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Loi de Cassie et Molly : les conservateurs se défendent de relancer le débat sur l'avortement

Les conservateurs se défendent de relancer le débat sur l'avortement

OTTAWA – Un fœtus devrait-il être considéré comme une deuxième victime quand une femme enceinte est tuée ou blessée? C’est ce que suggère le projet de loi privé de la députée conservatrice Cathay Wagantall.

La Loi de Cassie et Molly ou C-225, qui propose de modifier le Code criminel pour y inclure de nouvelles infractions lorsqu’un enfant à naître est en jeu, a créé des remous à la Chambre des communes lors du premier débat à ce sujet. Déjà, les libéraux et le NPD ont indiqué qu'ils n'appuieraient pas le projet.

Cathay Wagantall, une élue de la Saskatchewan, a décidé de présenter C-225 après avoir entendu l’histoire de Jeff Durham, un homme qui a perdu sa conjointe Cassie et sa petite Molly dans un incendie criminel. Molly devait naître dans 10 semaines au moment du meurtre.

Jeff Durham a créé le site Molly Matters en l'honneur de sa fille à naître.

La députée soutient que son projet de loi comblerait une lacune dans le Code criminel pour les femmes enceintes et ce, sans changer la définition légale d’un être humain ou le statut légal du fœtus.

La Loi de Cassie et Molly ne pénaliserait pas non plus une femme enceinte qui ferait du mal à l’enfant qu’elle porte dans son ventre, de façon directe ou indirecte.

« Les nouvelles infractions prévues s’adressent seulement aux situations où une tierce personne fera du mal ou tue un enfant à naître pendant qu’il commet ou tente de commettre une infraction criminelle contre la femme », a déclaré Cathay Wagantall, qui a retenu ses larmes par moments pendant son discours.

« Passer par la porte d'en arrière »

Mais ces garanties n’ont pas suffi à convaincre les autres partis, qui accusent déjà les conservateurs de vouloir relancer le débat sur l’avortement.

« Ceci est clairement un projet de loi qui vise à rouvrir le débat sur l’avortement. Les protections pour les mères existent déjà dans la loi et la grossesse est déjà une considération du système de justice en place », a répliqué David Graham, député de Laurentides-Labelle.

« Je pense que c’est une énième tentative des conservateurs de passer par la porte d’en arrière dans ce débat-là », fait remarquer pour sa part Luc Thériault, leader parlementaire du Bloc québécois.

"Nous sommes tous d’accord pour dire que la protection des femmes contre la violence, dont les femmes enceintes, est un objectif primordial."

— Bill Blair

Dans les rangs conservateurs, on assure qu’il y aura un vote libre sur la Loi de Cassie et Molly. Mais certains députés disent vouloir prendre connaissance des détails avant de faire leur choix.

« Dans le processus, on va débattre, on va écouter les argumentaires de part et d’autre, dit Joël Godin, député de Portneuf—Jacques-Cartier. Ce projet de loi est intéressant et je pense qu’il faut s’y pencher et y réfléchir. »

Le député de la région de Québec se dit « réceptif » aux idées proposées par sa collègue Cathay Wagantall. « Je suis très sensible à ça et je pense qu’on se doit de protéger le fœtus », ajoute Joël Godin.

Pour le chef adjoint du Parti conservateur, Denis Lebel, il est « clair » que son caucus n’ouvrira pas le débat sur l’avortement. « C’est une chose réglée! » dit-il.

Un mandat plus large

Le parlementaire secrétaire de la ministre de la Justice, Bill Blair, a fait remarquer que deux projets de loi semblables – qui visaient à punir les personnes coupables d’avoir attaqué une femme enceinte – ont été rejetés en 2006 et en 2008.

S’il a salué la « compassion » et « l’engagement » de la conservatrice Cathay Wagantall dans ce dossier, l’ancien chef de police dit craindre que son projet de loi n’aille à l’encontre de la Charte des droits et libertés.

Bill Blair est l'ancien chef de police de Toronto. (Photo : PC)

« Nous sommes tous d’accord pour dire que la protection des femmes contre la violence, dont les femmes enceintes, est un objectif primordial », a fait valoir Bill Blair. Il craint toutefois que la Loi de Cassie et Molly ait un « impact négatif » sur le droit des femmes de choisir de mettre fin à sa grossesse ou non.

« Parce que ses infractions s’appliquent à un fœtus, à n’importe quel stade de son développement, cela voudrait dire qu’elles pourraient s’appliquer dès son moment de conception et donner au fœtus un statut juridique qui n’est pas reconnu actuellement », explique-t-il.

Il a également rappelé que la loi prévoit déjà des peines plus sévères lorsqu’une mère en devenir est victime d’un crime.

La porte-parole du NPD en matière de Condition féminine, Sheila Malcolmson, pense que la lutte contre la violence faite aux femmes enceintes s’inscrirait dans un plan d’action global du gouvernement fédéral.

Dans leur budget, les libéraux ont promis des investissements de 90 millions de dollars pour mieux aider les victimes de violence conjugale avec la création de nouvelles places dans les centres d’hébergement.

La ministre fédérale de la Condition féminine, Patty Hajdu, s’affaire aussi à élaborer une stratégie nationale pour lutter contre les inégalités basées sur le genre en collaboration avec les provinces.

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