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Donald Trump est fragilisé avant le deuxième débat avec Hillary Clinton

Donald Trump est fragilisé avant le deuxième débat avec Hillary Clinton

Nous sommes au cœur de ce qui devrait être l'Amérique de Donald Trump. Dans cette ville où le nord anti-esclavagiste, dirigé par les républicains, a remporté la guerre civile, où Abraham Lincoln a rendu hommage aux morts, où Dwight Eisenhower a vécu, ceux qui toute leur vie ont été fidèles au parti républicain s'efforcent de rester derrière Trump.

Mais ce n'est pas chose aisée ― et la diffusion récente d'un enregistrement du candidat républicain se vantant de ses prédations sexuelles d'homme marié ne facilite pas la tâche.

Tandis que des républicains de tous les Etats-Unis laissent comme un seul homme tomber Trump ou refusent d'apparaître à ses côtés lors d'événements de campagne, les responsables locaux de l'Adams County sont pris dans le tourbillon.

"C'est juste un mâle dominant qui fanfaronne"

"Eh bien, ma première réaction c'est de dire que c'est juste un mâle dominant qui fanfaronne auprès d'un autre mâle dominant", affirme Elizabeth Hower, la présidente républicaine du Adams County et de la ville historique de Gettysburg. "C'est le genre de choses que les hommes disent tout le temps lorsqu'ils sont entre eux, non?"

Mais Elizabeth Hower, fougueuse professeur d'école à temps partiel et dévouée conservatrice de 70 ans, désapprouve la décision de Trump de répliquer à ses critiques vendredi en attaquent sur l'historique d'infidélités conjugales de l'ancien président Bill Clinton et sur les réactions d'Hillary Clinton au fil des ans à ce sujet.

"Ce n'est vraiment pas malin" affirme-t-elle. "Je ne veux pas qu'il dise ce genre de choses, et j'espère qu'il ne le dise pas. Bill Clinton n'est pas candidat, et la question de l'attitude d'Hillary face à ce qu'il a fait ou n'a pas fait est hors sujet".

"Je souhaite que M. Trump se focalise sur la nécessité de donner de la substance, de répondre directement aux questions et de faire valoir ses positions", dit-elle pendant le repas au Blue Parrot Bistro près de la place centrale. "Il ne doit pas se laisser distraire par les sentiments et les attaques".

"Lui aussi peut changer"

Elle se lamente aussi des insultes nocturnes proférées sur Twitter par Trump visant la Miss Univers Alicia Machado, qui avaient précédé les dernières révélations. "C'était horrible", dit-elle.

"J'ai 70 ans ― le même âge que M. Trump", avance-t-elle. "On peut changer à cet âge. Je sais que ça a été mon cas. Lui aussi peut changer". Mais il n'a plus le temps pour ça, ou presque, y compris d'après les estimations qui ont cours ici.

Depuis un siècle et demi, la tradition républicaine locale, de Lincoln à "Ike", a été tolérante, mondialiste et sobrement moralisme ― rien à voir avec la xénophobie et les provocations incendiaires de Trump sur les questions raciales, la religion, l'ethnicité ou les attitudes sexuelles.

Alors que nous ne sommes plus qu'à un mois de l'élection ― et que le vote anticipé a déjà commencé dans plusieurs Etats ― il est difficile de savoir si les soutiens de Trump comme Elizabeth Hower comptent réellement sur lui comme prochain président ou s'ils le voient plutôt comme un symbole de ce qui s'apparente à un mouvement séparatiste en cours de formation.

Un premier débat désastreux

Depuis sa prestation désastreuse lors du premier débat, ses tweets autodestructeurs qui ont suivi et ses prises de parole quasiment incohérentes, le candidat républicain a chuté dans les sondages et dans les projections en termes de grands électeurs.

Même avant les dernières révélations sur son comportement à l'égard des femmes, les projections big data du Huffington Post estimaient à environ 80 % les chances de la démocrate Hillary Clinton de l'emporter.

Elizabeth Hower affirme que Trump a soulevé des questions légitimes. Notamment sur les traités commerciaux, l'immigration, les attaques terroristes sur le territoire américain, l'engagement persistant et infructueux des Etats-Unis au Moyen-Orient et l'idée fondamentale que Washington doit évoluer.

Mais il apparaît bien souvent que son objectif réel est d'attiser la peur et le sentiment d'aliénation de ses supporters ― essentiellement blancs, ruraux et âgés ― en flattant les craintes raciales, ethniques et religieuses sur le plan intérieur et en proposant ni plus ni moins qu'un retrait du balai diplomatique à l'extérieur.

Vouloir "rendre sa grandeur à l'Amérique" suffira-t-il?

Lors d'un rassemblement dans un motel de Gettysburg ce jeudi, le colistier de Trump, Mike Pence, gouverneur de l'Indiana, a fièrement expliqué à la foule nombreuse qu'il avait visité le champ de bataille dans les environs vallonnés de la ville. Il a rappelé que des soldats originaires de son Etat avaient combattu et étaient morts pour mettre fin à l'esclavage, préserver les Etats-Unis et sauvegarder la "liberté".

Mais il a poursuivi en chantant les louanges de Trump, dont il serait trop long de résumer les rancoeurs presque violentes ― contre les musulmans, les Mexicains, les femmes "machines à manger" et bien d'autres.

La foule, d'une blancheur presque uniforme, a applaudi lorsque Mike Pence a fait le serment que Trump et lui "rendraient sa grandeur à l'Amérique". Mais dans cette salle, ces applaudissements semblaient plutôt être l'expression d'un désir ardent d'être laissés tranquilles.

Aucun récit n'est sorti sur la superbe vie de Trump et ses réalisations. De fait, il a fait tout ce qu'il a pu pour cacher l'histoire réelle (en chiffres) de la seule réussite qu'il revendique ― sa carrière d'homme d'affaires. Peu de détails, voire aucun, ont été donnés sur les grandes propositions visant à bâtir cette grande Amérique. Les rancoeurs sont profondes, la stratégie est superficielle.

Au final, vu son histoire, l'Adams County votera probablement pour Trump. Mais si Trump ne montre pas un visage plus grave et plus sérieux de lui-même au cours du deuxième débat présidentiel ce dimanche, on peut douter que la Pennsylvanie ― voire le pays tout entier ― voudra en faire de même.

Cet article, initialement publié sur le Huffington Post américain, a été traduit de l'anglais par Mathieu Bouquet.

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