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Le plan C complètement fou des Républicains après l'abandon de Ted Cruz: présenter Trump et un autre candidat à la présidentielle

Le plan C complètement fou des Républicains: présenter 2 candidats à la présidentielle

Tout espoir de mettre un coup d’arrêt à l’ascension de Donald Trump vers la nomination républicaine avant la convention estivale du parti a été anéanti mardi 3 mai après que le sénateur du Texas Ted Cruz s’est retiré de la course suite à sa défaite dans l’Indiana. Les espoirs qui subsistent résident désormais dans un plan C: mettre sur orbite un autre candidat républicain à la présidentielle, en plus de Trump.

À Washington, les rumeurs autour de la possibilité d’une candidature indépendante menée par un conservateur classique se font plus pressantes. Elles sont en partie alimentées par le fonctionnement même du cycle électoral : les consultants politiques attendent impatiemment — et comptent financièrement sur — cette élection présidentielle, qui se tient tous les quatre ans et qui représente une manne de plusieurs milliards de dollars.

Soyez-en assurés, la campagne de Donald Trump offrira une infinité d’opportunités aux magouilleurs. Mais si vous faites partie des membres reconnus de l’establishment de Washington, il n'y aura peut-être pas la réponse souhaitée à vos messages téléphoniques. Surtout si vous avez passé les six derniers mois à poster le hashtag #NeverTrump sur votre fil Twitter.

Apaiser les républicains mécontents

Mais il existe aussi des raisons politiques à l’avènement d’une candidature indépendante. La présence d’un conservateur classique lors du scrutin de novembre pourrait soustraire quelques points au score de Donald Trump, ce qui assurerait quasiment la victoire à Hillary Clinton — et ce qui offrirait aux conservateurs proches des milieux d’affaires qui préfèrent Clinton la possibilité de la soutenir sans le faire directement. Tout aussi important, un candidat alternatif issu des rangs conservateurs pourrait amener aux urnes des électeurs républicains mécontents de voir Donald Trump en tête d’affiche du ticket de leur parti, et ainsi apporter leurs voix aux candidats républicains aux scrutins locaux qui se tiendront au même moment, des candidats qui en auraient bien besoin.

"Ce serait bien", affirme Tim Miller, ancien directeur de la communication de Jeb Bush et cheville ouvrière de premier rang du mouvement Never Trump, en évoquant l’idée de s’assurer d’une défaite de Trump par le soutien d’une candidature tierce. "Si un autre candidat conservateur offre à des républicains qui ne peuvent pas supporter Trump la possibilité de voter pour quelqu’un d’autre, et permet ainsi raisonnablement de résoudre notre problème de participation, je pense qu’il faut l’envisager."

Une victoire d'Hillary Clinton, pas le pire des scénarios

Sam Geduldig, ancien conseiller de John Boehner et aujourd’hui lobbyiste, affirme qu’une victoire d’Hillary Clinton n’est pas nécessairement le pire des scénarios pour les républicains. "Une candidature conservatrice indépendante pourrait en fait aider la Chambre des représentants et le Sénat", écrit-il dans un email. "Ça voudrait dire que Clinton gagne à coup sûr, ce qui pourrait faire baisser la participation des démocrates dans des endroits comme l’Illinois. Donc les soutiens de Trump soutiennent Mark Kirk, les soutiens [de l’autre candidat] aident Kirk, les démocrates participeraient moins parce que Clinton gagnerait (l’Illinois) haut la main et on tiendrait le siège de sénateur. Et en 2018, il y aura probablement une vague anti-Hillary, on remporterait alors de larges majorités à ses premières élections de mi-mandat. Ce qui mènerait à un redécoupage des circonscriptions qui nous serait favorable en 2020."

Mais le vrai problème que pose le lancement d’un candidat alternatif contre Donald Trump n’est pas l’incertitude des résultats, c’est plutôt d’arriver à faire émerger cette candidature."Il y aura certainement des débats à ce sujet, en particulier de la part de ceux qui veulent pouvoir voter pour un conservateur sérieux et proche de l’esprit de la Constitution", affirme Doug Heye, qui fut un proche conseiller d’Eric Cantor, l’ancien chef de la majorité républicaine au Congrès. "La difficulté est qu’il y a une forte barrière à l’entrée, pour pouvoir transformer ce souhait en réalité."

Trouver le bon candidat

Parmi les premiers obstacles, il faut déjà trouver un individu désireux de se lancer. Car une telle tentative serait une mission suicide pour la réputation du candidat. Une bonne partie du parti républicain l’accuserait immédiatement de saper toute chance du parti de remporter la Maison blanche (en supposant qu’ils pensent réellement que Donald Trump a des chances d’y parvenir). Et l’appareil républicain officiel s’opposerait formellement à la démarche du candidat en question. Seule une personne n’ayant aucune ambition future de conquérir la Maison blanche pourrait se lancer.

"Tout signe de désunion du parti républicain contribuerait au final à l’élection à la présidence d’Hillary Clinton", affirme Sean Spicer, conseiller haut placé au Republican National Committee, lorsqu’on le questionne sur les rumeurs d’une candidature alternative.

Au-delà de ces considérations, un candidat alternatif se verra soumis à des mois de tirs de barrage de Donald Trump, qui n’est pas vraiment connu pour traiter ses adversaires politiques avec tendresse. "Qui va y aller ? Qui est-ce qu’ils vont mettre là ?"demande John Feehery, responsable républicain expérimenté, qui malgré ses propres réserves a récemment encouragé le parti à se rallier derrière Donald Trump. "Je pense que ce sont des conneries alimentées uniquement par le système de Washington, par une poignée de consultants politiques frustrés que leur candidat n’ait pas gagné. Et je pense que c’est n’importe quoi."

Sentiment de panique

Même si les frondeurs parvenaient à recruter quelqu’un pour affronter Donald Trump, ce candidat devra dans les faits se présenter au scrutin. Pour atteindre l’objectif qui consiste à aider les candidats à la Chambre des représentants et au Sénat tout en barrant la route à Trump pour la présidence, il lui suffirait de se qualifier dans certains swing states (même si une candidature dans l’ensemble des 50 états apparaîtrait bien plus crédible). Mais même pour ça, il faut récolter des signatures et respecter des dates limites. Un groupe de donateurs conservateurs étudiait apparemment les conditions d’accès au scrutin justement dans cette perspective, en février dernier. Des sources républicaines dans la confidence indiquent cependant que cette démarche s’est étiolée ces derniers mois.

Il n’en reste pas moins que le sentiment de panique déclenché par l’impact que Donald Trump pourrait avoir sur le parti, ainsi que l’inquiétude sur son comportement s’il était élu président, ont grandement alimenté les discussions sur l’opportunité de soutenir un autre candidat. Un collecteur de fonds de premier plan du parti évoque le sénateur républicain de Pennsylvanie Pat Toomey, qui ne pourrait que tirer profit de l’arrivée dans la course d’un autre candidat à la présidentielle : cela donnerait une raison d’aller voter aux conservateurs modérés des banlieues, sans pour autant blesser les trumpistes fervents du centre de son état.

"Je pense que vu son cas, Pat est très inquiet", explique le collecteur de fonds. "Et je pense qu’il est inquiet parce qu’il doit récolter des suffrages dans tout l’état, y compris dans de nombreuses zones où Trump ne fera pas campagne."

Mais, inévitablement, le problème revient à poser la question de ceux qui auraient réellement la volonté de donner un coup de main aux Toomeys de tous les Etats-Unis et, tout aussi important, de le faire de manière efficace. A ce jour, plusieurs donateurs républicains de premier plan nous ont affirmé être dans la confidence de discussions sur le recrutement d’un candidat, mais en ont été ensuite écartés.

Une candidature sacrificielle

"Il y a [actuellement] des rumeurs autour du général [James] Mattis", écrit dans un email un donateur qui a récolté plusieurs dizaines de millions de dollars pour le parti."Mais je ne pense pas que ça collera." (Le général Mattis a affirmé qu’il n’était pas intéressé par la démarche.) Parmi les autres noms évoqués, on peut citer les gouverneurs Susana Martinez (Nouveau Mexique), Brian Sandoval (Nevada) et Nikki Haley (Caroline du Sud) — des républicains appréciés, qui pourraient aider leur parti justement vis-à-vis des électeurs pour qui Donald Trump agit comme un repoussoir. Mais aucun d’entre eux n’a manifesté la volonté de se jeter dans la bataille présidentielle, et tous manquent de la reconnaissance à l’échelle nationale et de la fortune personnelle qui permettrait à leur candidature de fonctionner.

Pourquoi y aller? Pour un responsable sans ambition politique future, une candidature sacrificielle permettrait de s’attirer les faveurs d’un bon nombre de républicains aux poches très remplies, ce qui pourrait constituer un bon parachute doré pour sortir de la vie politique. Mais en dehors de ça, il y a peu d’avantages. A moins d’avoir une inspiration divine, ce qui donne espoir à certains que Mitt Romney ou l’ancien sénateur Tom Coburn se jettent à nouveau dans la mêlée.

Les autres candidats alternatifs possibles sont plus susceptibles de soutenir Hillary Clinton (ainsi de Michael Bloomberg, l’ancien maire de New York City) alors que certains républicains moins cotés finiront par soutenir Donald Trump (pensez à John Boehner, l’ancien speaker de la Chambre des représentants).

"Le seul candidat alternatif parfait serait Trump lui-même. C’est toute l’ironie de la situation. Il faut un type riche, mégalomane et déjà célèbre", affirme John Podhoretz, un éditorialiste conservateur qui affiche ses positions anti-Trump. "C’est lui, le candidat alternatif classique".

Michael Steele, ancien président du Republican National Committe, pense lui que les républicains peuvent lâcher l’affaire. "Je ne pense pas que ça se fera, au final", écrit-il dans un email. "Personne n’ira se ranger derrière ce candidat. Vous voulez des preuves ? Regarder le ‘mouvement’ Stop Trump."

Cet article, initialement publié sur le Huffington Post Etats-Unis, a été traduit de l’anglais par Mathieu Bouquet.

Voir aussi :

Sur ses électeurs

Les polémiques de Donald Trump en campagne

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