guide.

«Je fais comme le lièvre de mes histoires, je vais où je veux.»

On en prend bonne note.

Un coup de queue de vache, Thomas Fersen, disponible dans les magasins et en version numérique dès maintenant.

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