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L'économie circulaire, ou comment recycler de A à Z

L'économie circulaire, ou comment recycler de A à Z

Le terme est nouveau. Le concept un peu moins. Ce que nous pratiquons - plus ou moins bien - depuis belle lurette, c'est le recyclage. Mais nous pourrions faire mieux si nous appliquions le concept de façon réfléchie à toute entreprise du début à la fin de vie du produit ou du projet. Produire avec le moins d'impact possible sur l'environnement et ne rien perdre, ou le moins possible.

Un texte de Jean-Michel Leprince

Les 260 000 habitants de la MRC de la Mauricie produisent 200 000 tonnes de déchets par année.

Depuis 2009, ces déchets sont déjà soigneusement triés, et seulement ce qui ne peut être recyclé aboutit au lieu d'enfouissement de Saint-Étienne-des-Grès. Les matières organiques dans la région ne seront pas traitées séparément avant 2019. Elles aboutissent évidemment ici, et c'est leur décomposition qui produit du méthane.

Depuis six ans, la loi oblige les sites d'enfouissement à brûler le méthane, car c'est un gaz extrêmement nocif et polluant : quatre fois plus que le gaz à effet de serre le plus courant, le gaz carbonique (CO2). Mais à Saint-Étienne-des-Grès, le méthane, on ne le brûle pas entièrement. On le transforme en biogaz.

Fin d'un processus? Fin d'un cycle? Au contraire, le site d'enfouissement est le début de quelque chose : la production de tomates de serre, chauffée au biogaz.

Le cycle de la tomate de serre

«Sans ce client, le règlement sur l'enfouissement des matières résiduelles oblige quand même cette captation de ce biogaz, mais il faut qu'il soit détruit. Donc il est détruit via une torchère qui brûle en permanence et le biogaz est tout simplement brûlé. C'est la beauté de la chose, au lieu de le brûler, en pure perte, il peut servir d'énergie pour une production alimentaire. Et ça génère des économies pour l'utilisateur et des revenus pour celui qui a à le traiter», explique le directeur du Centre de gestion des matières résiduelles de la Mauricie, Daniel Pépin.

Le client, c'est la compagnie Sagami, qui bénéficie d'un tarif généreux, préférentiel, mais aussi confidentiel - concurrence oblige - de quelques cents le mètre cube.

Le PDG de l'entreprise, Stéphane Roy, a racheté les serres Savoura en avril 2015. Il n'a pas perdu de temps, car la serre de Saint-Étienne-des-Grès, repartie de zéro, produit des tomates sur 5 hectares. Il prévoit doubler sa superficie sous peu. Le biogaz à bas prix lui permet de concurrencer des tomates mexicaines sur le prix - même au Québec en hiver - et surtout en ce qui a trait à la qualité et à l'écologie.

«Voyez ici, les tomates ne sont pas récoltées parce qu'elles ne sont pas assez mûres encore. C'est sûr et certain que le goût est différent. C'est sûr qu'elles vont être de meilleure qualité. Il y a beaucoup moins de transport, au niveau environnemental, beaucoup moins de gaz à effet de serre, on est pratiquement collés sur les marchés», ajoute M. Roy, dont l'objectif à long terme est de ne produire que des tomates biologiques.

Les tomates se retrouvent dans les marchés, chez les consommateurs, mais plus de 30 % des aliments sont malheureusement gaspillés avant d'atteindre les tablettes des épiciers, et 40 % des aliments achetés finissent à la poubelle ou dans le bac.

Retour donc à la case départ pour les détritus qui seront transformés en biogaz.

Forts en théorie, mais pas en pratique

L'économie circulaire est l'objet de recherches universitaires où Montréal fait figure de leader mondial. La tomate a été l'un des sujets d'étude de Manuele Margni, membre du Centre international de référence sur le cycle de vie des produits, procédés et services (CIRAIG) et professeur agrégé au département de mathématiques et de génie industriel à École polytechnique.

«L'économie circulaire, c'est une nouvelle façon d'interpréter l'activité industrielle ou un comportement de société qui vise à minimiser l'utilisation des ressources par la circulation de ces ressources en fin de vie. Avant d'arriver en fin de vie, on peut réfléchir à des systèmes de réutilisation, de mutualisation de la ressource», explique-t-elle.

Côté étude, le Québec est donc bien représenté dans le monde. Mais en pratique, c'est bien différent.

«Quand je compare le taux de recyclage au Québec vis-à-vis de certains pays nordiques ou européens, je vois qu'on a encore une grosse marge d'amélioration. Au Canada, on est encore dans une situation où on a un territoire très vaste avec peu de population, où on pense encore toujours qu'il est infini, donc on peut toujours aller utiliser, extraire de nouvelles ressources sans se soucier trop de réutiliser celles qu'on a à disposition», conclut Manuele Margni.

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