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Tout ce que les publicitaires ne vous disent pas! (ENTREVUE)

Tout ce que les publicitaires ne vous disent pas!
Courtoisie

Selon le plus récent rapport des Normes canadiennes de publicité, la moitié de la population pense que la pub façonne notre société. Arnaud Granata et Stéphane Mailhiot, respectivement rédacteur en chef du magazine Infopresse et planificateur stratégique à l’agence de publicité LG2, sont en profond désaccord avec cette idée. Convaincus que la publicité a une influence certaine sur la consommation, la politique et la célébrité, mais qu’elle ne dicte nos valeurs en aucun cas, ils ont décidé de révéler les techniques du milieu en publiant le livre Tout ce que les publicitaires ne vous disent pas.

Le duo démystifie des dizaines de thématiques de façon simple et concise: boycottage, marketing comportemental, pancartes électorales, stéréotypes, jingles, propagande, porte-paroles, Obama, Monsieur B, hyperciblage, couleurs, Facebook, Twitter et certaines particularités des pubs de bière, qui se concentrent sur les M-LDA-24 (Male – Legal Drinking Age – jusqu’à 24 ans).

Granata et Mailhiot ont aussi décortiqué le comportement des différentes générations. «Contrairement aux baby-boomers, qui ne réalisent pas encore pleinement le pouvoir qu’ils ont avec leurs achats, les Y et les Z sont très conscients des enjeux de la pub et du marché, souligne le journaliste. C’est de plus en plus difficile pour les entreprises de travestir la réalité, puisque les consommateurs sont prêts à les dénoncer ou les boycotter.»

Ainsi, les marques qui vantent leurs vertus écologiques, sociales ou féministes ont tout intérêt à poser des gestes cohérents avec leur message. « Elles doivent absolument mener des actions concrètes et le faire savoir après. Le meilleur exemple demeure Patagonia, qui s’est bâtie sur des valeurs de transparence et de responsabilité sociale, en plus de publier des bilans environnementaux, avant de le communiquer. À l’opposé, les marques de voiture qui se disent vertes, alors qu’elles ne le sont pas spécialement, font du green washing. »

«En ce qui concerne la cause féministe, on retrouve DOVE qui promeut depuis des années l’estime de soi, la beauté intérieure et la beauté naturelle, ajoute-t-il. Par contre, la marque fait partie du groupe Unilever, qui possède aussi Axe, une marque qui met de l’avant une vision des femmes complètement différente. Dans tous les cas, il faut se rappeler que ça reste un discours commercial: on veut vendre un produit, même si ça part d’un bon sentiment.»

Faire confiance aux pubs?

La publicité fascine, émeut et divertit le grand public, mais ses professionnels n’en sont pas moins diabolisés. Les publicitaires étant le corps de métier en qui les gens ont le moins confiance, tout juste après les politiciens. « Pourtant, les publicitaires le diront eux-mêmes: plus les consommateurs seront informés sur ce qu’ils font, plus leur travail sera intéressant, puisqu’ils vont être capables de se former une opinion par eux-mêmes.»

Ce libre arbitre face aux publicités ne signifie toutefois pas qu’on puisse être immunisé à ses effets. Même si notre sens critique est particulièrement aiguisé. «Je pense que c’est impossible, répond Arnaud Granata. On est tous des humains qui réagissent à une forme de consommation émotive. On achète des marques et on s’identifie à elles. Même si on préfère les moins commerciales, ça demeure un choix et un message qu’on envoie. On est tous des enfants de la pub.»

Nos choix et nos comportements sont analysés par les publicitaires depuis la nuit des temps. Avec l’avènement des réseaux sociaux, les gestes résolument passifs (cliquer « J’aime » ou relayer une information) ont d’ailleurs soulevé des interrogations quant à la capacité des consommateurs de s’impliquer dans une campagne sociétale. Certains dénoncent le « slacktivism », sorte d’activisme paresseux. Granata préfère nuancer.

«Plusieurs questionnent l’utilité des appuis exprimés sur les réseaux sociaux. Pourtant, durant la campagne américaine entourant la loi sur le mariage gai, des milliers d’usagers ont changé leur photo de profil Facebook pour un signe « = » en rouge, en guise d’appui. Concrètement, ça n’a eu aucune incidence sur la décision finale, mais les gens ont tout de même participé à un phénomène de conscientisation globale. Les réseaux sociaux ont aussi permis au Ice Bucket Challenge de récolter des sommes astronomiques pour une maladie qui était quasi inconnue.»

Un Québec pas comme les autres

De nos jours, les publicitaires doivent composer avec une multitude de plateformes (télé, radio, imprimés, web), des générations aux besoins diamétralement opposés et la nécessité de comprendre le territoire dans lequel leurs annonces sont diffusées. Spécialement lorsqu’il est question du Québec.

«Il y a deux points de vue sur la question. Certains affirment que les Québécois forment une société distincte, avec des valeurs différentes et un système de célébrités et de médias à part. Donc, un porte-parole local aurait plus de chance d’interpeller les consommateurs qu’une personnalité internationale. À l’inverse, avec le marché mondialisé, les jeunes Québécois ressemblent de plus en plus aux jeunes du reste du monde. Certaines marques comme Apple ne voient pas l’intérêt de s’adapter à un peuple en particulier. Au final, toutes les publicités n’ont pas à être réalisées en fonction des Québécois.»

Le livre Tout ce que les publicitaires ne vous disent pas est présentement en librairies.

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