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La Caroline du Nord et sa loi anti-transgenre se mettent à dos de plus en plus de personnalités

La Caroline du Nord se met à dos de plus en plus de personnalités

La contestation ne faiblit pas. Près d'un mois après la promulgation d'une loi discriminatoire envers les personnes transgenres, la Caroline du Nord continue de voir la liste des entreprises et personnalités qui lui tournent le dos s'allonger quasi quotidiennement.

Derniers exemples en date: le Cirque du Soleil et la chanteuse Cyndi Lauper. Chacun a annoncé vendredi 15 avril rejoindre le rang des opposants. La célèbre entreprise artistique canadienne va tout bonnement annuler trois des spectacles qu'elle avait prévus dans cet État du sud-est des États-Unis entre avril et juillet. La chanteuse américaine va, elle, maintenir sa venue mais reversera tous les bénéfices de sa représentation à Equality North Carolina, une organisation qui lutte contre la loi qui suscite cette polémique.

Tous deux rejoignent ainsi la Deutsche Bank qui a gelé les embauches sur ce territoire, Bruce Springsteen et Ringo Starr qui ont annulé des concerts, Paypal qui a renoncé à un projet d'investissement ou encore le site pornographique xHamster qui a bloqué l'accès à ses vidéos dans la région.

Des producteurs de cinéma ont même été jusqu'à annuler des tournages pour les délocaliser dans un autre État ou pays et une centaine de dirigeants de grandes entreprises –dont Apple, Bank of America, Marriott, Starbucks, Facebookont par ailleurs écrit au gouverneur pour partager leur mécontentement.

Quelles toilettes les personnes trans doivent-elles utiliser?

Ce mouvement va même plus loin. Les gouverneurs de New York et du Connecticut ont notamment interdit à tout le personnel administratif de leur État de se rendre en Caroline du Nord, sauf pour traiter des dossiers "essentiels". Une très large contestation partie d'une interrogation relativement simple que de nombreux États américains se posent actuellement: quelles toilettes les personnes trans doivent-elles utiliser? Celles qui correspondent à leur identité de genre ou celles qui correspondent à leur identité sexuelle à la naissance?

Beaucoup de régions s'interrogent mais certaines sont allées plus loin et n'ont pas hésité à légiférer, à l’instar de la Caroline du Nord. En réponse à une ordonnance de la ville de Charlotte qui autorisait les personnes trans à se rendre dans les toilettes de leur choix, l'État a tranché que seule l'identité sexuelle à la naissance comptait.

En clair, le 23 mars la Caroline du Nord a interdit aux hommes trans (nés femmes) d'utiliser les toilettes des hommes et les femmes trans (nées hommes) d'utiliser celles des femmes. Et l'État n'est pas le seul à s'en prendre aux personnes trans. D'après un décompte du Los Angeles Times, huit autres régions seraient en train d'essayer de passer des lois similaires et seuls 18 États permettent légalement aux personnes trans d'utiliser les toilettes de leur choix.

Sous la pression croissante de personnalités et d'entreprises, le gouverneur de la Caroline du Nord a annoncé mardi 12 avril restreindre la portée de la loi en laissant finalement le secteur privé le choix de la respecter ou non. Mais elle reste valide dans les écoles et les bâtiments administratifs, ce qui ne satisfait en rien ses opposants.

"Ils jouent sur la peur de l'agression par des personnes trans"

Pour la porte-parole de l'Inter-LGBT Clémence Zamora-Cruz, c'est une nouvelle manière de s'en prendre aux personnes trans. "Ces mouvements réactionnaires ne s'attaquent plus à l'identité de genre mais à la manière dont les personnes trans agissent", explique-t-elle au HuffPost. En d'autres termes, l'attaque n'est plus frontale mais pernicieuse.

Cette militante estime que "la discrimination est inversée". En effet, l'argument principal brandi par les défenseurs de cette loi de Caroline du Nord –la "HB2", pour "House Bill 2"– est le suivant: il faut protéger les femmes et les enfants. "Ils jouent sur la peur de l'agression sexuelle par des personnes trans", dénonce Clémence Zamora-Cruz.

Pourtant, c'est bel et bien l'inverse qui est plus susceptible de se produire. "Une personne trans se sent en danger quand elle n'utilise pas les toilettes de son choix", assure la militante. Pour preuve, plusieurs personnes trans ont déjà été prises à partie: en 2011, une femme trans avait notamment été battue dans un McDonald's en se rendant dans des toilettes pour femmes.

Les toilettes neutres, une solution ?

Depuis le vote de la loi en Caroline du Nord, les initiatives se multiplient. Un homme trans de cet État a par exemple décidé de se munir de petites cartes informatives qu'il distribuera à toutes les femmes qui pourraient s'interroger de sa présence dans les toilettes des dames. "Mon nom est Charlie, je me plie à la loi passée le 23 mars. Je suis un homme transgenre qui préférerait utiliser les toilettes pour hommes. C'est gênant pour chacun d'entre nous. Dites que vous vous opposez à cette loi", a-t-il écrit sur ces étiquettes.

Une femme nommée Emily Waggoner a quant à elle décidé de constituer une carte des toilettes de Caroline du Nord qui sont sont sûres pour les personnes trans. Pour repérer celles-ci, deux moyens: "Soit l'établissement a affiché sur Twitter son désaccord envers la loi, soit il a posté une image d'un écriteau 'toilettes pour tous les genres'", explique-t-elle à Buzzfeed.

De telles toilettes mixtes existent et pourraient être la solution aux problèmes que rencontrent les personnes trans dans ces situations. "Nous réclamons en France des toilettes qui distinguent pas entre les hommes et les femmes", affirme Clémence Zamora-Cruz. "Mais il faut comprendre que les toilettes ne sont qu'un prétexte pour faire passer des discriminations", s'empresse-t-elle d'ajouter. "On met les personnes trans en état de criminalité. Cette vision binaire de la société revient à instaurer une ségrégation".

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