Le gouvernement canadien s'est engagé financièrement dans la construction du Télescope de trente mètres (TMT), qui comme le projet de Télescope Géant Européen (E-ELT) est engagé dans la course vers la prochaine génération d'observatoires destinés à mieux saisir l'origine de l'univers.
Un texte de Ralph-Bonet Sanon
Avec l'annonce, lundi soir, d'un investissement fédéral jusqu'à concurrence de 243,5 millions de dollars sur 10 ans, le Canada se munit d'un accès de premier choix au futur télescope qui sera bâti à Hawaï. Toutefois, il réaffirme aussi sa position parmi les meneurs dans le domaine de l'astronomie et de l'astrophysique.
Le Canada fournira l'immense coupole du futur télescope, qui sera construite en Colombie-Britannique. Également, le pays fournit l'instrument d'optique adaptative, qui corrige les distorsions d'image dues à l'atmosphère terrestre.
« Nous sommes emballés, c'est quelque chose d'important pour le projet », confirme le représentant de l'Université de la Californie au conseil d'administration du projet TMT, le professeur Michael Bolte.
Compétition amicale
Le TMT et l'E-ELT sont destinés à être opérationnels la même année, en 2024.
Le premier, une collaboration entre le Canada, le Japon, la Chine, l'Inde, ainsi que l'Institut de technologie de Californie (Caltech) et l'Université de Californie fera 30 mètres de diamètre. L'autre, un projet de l'Observatoire européen austral, fera 39 mètres de diamètre. Le TMT sera construit au sommet du volcan Mauna Kea d'Hawaï, l'autre sur la montagne Cerro Armazones, au Chili.
Cette concurrence est une « longue et excellente tradition » en astronomie, selon M. Bolte. « En bout de piste, c'est une compétition amicale qui pousse à bâtir des installations toujours plus puissantes. Le résultat, c'est que nous avons accès à tout plein de merveilleuses ressources dans le monde aujourd'hui », dit celui qui enseigne l'astronomie à Santa Cruz.
Si on se lance ainsi dans la construction de télescopes de plus en plus grands, c'est pour mieux étudier les premières étoiles dans l'univers, le trou noir au centre de la Voie lactée et les atmosphères des planètes se trouvant dans les zones habitables d'autres étoiles. Ces objets sont extrêmement lointains et ont une faible intensité lumineuse. Il faut donc de plus grandes surfaces collectrices pour concentrer la lumière en un temps raisonnable.
Dernier gros morceau
Le Canada était d'un des membres fondateurs du projet TMT, mais d'autres partenaires ont eu le temps d'embarquer dans l'aventure de plus de un milliard de dollars américains et de s'engager financièrement avant lui. La Chine et l'Inde investissent chacune 10 %, le Japon 20 % et l'Université de la Californie ainsi que Caltech, 12 %.
« Cela aurait été une très, très grande déception si le Canada n'avait pas décidé de se joindre à ce grand projet quand les autres ont déjà pris la décision de le faire », n'hésite pas à dire le professeur titulaire René Doyon, du Département de physique de l'Université de Montréal. Il rappelle que les grandes découvertes se font surtout grâce aux grands télescopes.
« Le Canada était en quelque sorte un dernier gros morceau du financement », ajoute M. Bolte. Il reste encore, entre autres, à amener les provinces à signer leurs engagements financiers, indique le directeur du projet canadien TMT, Ray Carlberg.
Les autres partenaires du projet TMT construisent principalement des segments du miroir primaire. L'Université Caltech se charge de son système de contrôle. Le Japon fabrique la structure qui l'abritera, la Chine s'occupe notamment de miroirs secondaires et tertiaires et l'Inde travaille entre autres au logiciel du système de contrôle.