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Panama Papers: un ex-champion de boxe canadien au cœur de projets controversés

Panama Papers: un ex-champion de boxe canadien dans la tourmente
Radio-Canada

L'ex-boxeur canadien Donny Lalonde est plongé dans une tourmente financière dans le cadre de projets immobiliers au Costa Rica. Le nom de celui qu'on surnommait le «Golden Boy» du Manitoba a récemment fait surface dans les Panama Papers.

Cet ex-champion de boxe dans la catégorie poids mi-lourd est devenu une vedette lors d'un combat en 1988 à Las Vegas contre Sugar Ray Leonard. Même s'il avait perdu ce combat, il avait empoché un chèque de plusieurs millions de dollars.

Après avoir investi dans des projets immobiliers en Colombie-Britannique qui se sont soldés en échecs, Donny Lalonde est déménagé au Costa Rica, en 2002, et a déclaré faillite au Canada en 2004. Il a toutefois été libéré de ses dettes le 15 janvier 2005.

Cette même année, en 2005, les registres publics révèlent qu'il a été désigné administrateur ou président de 38 compagnies établies au Costa Rica.

Un document de Mossack Fonseca démontre qu'environ deux ans après avoir été libéré de la faillite, Donny Lalonde possédait une valeur nette de 3 millions de dollars américains. La majorité de cet argent a été investi dans ses projets immobiliers.

Les Panama Papers ont aussi révélé qu'en 2007, Donny Lalonde avait placé 600 000 $US dans des comptes bancaires au Panama et y contrôlait plusieurs sociétés financières.

Les registres publics indiquent que l'ex-boxeur détient présentement 53 compagnies au Costa Rica.

Donny Lalonde a déclaré à CBC News et ses partenaires médiatiques que la majorité de ces entreprises ne lui appartiennent plus ou que leurs activités ont été suspendues.

M. Lalonde justifie sa valeur nette par des gains en capital. Dans un courriel envoyé à CBC News, il précise «qu'il a été chanceux lorsqu'il a investi dans le marché financier au Costa Rica.»

Des investisseurs veulent entamer des procédures judiciaires contre Lalonde

Au cours de cette enquête sur l'ex-boxeur et ses nombreuses entreprises révélées par les Panama Papers, CBC News a également appris que les projets immobiliers de Donny Lalonde éprouvaient de sérieuses difficultés.

D'ailleurs, un groupe d'investisseurs, incluant des Canadiens et des Américains, veut intenter une procédure judiciaire contre Donny Lalonde au Costa Rica, afin de recouvrir des milliers de dollars investis dans des projets immobiliers qui n'ont jamais abouti.

Jeannette Salazar Araya, l'avocate représentant les investisseurs insatisfaits, précise que 29 de la quarantaine de personnes qui ont investi dans les projets El Escape et Howler Ridge de Donny Lalonde veulent entamer des procédures judiciaires, mais les preuves pourraient être insuffisantes.

Dans un courriel envoyé au service d'information DatabaseAR, Salazar Aray allègue que Donny Lalonde aurait amassé environ 3,5 millions de dollars en investissements. «Une partie de cet argent est allé dans des comptes bancaires au Costa Rica et l'autre a été transférée dans des comptes bancaires panaméens», affirme l'avocate.

Les allégations des investisseurs n'ont pas été prouvées en justice et M. Lalonde affirme qu'il ignorait qu'une procédure judiciaire contre lui pourrait être lancée.

«Tout se faisait par l'entremise de Donny»

Alors qu'elle résidait au Costa Rica, Daphne Buhlert, une résidente de la Colombie-Britannique dit y avoir rencontré Donny Lalonde et s'être liée d'amitié avec lui et sa famille. Mme Bulhert explique qu'elle a utilisé sa marge de crédit hypothécaire afin de pouvoir investir 55 000 $ dans une des compagnies de M. Lalonde, Daphne de Oriente Limitada.

Elle a signé un contrat pour l'achat de deux terrains dans le développement immobilier El Escape, un projet dont Lalonde et ses associés faisaient la promotion. Mais après plusieurs années, Mme Bulhert ne constatait aucune progression dans le développement du projet immobilier.

Une équipe du Toronto Star a visité les sites de certains projets immobiliers de Donny Lalonde au Costa Rica. Le projet El Escape, dans lequel Mme Bulhert a investi, ne semblait être qu'un terrain vague poussiéreux. Le projet immobilier n'a pas l'air d'être très avancé.

Mme Bulhert n'aurait jamais obtenu son remboursement comme elle l'a exigé et elle fait maintenant partie du groupe d'investisseurs qui souhaite entamer des procédures judiciaires contre Donny Lalonde.

«Je n'ai rien obtenu, à l'exception de paiements d'intérêts», raconte Daphne Buhlert dans une entrevue avec CBC News.

Cette Britanno-Colombienne n'est pas la seule dans cette délicate situation. Sue Lindstrom, résidente de la Floride, et ses amis ont investi, par le biais de Lalonde, 79 500 $US pour l'achat de deux terrains dans le projet El Escape.

Mme Lindstrom était déménagée à Tamarindo au Costa Rica en 2007 où elle a rencontré M. Lalonde. Elle raconte que tout «se faisait par l'entremise de Donny. C'est Donny qui m'a donné toute l'information et c'est lui qui a signé le contrat d'achat», raconte Mme Lindstrom, qui a investi, à elle seule, 30 000 $US.

Elle dit qu'on lui avait promis que ce projet immobilier serait une communauté fermée avec un spa, des sentiers équestres, un hôtel et des terrains réservés à la construction de résidences.

Mais après plusieurs années, Mme Lindstrom a elle aussi constaté que le projet n'avançait pas. Tout comme Mme Bulhert, Mme Lindstrom a exigé un remboursement, de même qu'un «privilège» sur le développement, afin d'être payée en priorité advenant la vente des actifs de M. Lalonde. N'ayant toujours pas reçu son argent en 2012; elle a demandé à un avocat d'initié un processus d'arbitrage avec M. Lalonde. Mme Lindstrom et ses amis sont parvenus à un règlement avec ce dernier, sans avoir eu recours à l'arbitrage.

«Sue Lindstrom avait été avertie des risques de l'investissement. Elle a pris ce risque, comme tous les autres investisseurs», dit M. Lalonde.

Mme Lindstrom affirme avoir dû encaisser une perte de 20 000 $. «Je suis furieuse», dit-elle. «Je ne suis pas une personne riche et j'avais besoin de cet argent. Je suis retraitée et je n'ai pas une grosse pension. Ce n'est pas qu'une question d'argent - il m'a volé deux années de ma vie, à cause du stress qu'il m'a fait vivre. Il a détruit mon rêve de m'établir de façon permanente au Costa Rica et je suis revenue [aux États-Unis] avec beaucoup de pessimisme.»

«Je n'ai rien à me reprocher»

Donny Lalonde affirme qu'il n'a rien à se reprocher et qu'il ne doit pas d'argent aux investisseurs. «La preuve est que je suis prêt à vous parler», a-t-il dit en entrevue, depuis sa résidence à Malte.

Selon lui, la tentative de procédures judiciaires «n'est que de l'extorsion, de la coercition et de la collusion. Ils essaient de prendre ce qui m'appartient.»

Donny Lalonde souligne qu'il n'est plus impliqué dans ces projets immobiliers, qu'il a démissionné de ces compagnies il y a trois ans et qu'un associé est maintenant responsable.

Il jette plutôt le blâme sur la crise financière et sur la difficulté d'installer un réseau d'aqueduc. «Le monde était en crise financière. On est passé d'une situation au Costa Rica où tu serais fou de ne pas vendre tes terrains pour profiter du prix de vente extrêmement avantageux, à une situation où il était impossible de vendre un terrain, même pour une bouchée de pain», affirme Donny Lalonde.

«C'est tragique. Elle [Mme Bulhert] ne m'a pas personnellement donné cet argent. Elle l'a investi dans une compagnie, 100 % de son argent est allé dans le projet. Et il y eut une commission dans la transaction immobilière», ajoute M. Lalonde.

Donny Lalonde affirme que 40 % des investisseurs du projet El Escape ont été remboursés, mais qu'il n'y a maintenant plus d'argent pour rembourser les autres. «Ils ont demandé d'être remboursés et ils l'ont été. Mais pour certains, il ne reste plus d'argent à leur donner. Ça s'appelle l'insolvabilité. On leur a dit d'attendre qu'il y ait de l'argent pour recevoir un remboursement ou d'attendre que leur terrain soit développé.»

Lors de son entrevue avec CBC News, M. Lalonde a néanmoins présenté ses excuses à Mme Bulhert. «Je t'aime bien. Je suis vraiment désolé que tu n'aies pas l'argent et j'ai vraiment hâte qu'on puisse te la remettre. Tu as simplement été malchanceuse et tu as acheté au moment où les choses ont pris un mauvais tournant. Désolé.»

Mme Lindstrom ne croit pas du tout les justifications de Donny Lalonde. «Il semblait toujours avoir une excuse pour retarder le processus et puis quand les marchés financiers ont commencé à s'effondrer, il a utilisé la crise économique comme excuse», dit-elle.

Lalonde assure qu'il a tout fait en son pouvoir pour compléter les projets. «J'ai dû construire les infrastructures routières, électriques et d'aqueduc. J'en ai fait beaucoup plus que tous les autres investisseurs», ajoute Donny Lalonde.

Il croit toujours que ces projets iront de l'avant et qu'ils seront «les projets les plus beaux et les plus prospères du Costa Rica.» Donny Lalonde ajoute que plusieurs autres investisseurs sont satisfaits avec leurs investissements.

D'ailleurs, William Belanger, un ami de longue date de Donny Lalonde qui est responsable des développements de Howler Ridge et El Escape, précise que les projets sont toujours en cours.

Donny Lalonde n'hésiterait pas à retourner au Costa Rica pour se défendre si une procédure judiciaire est entamée contre lui. «Bien sûr, sans aucun doute, j'irais me défendre».

Avec des informations du Toronto Star, DataBaseAR et le journal The Malta Independant.

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