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La mémoire douloureuse du génocide arménien : Keghetzik Zourikian, 104 ans, se souvient

Génocide arménien : Keghetzik Zourikian, 104 ans, se souvient
Radio-Canada.ca

Alors que le monde entier commémore le génocide des Arméniens commis il y a cent ans par la Turquie, les survivants se font rares. Au Canada, ils ne sont plus que trois, des femmes de plus de 100 ans, qui toutes habitent la région de Montréal.

Un texte de René Saint-Louis

Keghetzik Zourikian, née il y a 104 ans non loin d'Istanbul, est aujourd'hui pensionnaire d'un CHSLD dans Ahuntsic-Cartierville, un quartier familièrement appelé la petite Arménie de Montréal.

Avec l'âge, son français s'est estompé, elle ne parle plus qu'arménien, comme dans sa jeunesse.

Je l'ai rencontrée en compagnie de son fils, Garabed Zourikian, et de son petit-fils, Gary Zourikian, qui traduisent les douloureux souvenirs ayant marqué leur famille.

Keghetzik Zourikian n'avait que 4 ans quand le génocide a commencé. Son père était soldat.

« Mon père a été assassiné dans l'armée turque. C'était plus facile de les tuer sur place que d'aller les chercher, explique-t-elle. Ils ont appelé ma mère pour lui demander d'aller chercher les effets personnels de son mari à Istanbul. Sur place, on lui a dit de ne pas retourner dans son village parce qu'ils massacraient les Arméniens. C'était plus facile de survivre à Istanbul, qui s'appelait alors encore Constantinople. »

En effet, dans la capitale de ce qui était alors l'Empire ottoman, les autorités n'osent pas procéder au massacre des chrétiens sous les yeux des diplomates et des consuls qui seraient des témoins oculaires trop gênants.

Mais la mère de Keghetzik, qui ne peut subvenir aux besoins de sa fille, la place dans un orphelinat. Elle sera par la suite déportée, avec de nombreux autres orphelins chrétiens, et passera le reste de son enfance dans un orphelinat en Grèce.

À 14 ans vient le temps de voler de ses propres ailes. Elle est alors envoyée dans une famille chrétienne d'Alexandrie, en Égypte, où elle sera, quelques années, bonne à tout faire.

Jusqu'au jour où elle épousera un autre orphelin, lui aussi rescapé du génocide.

« Les orphelins arméniens faisaient de petites fêtes le dimanche. Mon mari était un rescapé du génocide qui était passé par la Syrie et le Liban avant de se retrouver, comme moi, en Égypte. »

— Keghetzik Zourikian

Les années passeront et, par d'autres membres de la diaspora, Keghetzik Zourikian, qui vit alors au Canada avec ses trois enfants, apprendra que sa mère est toujours vivante.

Elle fera le voyage à Istanbul pour la retrouver et en apprendre davantage sur les événements qui ont bouleversé à jamais la vie de sa famille. Et ce n'est que récemment qu'elle s'est décidée à partager ses souvenirs avec ses enfants et ses petits enfants.

Pourquoi ce long silence si tardivement brisé? Elle répond par une question.

« Pourquoi garder la tristesse et les mauvais souvenirs? Pourquoi rendre nos proches tristes? »

— Keghetzik Zourikian

Une histoire que connaissent maintenant ses 3 enfants, ses 9 petits-enfants et ses 19 arrières petits enfants... « I love grande famille. Beaucoup, beaucoup. J'aime », conclut-elle.

Plus d'un million d'Arméniens ont été systématiquement exterminés en Turquie il y a cent ans, un génocide reconnu par une vingtaine de pays, dont le Canada, mais toujours nié par les autorités turques.

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