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La GRC a écouté les appels de journalistes depuis au moins 1992

La GRC a écouté les appels de journalistes depuis au moins 1992
Radio-Canada/Bert Savard

Radio-Canada a appris que la pratique d'écouter des appels téléphoniques de journalistes remonte à au moins 25 ans à la Gendarmerie royale du Canada (GRC). L'une de ces écoutes aurait eu lieu lors de l'attentat à la bombe qui a tué neuf personnes à la mine Giant, à Yellowknife, en 1992, selon le sénateur et ex-commissaire adjoint de la GRC, Vernon White, qui estime que l'opération était justifiée.

En septembre dernier, la GRC s'est fait demander si elle avait déjà espionné les communications de reporters, comme l'avait fait le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) dans l'affaire Patrick Lagacé.

Le ministre de la Sécurité publique, Ralph Goodale, s’était défendu. « L'enjeu, c'est ce qui se passe maintenant et je peux vous assurer que ce type d'activité ne se produit pas maintenant. Je ne suis pas au courant de choses qui se sont passées quand on ne formait pas le gouvernement du Canada », avait-il déclaré.

Or, Radio-Canada a appris que cette pratique était déjà en place en 1992 à la GRC.

« J'ai moi-même été impliqué [sic] dans des enquêtes. Et dans l'une en particulier, nous avons installé un dispositif d'écoute pour capter les appels d'une personne des médias », affirme le sénateur White.

«Avoir le droit d'écouter les appels des médias ou pas, c'est un défi.» - Vernon White, sénateur, ex-commissaire adjoint de la GRC et ex-chef de la police d'Ottawa

« C'était un meurtre », justifie-t-il. « Neuf personnes avaient été tuées. »

Il précise que l'une de ces surveillances, autorisée par un juge, aurait eu lieu lors de l'attentat à la bombe à la mine Giant, à Yellowknife, en 1992, à la suite d’un conflit de travail qui avait dégénéré. On ignore cependant le nom du reporter qui a alors été sur écoute.

Le sénateur White fait cependant la part des choses et avance que ce cas est extrêmement différent de ce qui s'est passé à Montréal, avec l'affaire Patrick Lagacé.

Dans ce cas, le SPVM a eu accès aux numéros des appels entrants et sortants sur le téléphone intelligent du journaliste, ainsi qu'aux numéros des messages textes.

Selon Vernon White, le SPVM est allé beaucoup trop loin dans cette histoire.

Le contexte aurait été différent, estime-t-il, dans le cas de l'attentat à la bombe de 1992. Il soutient que le processus pour convaincre un juge d'autoriser l'écoute était loin d'être facile.

« C'était extrêmement difficile de convaincre un juge que quelqu'un des médias pouvait être connecté au crime, parce qu'il [le journaliste] faisait des entrevues avec des suspects et nous devions savoir si un suspect allait confesser son crime », explique-t-il.

Des écoutes justifiables?

De son côté, Patrick Lagacé pense que « dans certaines situations, ça peut être justifiable d'espionner un journaliste et de le mettre sous écoute ».

Il ajoute cependant qu'en ce moment, au Québec, « les juges donnent la permission d'espionner les journalistes avec une extrême facilité ».

De plus, selon lui, on ne peut pas se fier uniquement aux corps policiers pour donner l'heure juste à propos de l'écoute des journalistes.

«La police a intérêt à jouer sur les mots [...] à ne pas dire combien de fois les journalistes ont été espionnés.» - Patrick Lagacé, journaliste

Patrick Lagacé se dit cependant encouragé par l'annonce de Québec de lancer une commission d’enquête publique sur la confidentialité des sources journalistiques, qui sera présidée par le juge Jacques Chamberland, de la Cour d'appel du Québec.

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