Dès l’âge de 12 ans, Camille Boitel a pris l’habitude de s’installer dans les rues de Montauban, en France, afin d’épater la galerie avec des numéros de jonglerie, d’acrobaties, d’équilibre sur une bouteille de vin ou des chorégraphies durant lesquelles sa petite sœur Raphaëlle lui « cassait » la figure. Positivement marqué par ses expériences en plein chaos urbain, il a créé, des années plus tard, une ode à la perte de contrôle, au déséquilibre et à la surprise. Il s’amène à la TOHU avec L’Immédiat, après avoir présenté son spectacle en Europe, en Asie et en Amérique du Sud.
À force de tester ses nouveaux trucs avec les spectateurs de la rue, le multi talentueux a vu son rapport à la performance se transformer. « J’ai appris à sentir exactement comment se porte l’attention des gens, comme si j’avais un radar. Et dans la rue, on n’offre jamais un spectacle dans sa version pure. Il y a toujours des situations particulières, des gens étranges qui surviennent ou la police qui tente de nous arrêter. »
Ayant gardé une affection particulière pour le désordre, Boitel a imaginé une scène parsemée d’objets à travers lesquels sept interprètes devront se dépêtrer en usant d’ingéniosité. Véritable course à obstacles vers l’inconnu, engrenage aussi délirant qu’absurde, univers où les catastrophes s’enchaînent à une vitesse folle, L’Immédiat est un hommage à l’incontrôlable.
« On propose au public des morceaux d’histoires dans un contexte de perte de contrôle permanent. L’un des personnages a un problème de lévitation. Un autre a terriblement soif, mais comme il ne désire faire aucun effort, il donnera du côté de la fainéantise virtuose. Il y en a qui sont à moitié amnésiques, certains qui voient tout s’effondrer autour d’eux, d’autres qui s’enfuient sans cesse, car ils ont l’impression qu’ils vont se faire tuer à tout moment. »
«L'Immédiat» à la TOHU
Courant, sautant, trébuchant, se relevant, s’assommant, se disloquant et s’écroulant à tout moment, les artistes tentent de survivre dans cet énorme bazar, espérant provoquer des salves de rires en continu.
« Le spectacle est humoristique dans son essence. C’est trop idiot d’avoir des idées pareilles pour que ça ne fasse pas pouffer de rire. Le comique me suit comme un inséparable dans mon langage artistique. Mais dans ce cas, la drôlerie est entièrement physique et rythmique. Il n’y a pas de paroles. »
Cet enchaînement chaotique exige toutefois une précision de tous les instants, question d’éviter de malheureux accidents. « À nos débuts, on a essayé de construire un spectacle véritablement chaotique et imprévisible, mais c’était trop dangereux. Et ça ne donnait pas un rythme intéressant. On a donc décidé de fixer le spectacle et de tout écrire pour recréer la sensation du chaos. C’est moins risqué qu’avant. On ne se fait plus mal ou très peu. Mais on doit quand même faire attention. »
Qualifié de « poète de l’absurde », Camille Boitel voit dans son joyeux bordel un pied de nez au cirque traditionnel, féru de maîtrise, de force et de dépassement. « C’est une infraction à l’habitude. Nous faisons l’éloge des fragiles et de ceux qui ne sont pas capables de normalité. Selon moi, par leur incapacité, ils deviennent des virtuoses. »
Bien qu’on retrouve à la fois des éléments du cirque, du théâtre, de la danse et de la performance dans la production, Camille Boitel ne considère pas avoir marié les disciplines. « Nous n’avons pas la volonté de raconter une histoire comme au théâtre ou de décrocher la mâchoire des spectateurs avec des numéros de circassiens. On voulait plutôt ancrer notre création artistique dans la vie réelle. C’est pour ça que c’est théâtral. On essaie tout simplement d’être en relation avec la vie. »
L’Immédiat sera présenté à la TOHU du 16 au 21 février 2016. Cliquez ici pour plus de détails.
