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Transition énergétique Québec, un nouvel organisme «bidon»?

Transition énergétique Québec, un nouvel organisme «bidon»?
Radio-Canada.ca

Le projet de loi à l'étude sur la politique énergétique à Québec est une bestiole à deux têtes : d'un côté, on prévoit encadrer l'exploration des hydrocarbures à Québec; de l'autre, on cherche à organiser les efforts de réduction des émissions de gaz à effet de serre. La question du pétrole, du gaz et de la fracturation hydraulique fait la manchette. Mais, l'autre partie est franchement plus préoccupante, selon deux experts parmi les plus influents du Québec en matière d'énergie.

Un texte de Gérald Fillion

Le problème selon les professeurs et chercheurs Pierre-Olivier Pineau et Normand Mousseau, c'est que la nouvelle entité, Transition énergétique Québec, n'aura pas les moyens de ces ambitions.

« Tel que c'est construit, ça ne marchera pas, a dit Normand Mousseau à RDI économie mardi, lui qui a coprésidé la Commission sur les enjeux énergétiques du Québec en 2013. C'est impossible que cet organisme-là puisse changer les choses dans le secteur des transports, l'aménagement du territoire, l'efficacité énergétique dans la construction par exemple. Donc, on va se retrouver avec un organisme un peu bidon. »

Pourquoi?

Parce que la nouvelle agence va dépendre du ministère de l'Énergie et des Ressources naturelles alors que les vrais problèmes en terme de consommation énergétique sont aux ministères des Transports et de l'Environnement.

« Cet organisme-là, même si sur papier, en principe, il a la possibilité de dire à un autre ministère : " il faut faire ceci, il faut faire cela ", quand on regarde la hiérarchie, comment les choses se dessinent dans un gouvernement, c'est impossible que ça se fasse » selon Normand Mousseau.

« Il y a plusieurs imperfections dans la création de l'organisme, nous disait Pierre-Olivier Pineau le 8 juin dernier à RDI économie, comme, par exemple, le Fonds vert, qui est le fonds principal pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, [qui] ne sera pas sous la juridiction de Transition énergétique Québec. Alors, il y a des fonds, d'ici 2020, plus de 3 milliards de dollars, qui ne seront pas sous l'organisme qui devrait coordonner ça. Le ministère des Transports aussi aura ses programmes qui ne seront qu'imparfaitement coordonnés avec Transition énergétique Québec. »

Au bureau du premier ministre

Le ministre de l'Énergie Pierre Arcand a beau dire que « les gens se parlent » au gouvernement, selon Normand Mousseau, « ça devrait relever du bureau du premier ministre parce que c'est la seule façon d'agir sur l'ensemble des décisions gouvernementales. Le ministère de l'Environnement n'a pas toutes les cartes, le ministère des Transports n'a pas toutes les cartes. »

Non seulement Transition énergétique Québec aura du mal à remplir son mandat, il aura également peu de moyens pour agir. « Ils n'ont même pas la capacité d'agir d'un point de vue financier pour forcer les autres [ministères] à répondre, selon Normanda Mousseau. (...) Tel qu'il est là, il ne pourra pas accomplir son mandat, qui est très ambitieux. »

Et donc, la question simple qui se pose, c'est de savoir si le Québec réussira vraiment à atteindre des cibles de réduction de gaz à effet de serre en 2020 - puis en 2030 - si l'organisme de gestion de la transition n'est pas capable d'agir.

Marché du carbone, à quel prix?

Si Québec rate ses cibles, combien cela va-t-il coûter à l'État et aux contribuables ? Nous faisons partie d'un marché du carbone avec la Californie et bientôt avec l'Ontario. Combien coûtera la tonne de CO2 en 2020, en 2025, puis en 2030, si on est obligé d'acheter des crédits plutôt que d'en vendre? Combien de millions et de milliards, il faudra injecter dans ce marché pour financer des projets à l'extérieur du Québec, demande Normand Mousseau ?

On revient ainsi au Fonds vert. Quelles sont les priorités du Fonds? Quelle est la vision? Comment le Fonds va-t-il investir pour réduire les émissions de gaz à effet de serre et éviter que des millions et des milliards soient injectés dans le marché du carbone? Dans l'intérêt écologique, financier et économique du Québec...

Alors, pourquoi l'organisme Transition énergétique Québec ne serait-il pas en charge des orientations, des programmes, des budgets, des décisions dans le but de réaliser une chose essentielle, capitale, qui est l'objectif fondamental de tout ce qu'on fait en ce moment : réduire notre empreinte carbone, réduire nos émissions de gaz à effet de serre et faire respirer un peu notre planète ?

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