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Le coauteur du code de vie d'Hérouxville, André Drouin, se dit «plus que satisfait» que le niqab soit devenu un enjeu électoral

André Drouin se dit «plus que satisfait» que l'on parle du niqab pendant la campagne
TORONTO, ON - FEBRUARY 12: Zunera Ishaq, woman who launched the legal challenge against Ottawa's niqab ban at citizenship oath-taking ceremony poses for pictures in her home. (Vince Talotta/Toronto Star via Getty Images)
Vince Talotta via Getty Images
TORONTO, ON - FEBRUARY 12: Zunera Ishaq, woman who launched the legal challenge against Ottawa's niqab ban at citizenship oath-taking ceremony poses for pictures in her home. (Vince Talotta/Toronto Star via Getty Images)

André Drouin dit être « plus que satisfait » que le niqab soit devenu un enjeu électoral.

Selon l’ex-conseiller municipal d’Hérouxville, le discours de Stephen Harper en faveur des valeurs canadiennes correspond en tous points avec le code de conduite municipal qui avait enflammé le débat sur les accommodements raisonnables il y a plus de huit ans.

« Je n’ai jamais lâché prise depuis 2007 », affirme Drouin, que nous avons rencontré à son domicile au bord d’un lac.

Celui-ci a en effet développé un vaste réseau mondial de correspondants préoccupés par l’immigration, le multiculturalisme et les pratiques religieuses jugées incompatibles avec les valeurs occidentales.

Il envoie chaque jour des courriels en français et en anglais à environ 100 000 abonnés, qui les rediffusent ensuite à travers leurs propres réseaux.

« Le Canada a perdu ses repères à cause du multiculturalisme », affirme-t-il, ajoutant que plusieurs immigrés avec qui il s’entretient sont du même avis.

Parmi les collaborateurs canadiens d’André Drouin, on retrouve Tarek Fatah, auteur du livre The Jew is not my enemy; Homa Arjomand, qui a contesté avec succès l’implantation de tribunaux coraniques en Ontario; Salim Mansur, politologue à l’Université de Western Ontario; et Raheel Raza, auteur du livre Their Jihad... Not My Jihad.

Drouin est également en contact avec des membres du Front national français et du British National Party, connu pour sa plateforme anti-immigration.

« Ce sont des gens avec qui je communique sur une base quotidienne », affirme-t-il. « Le Front national recueille 28 pour cent d’appuis en France, et son taux de popularité augmente de jour en jour. »

Reconnaissant que le Front national en inquiète plusieurs, Drouin renchérit au sujet du mouvement anti-immigration allemand PEGIDA : « PEGIDA doit être 10 fois plus gros que le Front national en ce moment. »

Les gens qui se joignent à ces formations ont en commun de se sentir ignorés par les partis politiques traditionnels.

« Il sentent que leur opinion n’est pas respectée », précise-t-il.

Les mêmes craintes font maintenant surface aux États-Unis et s’expriment par l’entremise du candidat à l’investiture républicaine Donald Trump, qui a braqué les projecteurs sur l’immigration illégale.

« Aux États-Unis, il ne s’agit même plus de multiculturalisme. C’est le chaos total. Donald Trump ne fait que dire tout haut ce que les gens racontent depuis longtemps. »

Le code de conduite d’Hérouxville avertissait les immigrants souhaitant s’établir dans ce village à 98 pour cent francophone qu’ils devraient s’abstenir de se voiler le visage et de lapider les femmes. Il spécifiait que les piscines publiques sont ouvertes en même temps aux hommes et aux femmes.

Ce document, alors qualifié de « cas isolé » par le premier ministre Jean Charest, avait été jugé extrémiste et xénophobe par de nombreux observateurs de la scène politique.

« Nous ne sommes pas un cas isolé », rétorque Drouin. « Je reçois des courriels d’appui 24 heures sur 24 en provenance de tous les pays du monde. »

Le débat sur les accommodements raisonnables, qui a animé la campagne électorale de 2007, avait permis au chef de l’Action démocratique du Québec Mario Dumont de rafler 41 sièges et de placer Jean Charest en situation minoritaire.

La nécessité de baliser les pratiques religieuses a refait surface lorsque Pauline Marois a présenté sa « Charte des valeurs québécoises » (elle aussi appuyée par André Drouin). Or, la crainte d’un troisième référendum sur la souveraineté a provoqué la défaite du Parti québécois.

Pour sa part, Stephen Harper a débuté la présente campagne électorale en soulignant son bilan économique. Mais une décision de la Cour d’appel fédérale, tombée à la mi-septembre, a complètement bouleversé l’ordre du jour des partis politiques, surtout au Québec. Les trois juges ont décidé à l’unanimité que Zunera Ishad, une résidente de Mississauga, aurait le droit de porter un niqab au moment de prêter son serment de citoyenneté canadienne.

Le gouvernement Harper a alors porté le jugement en appel à la Cour suprême et promis de voter une loi bannissant le niqab des cérémonies de citoyenneté aussitôt l’élection terminée.

« Le débat ne porte pas sur l’économie ou l’emploi », affirme Drouin. « Il porte sur les valeurs canadiennes. Avec tout ce qui se passe à l’international et grâce aux efforts de notre réseau, les gens prennent conscience qu’il s’agit d’un enjeu important. Je suis content qu’on en parle enfin sur la scène fédérale. »

Les partis d’opposition, dont le NPD, le Parti libéral et le Parti vert, n’ont pas manqué de s’insurger et d’affirmer que Stephen Harper manipule le niqab à des fins électoralistes. Il est vrai que cet enjeu a détourné l’attention de son bilan des dix dernières années.

Mais il est également vrai que le NPD, qui a remporté 59 sièges sur 75 au Québec en 2011, voit ses appuis s’effriter rapidement. Les conservateurs ont repris la balle au bond et diffusent maintenant des publicités radiophoniques portant sur le niqab.

S’étonnant qu’une situation applicable à un si petit nombre de femmes ait un si grand impact, plusieurs observateurs soulignent que le premier ministre a tenté d’interdire le niqab par l’entremise d’une directive ministérielle non contraignante que les tribunaux ne pouvaient qu’invalider.

« Une seule femme en niqab, c’est déjà une de trop »

Il n’y aurait pas plus de 50 femmes portant le niqab au Canada, mais Drouin affirme qu’il y en aurait environ 200 uniquement à Montréal.

« En tout cas, une seule c’est déjà une de trop », ajoute-t-il.

Sur un ton plus positif, Drouin précise qu’il n’est pas contre le fait que Mme Ishad se couvre le visage, mais bien « en faveur des 85 pour cent de Canadiens qui souhaitent voir son visage ».

Il souligne les efforts déployés par les ministres conservateurs Jason Kenney et Chris Alexander pour ramener cet enjeu sur la place publique.

« Il est clair que cette affaire n’a pas surgi de nulle part. Elle a été soigneusement planifiée », explique Drouin, ne cachant pas sa satisfaction.

«Lorsque j’entends M. Harper parler de valeurs canadiennes – et il est le seul à le faire – je sais qu’il est loin d’être idiot. Le fait-il uniquement pour gagner des votes? Je m’en fous. L’important est qu’il en parle et que les gens s’en souviennent.»

« En ce qui me concerne, vous pouvez être assuré que je m’en souviendrai. Les milliers de francophones et d’anglophones de mon réseau s’en souviendront aussi. M. Harper, vous avez dit que nous avons des valeurs. »

Cet article initialement publié sur le Huffington Post Canada a été traduit de l’anglais.

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