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«Les 4 haïssables»: une critique sociale «full» divertissante

«Les 4 haïssables»: une critique sociale «full» divertissante

Avec son concept des 4 haïssables, Mathieu Gratton, idéateur et auteur, voulait tendre le crachoir aux adolescents, les laisser ventiler leurs observations et leurs réflexions sur les adultes, la société, le monde qui les entoure, avec humour et irrévérence.

Avec son équipe, Gratton a déniché quatre perles rares à la langue bien pendue, Rose Adam (17 ans), Victor Boudreault (14 ans), Jade Hébert (13 ans) et Philippe Scrive (12 ans), qui ont le bagout parfait pour débiter des vérités avec juste ce qu’il faut d’innocence et d’effronterie pour surprendre et déclencher les rires. En les écoutant et en les regardant, on a autant le goût de leur pincer une joue que de leur tirer l’oreille. Voyez le genre?

Le joyeux quatuor se produisait en première à Montréal, au Gesù, mercredi. Charismatiques à souhait, Rose, Victor, Jade et Philippe manquaient un peu de naturel en début de prestation, mais leur énergie a vite pris le dessus. Il faut dire que, mercredi, le groupe n’en était qu’à sa 12e représentation. Tous irrésistibles et dotés d’un réel sens du punch, ils portent à merveille les textes signés par Mathieu Gratton (aidé d’Alex Roy et d’Alex Perron pour un numéro très judicieux sur l’homophobie), remplis de répliques cinglantes et parfois même trash. Dans Les 4 haïssables, on jase sexualité, politique, drogue, garde partagée, perte de poids, émissions de cuisine, surconsommation, agressivité dans les sports, leggings, vie de couple, dépendances et on en passe, et on rit de Joël Legendre, Marie-Chantal Toupin et Maxim Martin, d’un ton toujours décapant et de l’air suffisant propre à l’adolescence. Il y a même une référence à Bouscotte, et certaines lignes, qu’on ne rapportera pas ici pour ne pas gâcher l’effet, vont très loin.

«Faire garder son enfant pour venir en voir quatre autres, bravo», lance ironiquement Victor Boudreault dans la saynète d’ouverture. «Si vous avez toujours voulu voir la chienne à Jacques, elle est ici ce soir», crâne Jade Hébert en pointant un spectateur. Rose Adam, qui a joué dans La galère lorsqu’elle était enfant, annonce qu’aujourd’hui, elle «fume du pot avec [ses] amis». «Des fois, je l’avorterais-tu, ma sœur, tu penses», souligne-t-on, au sujet du droit à l’avortement. «Les croquettes en forme d’animaux chez St-Hubert, c’est quoi, les animaux? (…) À part la girafe, c’est pas clair», argue-t-on comme un cri du cœur. «J’ai appris à sacrer en regardant mon père conduire», décrète-t-on quant aux aptitudes des «grands» au volant. Puis, concernant la bouderie chez les amoureux adultes, nos «petits vites» passent à voix haute la réflexion que «c’est tellement théâtral, quand [vous boudez], on dirait que vous jouez dans L’Auberge du chien noir».

Les 4 haïssables sacrent même, parfois. Et sortent de scène sur un tonitruant et enjoué «Bye, les losers!».

Mais pour qui?

Le flou, avec Les 4 haïssables, c’est qu’on se demande un brin à qui ça s’adresse exactement. Mathieu Gratton a bien insisté sur le fait que cette «thérapie collective» pour la tranche de la population qui ne possède pas encore son permis de conduire s’adressait aux adultes ; ce sont en effet eux qui passent au tordeur dans ce défoulement comique, et les plus jeunes pourraient même avoir du mal à saisir tous les gags, même si, de prime abord, la proposition semble parfaite pour eux. Quand l’une des gamines vocifère que ça sent le sexe dans la chambre de ses parents, on doute qu’un bambin de huit ou neuf ans apprécierait la taquinerie à sa juste valeur.

En revanche, les quatre mini-têtes d’affiche des 4 haïssables ont beau être talentueuses et attachantes, il n’en demeure pas moins que deux heures de stand-up sur ce ton juvénile peuvent devenir lassantes. Il faut beaucoup aimer les enfants et les adolescents, et même, idéalement, en avoir à la maison, pour y trouver pleinement son compte. Certains sketchs insérés dans l’enchaînement tombent aussi un peu à plat, mais rien pour crier à la catastrophe.

Ceci dit, on ne reniera pas l’intérêt de cette production somme toute très bien ficelée, cette critique sociale unique et originale, qu’on n’hésite pas à qualifier de « full» divertissante et réussie. Il est intéressant d’entendre le point de vue des adolescents sur les banalités du quotidien et les grands tracas de la vie, eux qui n’ont pas beaucoup de tribunes pour se faire entendre véritablement.

On se doute bien que les propos de ces adorables haïssables ne sortent pas tous directement de leur coco, qu’on leur a sûrement mis quelques mots en bouche, mais les opinions sont assez tranchantes et assumées pour qu’on croie qu’ils les endossent totalement. Après tout, Rose, Victor, Jade et Philippe semblent avoir assez de cran pour crier le fond de leur pensée lorsque nécessaire!

La tournée des 4 Haïssables se poursuivra entre autres à Québec (mercredi 9 novembre) et Ste-Thérèse (dimanche 13 novembre), et repassera au Gesù, à Montréal, le 18 février 2017. Plus de détails sont disponibles sur le site officiel.

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