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Ces anecdotes montrent bien que nous sommes tous «paranos» depuis les attentats du 13 novembre

Vous sursautez pour rien? Vous n'êtes pas seul
Le HuffPost

Une scène de panique dans le Marais après l'explosion d'une ampoule. Des regards méfiants à chaque instant dans le métro. Un pic historique de bouchons en île-de-France plutôt que de prendre les transports en commun. La multiplication des alertes au colis suspect...

Depuis les attentats du 13 novembre, le moins que l'on puisse dire, c'est que les Français - et les Franciliens en particulier - sont loin d'être sereins. Partagés entre peur et résistance au terrorisme, il suffit parfois d'un petit rien pour les rendre "paranos" comme ils le disent eux-mêmes, pour les faire réagir de manière irrationnelle et transformer le moindre bruit suspect en "peur de leur vie".

Voici les récits à la fois drôles et terribles de Français qui ne souhaitent pas céder à la panique mais ne peuvent parfois pas faire autrement. Tout simplement.

Florent, 27 ans, infirmier
"Dimanche, 6 heures du matin. Je sors de mon appartement pour prendre mon service à l'hôpital. Quand soudain: "BAM!" Une énorme détonation juste au dessus de ma tête. J'ai fait un bond de deux mètres et j'ai cru que mon cœur allait lâcher. Il m'a fallu quelques secondes pour comprendre que c'était simplement l'ampoule du hall de l'immeuble qui venait d'exploser..."
Salma, 24 ans, étudiante
"Depuis vendredi à la maison on panique... Samedi soir, on entend du bruit dans les escaliers, mon copain essaie d'écouter par la porte, on éteint les infos, et on reste silencieux, dans la peur, à se regarder pendant 10 bonnes minutes.

Des gamins jouent dans la cour, on sursaute à chaque fois que l'un d'eux parle ne serait-ce qu'un tout petit peu plus fort que la normale, ou qu'un chiot aboie.

Puis dimanche soir on se rend Place de la République pour poser des roses et allumer des bougies en hommage aux victimes. Après avoir passé deux jours enfermés à la maison, on pensait que ça nous ferait du bien de sortir, d'en parler avec des gens, de se consoler....Et là, un mouvement de foule énorme à cause de petits malins qui ont jeté des pétards, je n'arrivais plus à respirer, on a couru, on s'est caché dans un immeuble avec d'autres personnes, au milieu de la panique j'ai vraiment cru qu'on allait y passer.

En rentrant à la maison à chaque fois qu'une voiture passe à coté de nous on se tourne brusquement, et si les vitres sont teintées, on se baisse spontanément... J'ai hâte que ces sentiments d'effroi disparaissent."
Mourya, 22 ans, étudiante
"Ce matin, je suis sortie de chez moi pour aller prendre le bus à l'arrêt Mairie de Montrouge. J'étais habillée tout en noir, et il commençait à pleuvoir. J'ai mis ma capuche. Il y avait du monde sous l'arrêt de bus. Je demande à une vieille dame si le 68 est déjà passé. Elle m'a répondu qu'elle ne savait pas et m'a demandé de retirer ma capuche: "C'est mieux par les temps qui courent"."
Paul, 24 ans, journaliste
"J'habite à une centaine de mètres du Bataclan, là où les rues sont barricadées pour permettre aux familles et aux passants de venir se recueillir près de la salle. Depuis la fin de l'assaut, vendredi 13, il n'y a pratiquement plus un bruit dans la rue, simplement des gens qui portent le deuil, qui marchent en silence. Alors à chaque fois qu'un son résonne, qu'un camion poubelle ou un scooter passe, qu'une bouteille casse, les gens se précipitent aux fenêtres pour voir ce qu'il se passe."
Wesley, 17 ans, étudiant
"Lundi midi, dans le centre commercial Evry 2, l'atmosphère était très pesante après la minute de silence. Je mange au KFC, je prends mon menu et je m'assois. À la table en face, il y a un enfant de 3 ans avec ses parents. Il est assis avec un ballon de baudruche et d'un coup, le ballon éclate.

J'ai eu l'impression que le temps est resté figé. Pendant 10 secondes les gens sont restés immobiles. Tout le monde s'est regardé, apeuré. Puis la vie a repris son cours."
Assia, 19 ans, étudiante
"Mardi midi, j'étais à table en train de manger avec mes écouteurs dans les oreilles. À travers la musique, j'ai entendu des "boum", j'ai cru qu'on était en train de se faire bombarder. Vraiment. Dès que j'ai enlevé mes écouteurs, j'ai compris qu'en fait c'était mes voisins qui étaient en plein travaux et qui tapaient au marteau. Je vis à Lyon mais les attentats du 13 novembre m'ont rendue complètement parano et je m'en suis rendue compte ce midi-là."
Alicia, 31 ans, communicante
"J'ai pris le métro ce matin. Je n'en menais pas large face à un mec qui a glissé sa main dans son grand manteau noir et en a sorti un téléphone. Sans rire, on aurait dit qu'il allait sortir une arme. j'ai eu un coup au cœur."
Julie, 28 ans, community manager
"Il y a eu un mouvement de panique vers la station de métro Jaurès dans le XIXe arrondissement dimanche 15 novembre en début de soirée. Je ne sais pas trop d'où c'est venu (peut-être un effet boule de neige depuis République), mais ça a réussi à atteindre la salle de cinéma au MK2 Quai de Loire où on était en train de regarder le dernier James Bond.

D'un coup, des gens ont commencé à se lever et à courir vers les sorties. On a suivi le mouvement pour se retrouver dans la rue où des gens paniqués criaient "Courez, mettez vous à l'abri!", "Y a une femme qui a été touchée mais elle est encore vivante!".Un immeuble nous a ouvert ses portes et nous avons été plusieurs dizaines à nous réfugier dans la cour intérieure. Une fois à l'abri, j'ai complètement craqué, je me suis même effondrée on peut dire. C'était la panique. Heureusement, ce n'était qu'une fausse alerte. Mais une pas drôle du tout. J'en suis encore toute retournée.

Je voulais vivre une journée normale, essayer de profiter de la vie... Et puis non. La peur de ma vie. Putain."
Coralie, 30 ans, monitrice éducatrice
"Dimanche soir j'ai fait cuire des châtaignes au four. Quand l'une d'elles a explosé. J'ai d'abord eu le réflexe de regarder dehors ce qu'il se passait avant de regarder dans mon four... J'habite un village de 600 habitants, je vais bien!"
Arthur, 29 ans, consultant en communication
"Lundi soir j'étais avec mon colocataire dans un bar appelé Les Idiots. En partant, le barman, qui nous connait bien, nous lance: "Et surtout, lâchez rien!" J'ai entendu: "Et surtout, la Charia!""
Peggy, 43 ans, enseignante en anglais
"Je suis une ex-Parisienne partie vivre au vert avec mon mari et mes enfants. Un gars a claqué sa portière de voiture juste à côté de mon véhicule garé. J'étais en train de boire mon café dans un thermos et j'ai eu tellement peur que j'ai craché mon café sur mon corsage, ma veste en cuir, mon volant... Une vraie dingue."
Julien, 19 ans, étudiant
"L'agrafeuse de mon école s'actionne automatiquement lorsqu'il y a quelque chose dessous et fait le bruit d'un coup de feu! Elle fait sursauter tout le monde, même quand on l'utilise, donc je vous laisse imaginer lundi à quel point j'ai sursauté. J'en suis tombé de ma chaise."
Théo, 20 ans, gestionnaire SCPI
"Ce matin dans le train, je lance le jeu "Injustice: Gods among us" sur mon smartphone avec le son malencontreusement à fond. Pas de chance, quand l'appli se lance la cinématique est un énorme mur qui explose dans un grand fracas. Je peux vous dire que tout le monde m'a regardé bizarrement pendant un long moment."
Anoushka, 20 ans, étudiante
"Je suis Parisienne et pour me rassurer je voyage désormais avec une amie dans les transports en commun. Nous prenons la ligne 9 tous les matins aux alentours de 8 heures.

Lundi, une contrôleuse RATP a fait peur à tous les passagers: son talkie-walkie a émis un "BIP BIP" assez fort, suivi d'une voix d'homme donnant des indications réservées aux différents agents. Tous les passagers se sont tournés assez violemment dans sa direction et la plupart des visages affichaient une mine terrorisée. Un homme a d'ailleurs enlevé ses écouteurs et s'est agrippé à la poignée d'ouverture du wagon... La panique!"
Morgane, 22 ans, étudiante en traduction
"Je prenais simplement le tram, ce mardi en début d'après-midi, pour me rendre à la fac, à Turin (Italie).

J'ai entendu un bruit de coup de feu, j'ai tout d'abord pensé que ça venait d'un jeu sur un portable ou quelque chose comme ça. À aucun moment je n'ai cru que c'était de vrais coups de feux. Je me suis dit que ce n'était pas très judicieux vu les récents événements. Ensuite, je me suis retournée et j'ai constaté que les effets sonores provenaient d'un pistolet en plastique que tenait un enfant d'environ 7 ans.

Et sans trop comprendre pourquoi, j'ai eu une grosse bouffée d'angoisse et je suis vite sortie à mon arrêt en tremblant. Après, je suis d'un naturel anxieux donc ce n'est pas non plus exceptionnel.

Mais je pense qu'on est tous sur les nerfs depuis ce vendredi 13, surtout ceux qui vivent dans de grandes villes. C'est un comportement normal. Le fait de lire les news et tout ce qui se passe H-24 n'aide pas vraiment à décrocher et à faire une pause non plus."Après, je ne pense pas qu'on puisse parler de psychose ou autre. C'est juste de la nervosité, c'est naturel et ça devrait s'estomper dans les prochaines semaines je suppose.
Lucile, 22 ans, rédactrice
"Lundi soir j'entendais des grondements sourds pendant la nuit. J'étais figée dans mon lit. J'entendais également un bruit plus proche que je ne reconnaissais pas. Je me suis levée à poil, pas du tout confiante, avec comme arme ma lampe de chevet. Résultat? Le premier bruit c'était le vent. Le deuxième mon chat qui s'était enfermé dans les toilettes et qui foutait des coups dans la porte pour sortir."
Marine, 23 ans, journaliste
"Dimanche soir, pour terminer un week-end mouvementé je suis allée à la messe. C'était la première fois depuis que j'avais quitté le bar où je me trouvais vendredi soir que j'étais entouré de tant de personnes. Généralement, croyant ou non, on se sent plutôt apaisé dans une église. Là, jusqu'à la communion, j'étais en alerte.

Tout m'est passé par la tête: trois mecs qui rentrent dans l'église avec leurs kalachnikovs et tirent sur tout le monde. Tiens, cet échafaudage à l'intérieur recouvert d'une grande bâche blanche, on pourrait se planquer dedans! Selon ma logique, très élaborée, le monsieur qui s'était assis au milieu du rang avait plus de chance de s'en sortir que moi qui étais assise au bord de l'allée centrale..."

Les Français en deuil

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