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Ce Rembrandt a été peint par... une intelligence artificielle

Ce Rembrandt a été peint par... une intelligence artificielle
Female heads connected to globe by network of lines(Digital)
Zap Art via Getty Images
Female heads connected to globe by network of lines(Digital)

Ces dernières années, les robots et l'intelligence artificielle s'immiscent un peu partout. Les récentes percées dans ce domaine font même craindre à certain un remplacement de l'homme par la machine. Mais si de nombreux corps de métiers sont aujourd'hui menacés par la technologie, les métiers créatifs et artistiques semblent à première vue épargnés par cette épée de Damoclès.

Le sont-ils vraiment? Les récents progrès dans ce secteur ont permis à des machines de créer des "œuvres d'art". Notamment grâce au deep learning, ce système d'apprentissage qui s'immisce partout, de vos téléphones jusqu'au jeu de go, et permet à un réseau de neurones artificiels d'apprendre tout seul, à partir de millions d'exemples.

Grâce à cette nouvelle technique, les programmes ne suivent plus un bête algorithme où toutes les options ont été écrites par des développeurs, mais évoluent en fonction des données qui leurs sont fournies. Bien sûr, ces programmes sont destinés à des tâches particulières et l'idée d'une intelligence artificielle proche de l'homme est encore loin de nous, mais le deep learning permet à certaines machines de créer des choses que l'on pourrait attribuer à un artiste. La preuve avec 5 exemples.

Les acteurs de ce film sont réels, pas le scénario

Jeudi 9 juin, le site Ars Technica mettait en ligne Sunspring, un court métrage de 9 minutes avec Thomas Middleditch, l'acteur principal de la série à succès de HBO Silicon Valley. Le film, qui raconte l'histoire d'un triangle amoureux dans un monde futuriste où les jeunes sont obligés de vendre leur sang à cause du chômage, présenté à un festival londonien, est pourtant très étrange.

Les dialogues sont parfois clairs, parfois sans queue ni tête. A un moment, l'un des acteurs vomi un oeil, quand un autre se scanne la tête avec une tablette, sans raison apparente.

Pas besoin d'y chercher une signification profonde à la Terrence Malick, si le scénario est abracadabrant, c'est qu'il a été écrit par une intelligence artificielle. Le réalisateur Oscar Sharp a travaillé avec un chercheur de l'université de New York sur ce court-métrage.

Le programme a été "nourri" du script de dizaines de films de science fiction. Si un scénariste robot est encore très, très loin d'égaler son homologue humain, l'expérience est intéressante. Pour le réalisateur, elle permet de se rendre compte des schémas récurrents inhérents à ces films et que l'on retrouve dans de nombreuses répliques ou scènes de Sunspring.

Le "nouveau Rembrandt"

En avril, des chercheurs de Microsoft, de l'université de Delft et deux musées néerlandais dévoilaient un nouveau Rembrandt. Sauf que celui-ci n'a pas été peint par le maître mais par une intelligence artificielle, qui a appris le style si particulier en analysant les centaines d'oeuvres de Rembrandt.

"Notre but était de créer une machine qui travaille comme Rembrandt afin de mieux comprendre ce qui fait d'un chef d'œuvre un chef d'œuvre", a déclaré à la BBC Emmanuel Flores, directeur du projet. "Je ne pense pas que l'on puisse remplacer Rembrandt, il est unique", a-t-il toutefois ajouté. Une précision qui n'a pas empêché les critiques.

Le poète qui n'en était pas un

Dans le domaine de l'intelligence artificielle et plus particulièrement du deep learning, Google est un poids lourd. En mai, des chercheurs de sa branche Google Brain dévoilaient leurs derniers travaux. Après avoir donné à un réseau de neurones artificiels 11.000 livres, ils lui ont présenté deux phrases aléatoires et non liées, tirées de ce corpus de texte. Ils ont alors demandé à la machine d'inventer des vers qui permettraient de relier, à la fois en termes de syntaxe et de sens, ces deux phrases.

Le résultat n'est pas digne de vos poèmes de collèges, mais est tout de même impressionnant et intéressant. Le but n'étant pas tant d'apprendre à la machine à dire parfaitement une phrase, mais de lui apprendre les différents moyens de dire quelque chose. Ce qui pourrait être très utile pour les assistants personnels, tel Siri ou Google Assistant.

Voici un exemple de "poème" made in Google:

he was silent for a long moment.

Il resta silencieux pendant un long moment

he was silent for a moment.

Il se tut pendant un moment

it was quiet for a moment.

Il était calme pendant un moment

it was dark and cold.

Il faisait froid et sombre

there was a pause.

Il y eut une pause

it was my turn.

Ce fut mon tour

Le mouvement artistique de Google

L'une des intelligences de Google a carrément créé un courant artistique, l'inceptionnisme. A l'origine, les ingénieurs ont développé une intelligence artificielle fonctionnant encore une fois sur le principe du machine learning et du deep learning. Après lui avoir montré des millions d'exemples de formes, la machine devait normalement reconnaître des choses précises, comme des animaux.

En poussant la machine et en lui demandant de forcer le trait, le programme a commencé à reconnaître des animaux dans des nuages, un peu à l'instar de ce que l'on fait parfois quand on regarde le ciel.

Depuis, les internautes se sont emparés de l'outil et s'amusent à transformer une photo en une "oeuvre d'art". Google a même organisé une exposition de peintures produites par Deepdream, dont les fonds ont été reversés à une fondation pour l'art. Le tableau le plus cher a été vendu 8000 dollars. Pas mal pour une machine.

Dans le même genre d'idée, des scientifiques allemands ont réussi, toujours grâce à des réseaux de neurones artificiels, à transformer des photos en leur donnant le style d'un peintre célèbre. Quelques mois plus tard, des collègues d'une université voisine ont réussi à faire de même avec des vidéos.

Hal au chant et C3PO au synthé

Les musiciens et chanteurs ne sont pas à l'abris non plus. En mai 2015, des chercheurs finlandais ont dévoilé un robot rappeur, Deepbeat. Ils ont donné à la machine plus de 10.000 chansons de rap à analyser, provenant de plus de 100 artistes. Ils lui ont ensuite demandé d'analyser ces phrases, de comprendre les points saillants. En lui proposant une phrase de départ, ils lui ont ensuite demandé de trouver une autre phrase d'un autre rappeur pour continuer le morceau. Avec une volonté d'optimiser le "flow".

"Deepbeat surpasse les meilleurs rappeurs humaines de 21% en termes de longueur et de fréquence de rimes", expliquaient les chercheurs. Le sens, par contre, n'était pas vraiment au rendez-vous.

Si tous ces exemples peuvent impressionner, on ne peut pas les qualifier véritablement d'oeuvre d'art. Mais pourquoi au juste? Après tout, certains d'entre eux ont été créés sans but précis, en se basant sur des observations et des choses déjà existantes et en les transformant, les adaptant.

Sauf que ces réseaux de neurones artificiels ne sont dédiés qu'à une tâche particulière. S'ils apprennent, c'est uniquement dans un cadre précis, édicté par des ingénieurs. Cela peut faire d'incroyables outils, mais on ne peut pas vraiment parler d'activité créative de la part de ces machines.

Avant de devoir se demander, comme Philip K. Dick dans Blade Runner, si les androïdes rêvent de moutons électriques, il faudra déjà que nous arrivions à créer une intelligence artificielle générale, qui a conscience d'elle et n'est pas spécialisée sur une tâche. La bonne (ou mauvaise) nouvelle, c'est que nous ne savons pas encore comment faire. La mauvaise (ou bonne), c'est que de nombreux experts pensent que ça ne durera pas très longtemps.

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