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Comment Google crée ses «doodles»

Comment Google crée ses «doodles»
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Ces dessins sont vus par des milliards d’internautes chaque jour, mais on sait très peu de choses sur leurs auteurs et sur leur fabrication. Comment Google crée-t-il ses doodles, les dessins qui apparaissent sur sa page d’accueil pour célébrer un anniversaire ou une journée particulière à travers le monde?

Le HuffPost a posé la question à Sophie Diao, la dessinatrice qui a réalisé le doodle de ce mardi 12 janvier pour célébrer l'anniversaire de la naissance du conteur Charles Perrault.

Qui est derrière les doodles

À 23 ans, Sophie Diao travaille à Mountain View, le siège de Google. Elle fait partie d’une équipe de 30 personnes: les dessinateurs et les ingénieurs qui réalisent les fameux doodles. Sophie est ce qu’on appelle là-bas, un doodler.

Diplômée de l’école California Institute of the Arts dite CalArts, Sophie Diao a eu l’idée de postuler à un stage chez le géant du web après avoir vu un dessin sur Charles Dickens à la Une du moteur de recherche. Durant l’été 2012, elle fait partie une première fois de l’équipe et travaille sur plusieurs illustrations pour les jeux Olympiques de 2012 et “un tas de doodles pour des journées nationales”.

L'équipe des doodlers et Sophie Diao

Après quelques expériences chez Dreamworks, Disney et Cartoon Network, la jeune femme retourne à Mountain View pour le poste de doodler qu’elle occupe depuis plus de deux ans et demi aujourd’hui.

C’est à elle que l’on doit le doodle jeu d’Halloween 2015 qui proposait aux internautes d’incarner une sorcière et de participer à une Coupe du monde des friandises. Sophie Diao est aussi à l’origine du doodle qui célébrait l’inventeur des nouilles instantanées ou de celui sur Diana Wynne Jones, l’écrivaine de romans fantastiques pour enfants à qui l'on doit Le château ambulant adapté par Hayao Miyazaki. Difficile de faire plus insolite et varié que les sujets des doodles jour après jour.

Pourquoi Google n’attend jamais les grandes dates anniversaire

Le dernier grand projet de Sophie Diao est le doodle du jour sur Charles Perrault. Pour qu'il se retrouve entre les mains de cette jeune dessinatrice, il a d'abord fallu que l’anniversaire du conteur figure dans la liste d’idées et de sujets établie par ses chefs d’équipe.

Pour constituer cette liste, Google épluche les journées nationales et internationales. Les responsables font la chasse aux dates de naissance et d’anniversaire, sans se soucier de tomber sur un nombre rond. Ce mardi, Google célèbre par exemple le 388e anniversaire de Perrault, sans avoir pris la peine d’attendre les 400 ans ou une date plus significative.

“On ne veut pas attendre car tout peut se passer en l’espace de deux ans, nous a confié la dessinatrice. Le plus souvent, nous avons une idée et nous voulons la mettre en application immédiatement. Parfois on se rend aussi compte que si on attend quelques années pour tomber sur un nombre rond, le doodle sera en ligne un dimanche et peu de gens auront l’occasion de voir le doodle. Voilà pourquoi nous nous moquons de savoir si le nombre est rond.”

Comment Google s’adapte à la culture de chaque pays

Quand le nom de Charles Perrault s'est retrouvé dans la liste des sujets à se répartir, Sophie Diao explique s’être jetée dessus. “J’ai toujours été une grande fan des contes de fées et je voulais à tout prix travailler sur ce projet, s’est-elle souvenue. J’ai commencé par faire des recherches sur sa vie et son œuvre, à relire ses contes. Puis j’ai travaillé avec la responsable locale des doodles en France pour obtenir plus de documentation et d’informations. Elle m’a aussi aidée à traduire des contenus.”

En France comme dans d’autres pays, Google a ce que l’équipe appelle un “local doodle manager”, un référent local qui aide et oriente les dessinateurs dans leur travail.

“Il nous permet de respecter et de mieux comprendre les sensibilités culturelles de son pays, explique Sophie Diao. Grâce à lui nous apprenons que telle ou telle chose va être plus drôle pour un pays donné par exemple", détaille la dessinatrice qui adapte parfois son travail aux spécificités culturelles d’une zone géographique.

“Pour nos doodles sur la fête des mères ou des pères par exemple, décrit-elle. Le sujet est universel mais on peut changer légèrement le dessin pour qu’il corresponde mieux encore aux utilisateurs dans une partie du monde.” Pratique pour ne pas commettre d’impair.

Pour Charles Perrault, aucun problème de ce côté-là. Les trois illustrations de Sophie Diao sont universelles.

Du croquis à un dessin vu par des milliards de personnes

La dessinatrice a commencé par réaliser trois esquisses, une pour Cendrillon, une pour le Chat Botté et une pour La Belle au bois dormant.

Un dessin non finalisé de Sophie Diao pour son doodle

Chaque dessin a été vu par le manager français et, après plusieurs aller-retour, lorsque les croquis ont été approuvés, Sophie Diao a pu les coloriser et les terminer.

Un projet comme celui-ci peut prendre plusieurs mois au doodler, même si les artistes de Mountain View travaillent généralement sur différents projets à la fois. Et mieux vaut s’appliquer, puisque le travail final est exposé au regard de milliards d’internautes.

Avec une telle audience, les doodlers ont un certain pouvoir. Et tout le monde dans l’équipe se souvient par exemple de leur dessin engagé pour les jeux olympiques d’hiver en Russie, en février 2014.

Ce doodle aux couleurs de l'arc-en-ciel était une réponse claire aux lois russes contre la “propagande gay”. Il renvoyait les internautes vers la Charte olympique et l’article 4 qui stipule que “La pratique du sport est un droit de l'homme”. “Chaque individu doit avoir la possibilité de faire du sport sans discrimination d'aucune sorte et dans l'esprit olympique, qui exige la compréhension mutuelle, l'esprit d'amitié, de solidarité et de fair-play", pouvait-on lire à travers la planète, y compris en Russie.

“Le doodle a été énormément commenté à travers le monde, il a aussi été très apprécié à l’intérieur de l’entreprise. Les homosexuels employés chez Google se sont sentis aimés par la société pour laquelle ils travaillent”, se souvient Sophie Diao. Une dessinatrice dont le travail peut faire la différence, même si personne ne connaît son nom.

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