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Féministes et fières de l'être

Féministes et fières de l'être

Propos recueillis par Danielle Beaudoin

Pour Joanie Heppell, il va de soi de prôner l’égalité hommes-femmes, que ce soit en enseignant à l’UQAM, lorsqu’elle rencontre des patients ou dans sa vie privée. Est-elle militante? Peut-être pas. « Par contre, je me sens particulièrement engagée tous les jours de ma vie. »

Comment êtes-vous devenue féministe?

Chaque femme a sans doute un jour ou un autre vécu tout ce que j’ai vécu […] C’est toujours les mêmes remarques, les mêmes comportements qu’on suscite en tant que femme.

Quand j’étais très jeune, 12-13 ans, prépubère, un homme, une connaissance de mes parents, a fait une remarque sur mes seins, qui étaient absents. Une remarque vraiment désobligeante, un peu humiliante. Et personne, dans les adultes, n’a répliqué. Et moi, j’étais déjà tête forte, un peu revendicatrice. J’ai pris un verre d’eau souillée dans une flaque d’eau et je suis allée verser ça dans le dos du monsieur en lui disant que c’était inacceptable.

Très tôt, j’ai réalisé que parce que j’étais une femme, j’allais entendre certaines remarques et que personne n’allait prendre position pour moi. Donc, je me suis dit : « C’est à moi de le faire, je le fais! »

Être féministe, ça veut dire quoi?

Mon féminisme est quotidien. […] J’ai la conviction profonde que les hommes et les femmes devraient avoir les mêmes droits politiques, sociaux, économiques, mais aussi les mêmes opportunités. Pour moi, c’est essentiel. Personne ne peut être contre ça. Mais ça reste qu’on a de vieux réflexes qui sont longs à faire partir.

En tant que sexologue et psychothérapeute, je sais que le changement, c’est lent. Donc je suis très patiente. Et je trouve que tout ça peut être fait avec beaucoup d’amour, beaucoup de respect.

Que voudriez-vous mieux faire que les femmes avant vous?

Je ne prétends vraiment pas mieux faire. J’ai une reconnaissance infinie de ce que les femmes et certains hommes proféministes ont fait avant moi. Qu’est-ce que moi je fais concrètement? Justement, je n’en laisse pas passer une!

Vous identifiez-vous à un courant en particulier?

Je dirais poststructuraliste. Mais je m’intéresse aux stéréotypes de genre, ainsi qu’à l’intersectionalité : avoir conscience des différents stigmas, des différentes personnes qui peuvent avoir plusieurs éléments de répression, comme par exemple être femme, mais aussi être noire. Moi, j’ai des privilèges parce que je suis une femme blanche. Donc, c’est important pour moi d’être consciente aussi des femmes trans, des femmes d’une autre religion.

Quels sont les modèles qui vous inspirent?

Pour le féminisme humaniste au plan philosophique, l’écrivaine Simone de Beauvoir. Pour les féministes « du passé », Marie Gérin-Lajoie, pour ses racines en travail social. Pour mon côté poststructuraliste, Judith Butler, qui a travaillé sur le genre. Pour le côté décomplexé sur la sexualité, la dessinatrice Erika Moen.

Ikram Mecheri fait valoir ses valeurs féministes surtout grâce à l’écriture. Elle est rédactrice au journal étudiant Le délit et a aussi été blogueuse pour le Voir pendant quelques mois. Est-elle militante? « Je fais de mon mieux et ce n’est pas à moi de dire si je suis une militante. Je ne sais pas si je mérite le titre encore. »

Comment êtes-vous devenue féministe?

C’était au cégep. En fait, mon enseignante de littérature québécoise nous avait présenté les féministes de l’époque, dont Anne Hébert. Et Anne Hébert a déclaré, en 1988, qu’on ne peut pas être femme sans être féministe.

Par la suite, en étudiant un peu plus les écrits, je me suis rendu compte que beaucoup des principes du féminisme - l’égalité, l’équité, l’inclusion - correspondaient à mes valeurs. Donc ça s’est fait vraiment naturellement, après avoir découvert les oeuvres littéraires québécoises.

Être féministe, ça veut dire quoi?

C’est d’abord et avant tout croire en l’équité entre les hommes et les femmes ou tous les genres qui peuvent exister. Qu’il n’y ait pas de biais, que ce soit à l’embauche, dans la façon qu’on a de traiter les hommes ou les femmes, ou dans nos façons d’interagir. Donc c’est vraiment croire qu’on peut baliser nos lois, nos interactions sociales pour qu’on puisse être plus équitables envers tous.

Que voudriez-vous mieux faire que les femmes avant vous?

D’abord et avant tout, j’ai beaucoup de respect et de reconnaissance envers ces femmes. Sans elles, je ne serais pas là aujourd’hui et ma voix ne serait pas entendue comme elle l’est.

Ce que j’aimerais faire, c’est apporter un peu plus de rigueur intellectuelle dans le discours du mouvement féministe. Par exemple, à partir du moment où on dit à une femme qu’elle est libre de disposer de son corps, dans ce cas-là, on doit être d’accord avec le fait que certaines femmes vont en disposer d’une façon autre que nous le souhaitons. Si on dit à une femme qu’elle peut porter la minijupe ou le bikini, on devrait aussi être en mesure d’accepter qu’elle veuille recouvrir ce corps.

Deuxièmement […] certaines femmes voient encore le mouvement comme étant violent, revanchard, de façon très péjorative, et je pense que ça prouve qu’il y a encore des mythes qu’il faut absolument déconstruire, par le dialogue.

Vous identifiez-vous à un courant en particulier?

La troisième vague. Je pense que c’est le mouvement le plus inclusif. C’est un mouvement qui représente tous et toutes, que ce soient les hommes ou les femmes, les personnes transgenres, les homosexuels, les lesbiennes, vraiment tout le monde. La beauté, la force de ce mouvement-là, c’est qu’il ne te met pas dans une case automatiquement et en même temps il n’y a pas de prérequis pour faire partie de cette nouvelle vague.

Quels sont les modèles qui vous inspirent?

J’aime énormément Anne Hébert. […] Dans ses écrits, elle a toujours utilisé des personnages principaux féminins qui étaient forts, puissants. Et aussi Julie Payette. Quand j’étais petite, on venait à peine d’arriver au Canada et il n’y avait pas beaucoup de choses que je comprenais à la télé, parce que je ne parlais pas encore très bien français.

Mais on regardait Découverte, parce qu’il y avait toujours des belles images. Découverte a toujours accordé une place très spéciale à Julie Payette, et ça m’a démontré que même dans un milieu qui peut être très masculin et très difficile d’accès, il y a des femmes qui sont capables de réussir.

Janelle Bertrand a fait un baccalauréat en travail social à l’Université de Moncton, au Nouveau-Brunswick, et une maîtrise à l’UQAM avec une concentration en études féministes. L’Acadienne travaille au Centre des femmes solidaires et engagées d’Ahuntsic, et elle se définit comme une militante féministe.

Comment êtes-vous devenue féministe?

Je suis féministe depuis l’adolescence, mais je ne le savais pas à ce moment-là.

À l’université, j’ai entendu parler du féminisme, pis je me suis dit : « Ah! c’est ça que c’était! » C'est quand j’ai commencé à travailler dans les organismes communautaires et aussi dans mes stages que j’ai pu faire le lien entre la théorie et la pratique.

Être féministe, ça veut dire quoi?

C’est de me rendre compte qu’il n’y a pas juste le sexisme dans la vie. Il y a aussi le racisme, le colonialisme, l’homophobie, la transphobie. […] Tous ces systèmes d’oppression jouent des rôles très importants dans la vie des personnes, pis ça fait qu’il y a des impacts et des conséquences qui peuvent être néfastes.

Pour moi, être féministe, c’est vraiment de croire les histoires des personnes […], par exemple si elles sont victimes de violence conjugale, de violence familiale, si elles ont été violées. Je les crois.

Être féministe, pour moi, c’est aussi de lutter contre ces systèmes d’oppression, de les éliminer. […] La grosse lutte au Québec, c’est la lutte contre les mesures d’austérité qui appauvrissent les populations qui sont déjà très marginalisées, vulnérables. On le voit dans les centres de femmes.

Que voudriez-vous mieux faire que les femmes avant vous?

Les féministes ont mené de super luttes, je pense qu’il faut les continuer. […] La justice reproductive, c’est une lutte qui est très importante. Ce n’est pas juste le droit à l’avortement, ce n’est pas juste la contraception, ça inclut le logement, des emplois, des communautés qui se sentent en sécurité, ça inclut plein de choses.

Il y a aussi toute la notion de genre, les personnes trans, queer, intersexe, je pense qu’il faut en parler. […] Et la notion d’intersectionnalité, c’est quelque chose dont il faut absolument parler. Et on voit plein de choses qui se passent sur les réseaux sociaux, les violences envers les femmes.

Vous identifiez-vous à un courant en particulier?

Féminisme intersectionnel. Là, je ne sais pas si on est dans la troisième ou quatrième vague. Je ne suis plus trop les vagues, mais je sais que l’intersectionnalité est très importante pour moi.

Quels sont les modèles qui vous inspirent?

Il y a beaucoup de femmes qui m’inspirent, plein de militantes anglophones et francophones, mais la liste serait trop longue. Parmi les groupes, mon réseau de centres de femmes. Malgré tout le travail qui nous reste à faire, malgré qu’on a plein d’autres réflexions à poursuivre, on rejoint plein de femmes qui sont très isolées, très marginalisées, vulnérables.

Talia Rimpel étudie en travail social à l’Université de Montréal. En vue du 8 mars, elle a réuni des danseuses pour un court-métrage. « C’était une façon pour moi d’expliquer les valeurs, les atouts, les sensibilités de la femme à travers l’art. » Est-elle militante? Pas encore. « Mais j’ai commencé à m’engager à ma façon, et je ne pense pas que c’est la fin; je pense que j’aime ça! »

Comment êtes-vous devenue féministe?

C’est très récent. J’ai fait un stage à la Maison d’Haïti, on travaillait avec des femmes enceintes, monoparentales ou immigrantes du quartier Saint-Michel. L’engagement de ma directrice de stage auprès des femmes m’a vraiment inspirée.

Aussi à l’université, j’ai eu un cours sur les oppressions, et on a survolé les théories féministes. J’ai trouvé ça intéressant, surtout les approches intersectionnelles.

Être féministe, ça veut dire quoi?

Ça veut dire d’abord s’accepter en tant que femme, être consciente de la réalité qui nous entoure. C’est facile à dire, mais moi, c’est [depuis] récemment que je commence à m’accepter en tant que femme et à être consciente que les attitudes envers moi peuvent varier à cause de cela. Mon processus d’acceptation est en train de se faire.

C’est aussi ne pas se résigner, autant dans la sphère privée que dans la sphère sociale, et lutter, ne pas se laisser oppresser et discriminer.

Dernièrement, j’ai entrepris un projet artistique pour la Journée de la femme, le 8 mars. Moi, mon moyen d’expression, c’est la danse. Donc j’ai fait un semi-court-métrage avec 10 femmes de différents styles […] qui représentent la diversité de la femme.

Non seulement c’est important pour mon processus de me connaître en tant que femme, mais aussi pour donner une plateforme à d’autres femmes […]. Surtout en danse, c’est difficile de s’exprimer en tant que femme, parce que c’est un milieu très masculin.

Que voudriez-vous mieux faire que les femmes avant vous?

Je ne sais pas si je peux mieux faire, parce qu’elles ont déjà tracé un chemin incroyable pour nous. Si je peux leur arriver à la cheville, ce serait déjà un début.

Ce que j’aimerais faire, c’est de continuer à tracer ce chemin pour les femmes qui vont nous suivre. Peut-être essayer de créer un meilleur avenir aussi pour d’autres femmes, ailleurs, qui ne l’ont pas aussi facile que nous maintenant.

Vous identifiez-vous à un courant en particulier?

Je ne sais pas encore. Comme je suis une femme noire, je pense que c’est le féminisme noir qui va m’intéresser le plus. C’est quelque chose à quoi je m’identifie en ce moment.

Quels sont les modèles qui vous inspirent?

Il y a des artistes qui m’inspirent vraiment beaucoup. Notamment Erykah Badu. J’ai écouté une interview d’elle et je me suis dit : « Wow! OK, je vais faire mon projet! »

En plus de diriger le Conseil des Montréalaises, Cathy Wong est agente de développement du secteur jeunesse pour les YMCA du Québec. Est-elle militante? « Définitivement. Pour moi, le militantisme se fait tant dans les groupes de femmes que dans les institutions démocratiques […] dans lesquelles les décisions se prennent. »

Comment êtes-vous devenue féministe?

Je pense que j’ai toujours été féministe! En fait, le mot « féminisme » est venu identifier beaucoup de sentiments et beaucoup d’émotions que je ressentais.

Ce moment-là est venu lorsque j’ai fait un cours en philosophie féministe. Ma prof a demandé à toute la classe d’essayer de passer une semaine complète sans rien faire qui était relié à notre genre. Donc de ne pas porter de jupe, de ne pas se maquiller, de ne pas se croiser les jambes, etc.

J’ai réalisé que pendant une semaine j’étais incapable de faire tout ce qui était relié à mon genre. Et puis je lisais Simone de Beauvoir à ce moment-là : « On ne naît pas femme, on le devient. » Ça m’a beaucoup bouleversée à ce moment-là.

Et juste avant, je revenais d’un voyage en Chine avec ma mère sur le continent de mes ancêtres, où j’avais été confrontée à beaucoup de situations inégalitaires entre les femmes et les hommes. Et je me suis beaucoup reconnue en ces femmes-là, en me disant j’aurais pu moi aussi grandir dans ces conditions-là. En revenant, mon militantisme s’est beaucoup concrétisé.

Être féministe, ça veut dire quoi?

Tellement de choses! C’est d’abord reconnaître les féministes qui nous ont précédées. Je pense souvent aux suffragettes, qui […] sont sorties dans les rues, dans le froid, elles ont fait de la prison pour qu’aujourd’hui leurs petites-filles puissent mettre un bulletin de vote dans une boîte.

Et deuxièmement, de reconnaître qu’il y a encore beaucoup de travail à faire, qu’il y a encore des enjeux qui ne sont pas réglés. Il faut ramener ces questions-là dans notre quotidien, autant dans la sphère privée que la sphère publique, réfléchir à ces enjeux.

Que voudriez-vous mieux faire que les femmes avant vous?

Je divise ça peut-être en deux sphères. Dans la sphère personnelle, il y a toute une réflexion à avoir sur le travail domestique, parce qu’encore aujourd’hui en 2016, les femmes sont encore responsables de 70 % du travail domestique.

Dans la sphère publique, on a encore beaucoup de travail à faire, parce que l’égalité est encore un défi. J’ai l’impression que tout retombe sur la responsabilité individuelle des femmes. « Si femme le veut, femme le peut. » Malheureusement, il y a encore beaucoup d’inégalités systémiques qui font en sorte que les femmes, même si elles le veulent, n’arriveront pas à développer leur plein potentiel dans certains domaines.

Vous identifiez-vous à un courant en particulier?

Je m’identifie au mouvement postcolonial. C’est de reconnaître que les dynamiques dans lesquelles nous sommes aujourd’hui viennent d’un passé qui est colonial et qui a créé ces dynamiques de pouvoir non seulement entre les femmes et les hommes, mais également entre les classes, entre les races.

Quels sont les modèles qui vous inspirent?

Il est important de reconnaître des groupes de féministes grâce à qui on a pu arriver où on en est aujourd’hui, notamment les suffragettes et les féministes pro-choix au Québec.

Beaucoup d’artistes féministes m’inspirent, notamment Anaïs Barbeau-Lavalette et Ying Chen, une auteure québécoise qui vit à Vancouver, d’origine shanghaïenne. Et Ethel Stark, une chef d’orchestre, qui a fondé la Symphonie des femmes de Montréal en 1940.

Sabrina Di Matteo est à la tête d’un service pastoral affilié à l’Université de Montréal, le Centre étudiant Benoît-Lacroix. Elle est aussi mère d’un garçon de 15 ans. Est-elle militante? « Des fois, je ne me sens pas assez militante, parce que je me sens un peu confinée dans le monde du religieux, et c’est un monde très spirituel. Alors que si on compare à il y a 50-60 ans, c’était le religieux qui offrait tous les services. Les religieuses étaient des féministes; on l’oublie! »

Comment êtes-vous devenue féministe?

Je pense que je l’ai toujours été. M’approprier le terme « féministe », c’est venu plus tard.

Si je pense à ma famille, à ma grand-mère, à ma mère, je pense qu’elles sont des féministes, même si elles ne s’accolent pas l’étiquette comme telle.

Je relis l’histoire de mes grands-parents qui sont partis d’Italie après la Deuxième Guerre pour un meilleur avenir à leurs enfants et petits-enfants. Et la force que ma grand-mère a dû mettre comme femme, comme immigrante qui ne connaissait pas la langue, qui a travaillé dans une manufacture textile et qui a appris tranquillement à apprivoiser cette nouvelle société à une époque où les vagues d’immigration n’étaient pas nécessairement bienvenues.

Ma mère la même chose, elle n’a pas eu la chance de faire des études universitaires, mais elle a travaillé comme secrétaire juridique. Elle aurait pu aller très loin, mais elle a été un peu prise dans le sacrifice d’être de la première génération d’une famille immigrante. Mon père aussi, il ne se qualifie pas de féministe, mais il ne m’a jamais dit : tu ne peux pas faire ça parce que tu es une fille.

Et là où j’ai appris à le nommer, c’est au contact avec mes études en théologie, à l’université, dans un baccalauréat en théologie où j’ai découvert la théologie féministe […] Ça m’a fait réaliser qu’on peut tout à fait avoir une lecture en tant que femme, en tant que féministe, de nos textes sacrés, de notre héritage.

Être féministe, ça veut dire quoi?

Je résumerais par lutter pour un monde meilleur pour tout le monde. Tant les hommes que les femmes. C’est sûr qu’à la base du féminisme, il y a ce qu’on appellerait une option référentielle pour les personnes les plus vulnérables qui sont dans beaucoup de cas les femmes.

Mon féminisme s’exprime dans mon travail en Église. Comme directrice d’un organisme à but non lucratif en pastorale qui offre un ensemble de services qui ressemble beaucoup à ce que fait une paroisse, je me trouve à avoir un rôle très équivalent à un curé de paroisse. Ce n’est pas moi qui célèbre la messe, mais ce sont des responsabilités où je peux prendre la parole, où je peux montrer qu’il y a un leadership au féminin en Église.

Ensuite, il y a le féminisme très quotidien, à la maison, je dirais dans la manière dont on élève nos enfants, nos garçons en particulier, la manière de se comporter dans un couple, ce qu’on accepte, ce qu’on n’accepte pas, jusqu’au vocabulaire, aux mots qu’on utilise dans une relation de couple.

Que voudriez-vous mieux faire que les femmes avant vous?

Je trouve qu’elles ont fait beaucoup. J’espère au moins poursuivre ces acquis-là, faire en sorte qu’ils ne soient pas perdus, et être vigilante. C’est la meilleure chose, simplement être vigilante, et dans le fond, avoir un regard féministe sur les choses […] De se dire comment ça affecte les femmes, comment ça m’affecte moi? Comment ça affecte une femme qui est plus pauvre que moi?

Vous identifiez-vous à un courant en particulier?

Je vais dire non, parce qu’il y a trop de courants, et je n’aime pas qu’il y ait des oppositions entre les courants. Dans le fond, je n’ai pas fini d’explorer le féminisme.

Quels sont les modèles qui vous inspirent?

Je dirais qu’il y a des figures de l’action catholique québécoise du 20e siècle qui sont très inspirantes. Je pense au couple Monet-Chartrand. On l’occulte un peu, mais c’était un couple de croyants, très engagés, qui ont beaucoup contribué à l’action catholique en même temps qu’au mouvement social. Ça allait main dans la main, ces mouvements-là, la foi et la volonté d’une société plus juste.

Arielle Beaudin a monté une plateforme web dédiée à l’entrepreneuriat au féminin, LORI.biz. Elle est aussi membre du comité Place de la femme à la Jeune Chambre de commerce de Montréal. Est-elle militante? « Oui et non. Dans mon travail, c’est ça que je prône, mais je ne m’affiche pas haut et fort comme féministe. »

Comment êtes-vous devenue féministe?

Pour moi, le féminisme, c’est quelque chose de simple, ça ne devrait même pas être une question qui se pose. C’est l’égalité entre les hommes et les femmes. C’est juste dernièrement que j’ai commencé à me considérer comme féministe. Quand j’étais plus jeune, je n’avais pas vraiment conscience de ce que c’était, et tous les clichés et tous les stéréotypes rattachés à ça. C’était un petit peu péjoratif comme terme. […] Pour moi, c’est naturel d’être féministe.

Être féministe, ça veut dire quoi?

C’est l’égalité entre hommes et femmes dans les différentes sphères de la vie, culturelle, politique ou sociale. Je défends les valeurs féministes à travers le comité à la Jeune Chambre de commerce, je le fais avec LORI aussi. Notre but, c’est de démocratiser l’entrepreneuriat et de montrer aux femmes que c’est accessible d’être entrepreneure.

Que voudriez-vous mieux faire que les femmes avant vous?

C’est vraiment d’inclure les hommes à la discussion, parce que c’est le seul et unique moyen d’avancer. […]Parce que s’isoler, ce n’est pas la solution. Reproduire un women’s club, ce n’est pas la solution; c’est de travailler ensemble.

Et dans le monde des affaires, c’est très frustrant parce que les femmes, en tant que leaders, elles vont toujours avoir à plus se prouver.

Vous identifiez-vous à un courant en particulier?

Je ne connais pas toute l’histoire des courants féministes. C’est quelque chose que je ressens, qui est évident pour moi.

Quels sont les modèles qui vous inspirent?

J’ai appris à rencontrer des femmes qui m’inspirent beaucoup, qui ont eu des passions, qui ont développé des projets spectaculaires. C’est vraiment dans ces rencontres que je fais tous les jours.

Erandy Vergara est commissaire indépendante, et elle travaille au Studio XX, un centre d’artistes féministe qui s’intéresse à la technologie. Et elle est en train d’écrire une thèse sur les offres d’art. Est-elle militante? « Oui. Je suis active […] dans mon travail. Quand il y a des manifestations et que je me sens interpellée, j’y vais aussi. Mais c’est aussi la pratique quotidienne qui est importante. Avec les gens autour de moi. »

Comment êtes-vous devenue féministe?

Je pense que c’est sans le savoir! C’était l’éducation chez moi, à la maison. J’ai grandi dans un environnement où il y avait la confiance, où je n’étais pas remise en question. Mon opinion, ce n’était pas une opinion de femme, c’était juste mon opinion à moi, Erandy.

Être féministe, ça veut dire quoi?

Il y a deux côtés pour moi. Un côté, c’est faire partie d’une tradition. Des idées, des interventions, des actions, des luttes pour avoir l’égalité d’opportunités pour les femmes et pour les hommes, pour tout le monde. Une lutte tout le temps liée aux autres luttes. Lutte des classes, lutte des races, lutte contre la discrimination.

L’autre côté, peut-être plus personnel : être féministe, c’est aussi être située, assumer la responsabilité de vivre dans ce corps, mon corps. […] Et les choses que les gens autour de moi assument de mon corps, de ma face, de mon corps de femme.

Que voudriez-vous mieux faire que les femmes avant vous?

Vraiment la même chose, continuer la lutte, continuer à faire des changements dans ma réalité plus proche, avec une idée d’être capable de changer la réalité, qu’il y ait un impact plus grand, que c’est plus important que moi, que mon entourage.

Aussi, ce qui est important pour moi, c’est de ne pas oublier toutes les façons qui entrent dans la différence : la race, l’ethnicité, la religion, les différenciations sexuelles.

Vous identifiez-vous à un courant en particulier?

Les théories postcoloniales et décoloniales. Postcolonial, c’est une idée que le colonialisme, c’est comme le state of the art après le colonialisme, qu’est-ce qui s’est passé. Pis le décolonialisme, c’est changer les idées construites autour du colonialisme.

Quels sont les modèles qui vous inspirent?

Ma mère et ma grand-mère, qui est décédée, mais aussi les femmes que je lis, féministes ou non, que j’admire beaucoup. Octavia Butler, écrivaine des États-Unis, qui écrit des histoires qui commencent avec une idée du monde qui n’est pas basée sur le binaire mâle-femelle. Donna Haraway, c’est une grosse influence pour moi, et les artistes comme Coco Fusco, par exemple.

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