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Une halte-chaleur pour itinérants blâmée par la Ville de Montréal pour ne pas avoir ouvert ses portes

Une halte-chaleur pour itinérants blâmée pour ne pas avoir ouvert ses portes
Radio-Canada

La Ville de Montréal blâme la mission St. Michael's, l'organisme qui gère la halte-chaleur pour les sans-abri du centre-ville, pour ne pas avoir ouvert ses portes dans la nuit de lundi à mardi, comme elle doit le faire en période de froid intense. Pendant ce temps, l'arrondissement de Mercier-Hochelaga-Maisonneuve inaugurait sa nouvelle halte-chaleur.

Un texte de Marie-Ève Maheu

La température à Montréal au cours de la nuit de lundi à mardi a frôlé les moins 20 degrés Celsius. La température ressentie, c'est-à-dire en tenant compte du facteur éolien, s'est approchée des -30 degrés. Dans la journée, l'intervenant de rue Alexandre Paradis, fondateur de SOS Itinérance, avait multiplié les appels au responsable de la halte dans Ville-Marie, le directeur de la Mission St. Michael's, George Green, pour s'assurer que la halte ouvre bel et bien durant la nuit. En vain.

«J'ai rappelé M. Green [plusieurs fois] et il m'a dit : "non, je n'ouvre pas, il ne fait pas assez froid, point final". Pourquoi il fait assez froid dans Hochelaga, mais pas assez dans le centre-ville? On est dans la même ville. C'est très décevant», dit M. Paradis, qui souhaite une meilleure coordination entre les haltes.

En effet, la même nuit, une halte-chaleur ouvrait ses portes pour la première fois dans le quartier Hochelaga-Maisonneuve. Dans une petite salle au coin de la rue La Fontaine et du boulevard Pie-IX, deux intervenants de l'organisme L'Anonyme ont offert de la soupe, du café et du soutien à une douzaine de personnes.

Parmi elles, il y avait Dave, qui dort dans la rue depuis huit ans. Il s'est arrêté une heure ou deux à la halte avec son frère pour se réchauffer. Ici, il n'y a pas de lit, que des tables et des chaises. «Je trouve ça cool, dit Dave, parce que c'est le temps qu'il y ait de quoi dans le coin. On avait un refuge dans Hochelaga, mais on l'a perdu malheureusement. Au moins, avec les froids qu'il y a, ça nous donne une place dans le coin où aller.»

Comme lui, son frère Charles n'aime pas fréquenter les grands refuges du centre-ville. «Moi, je considère les maisons d'hébergement un peu comme le fermier avec son bétail. Il rentre le bétail à 15h. Il le lave. Il le compte. Et le lendemain, il le retourne dans la prairie à 8h. Aller là, je me sentirais comme une vache dans l'étable. Ça ne m'intéresse pas. »

C'est la Ville de Montréal qui finance le service de haltes-chaleur offert dès que la température ressentie avec le refroidissement éolien tombe à -27 degrés. Pour établir cette règle, elle s'est basée sur les recommandations de la Direction de la santé publique de Montréal (DSPM). À ce niveau de froid, les risques d'engelures augmentent en flèche, selon la DSPM.

Une erreur de température

Par courriel, la Ville reconnaît que la halte dans Ville-Marie aurait aussi dû être ouverte. Elle met la faute sur son responsable, qui aurait mal interprété la température.

«L'organisme n'a pas été en mesure d'offrir le service à cause d'une mauvaise interprétation de la température lors de la prise de décision. Nous avons pris contact avec le responsable pour que tout soit prêt pour la prochaine nuit de froid intense», écrit la Ville.

Différentes des refuges

Les haltes-chaleur ne visent pas à remplacer les maisons d'hébergement. Elles sont plutôt destinées aux sans-abri qui sont réfractaires aux refuges pour toutes sortes de raison, comme le fait d'être en couple et de ne pas vouloir se séparer pendant la nuit ou, encore, le fait d'avoir des animaux de compagnie, qui sont bannis des refuges. D'autres sont tout simplement exclus des centres d'hébergement à cause de problèmes de consommation ou de gestes violents qu'ils ont posés.

«Les haltes nous permettent d'accepter des gens qui sont un peu plus rock and roll, un peu plus désorganisés, un peu plus intoxiqués. Il y a moins de gens et le ratio intervenants-utilisateurs est beaucoup plus petit que dans les refuges, ce qui nous permet de les accueillir et d'éviter qu'ils gèlent. Parce que c'est ça le but finalement», dit Julien Montreuil, directeur adjoint de L'Anonyme, organisme qui gère la halte dans Hochelaga-Maisonneuve. La capacité d'accueil y est d'une vingtaine de personnes.

Pétition pour un accueil à -15

Sur le web, une pétition adressée à la Ville de Montréal circule pour demander que les haltes-chaleur ouvrent dès que la température ressentie descend à -15 degrés, plutôt qu'à -27, et que les heures d'ouverture soient prolongées. Plus de 1500 personnes ont signé cette pétition lancée par Solidarité dans la rue et SOS Itinérance.

Sylvie Bonin, directrice de L'Anonyme, aimerait en faire plus, mais elle souligne que tout est une question de budget. «C'est un service de plus. Ça ne remplace pas les ressources ouvertes depuis plusieurs années, donc, pour moi, c'est déjà bien. Mais si on avait le budget pour ouvrir à -15, on ouvrirait à -15.»

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