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Benyamin Nétanyahou pourfend un éventuel accord sur le nucléaire iranien devant le Congrès américain (VIDÉO)

Nétanyahou devant le Congrès américain

Dans un discours prononcé devant le Congrès américain alors qu'il est en campagne électorale, le premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou s'est livré à une charge à fond de train contre un accord sur le nucléaire iranien que les membres permanents du Conseil de sécurité de l'ONU et l'Allemagne tentent de conclure avec l'Iran.

« Ça ne bloque pas le route de l'Iran vers la bombe [nucléaire], ça ouvre la voie vers la bombe », a-t-il lancé devant les élus de la Chambre des représentants et du Congrès, qui l'ont souvent applaudi à tout rompre. « C'est plus qu'un mauvais accord, c'est un très mauvais accord. Nous sommes mieux sans cela. »

Selon le premier ministre israélien, l'entente actuellement négociée va « pratiquement garantir » que l'Iran pourra développer l'arme ultime, puisqu'elle fait deux « concessions majeures » à la République islamique:

  • elle laisserait l'infrastructure iranienne en place, plutôt que de la détruire, de sorte que le temps nécessaire à l'Iran pour développer une bombe nucléaire serait « très court ». Ce délai, dit « breakout time », serait de moins d'un an selon les États-Unis, mais encore moindre, selon l'évaluation d'Israël;
  • elle confierait la supervision du respect de l'entente à des inspecteurs internationaux qui peuvent documenter la situation, mais qui ne peuvent arrêter une reprise du développement, comme cela s'est produit, selon lui, en Corée du Nord.

Selon M. Nétanyahou, toute entente devrait exiger trois choses de la République islamique, qu'il a assimilé tout à tour au régime nazi et au groupe armé État islamique:

  • qu'il arrête ses « agressions » contre ses voisins au Moyen-Orient;
  • qu'il cesse de « soutenir le terrorisme » partout dans le monde;
  • qu'il cesse de menacer d'annihiler Israël, « le seul et unique État juif au monde.

Plus de détails à venir.

Un discours controversé

Le discours de M. Nétanyahou suscite une vive controverse, dans la mesure où il a été invité par les républicains, qui contrôlent les deux chambres du Congrès. L'administration Obama, qui a des relations avec M. Nétanyahou, n'a guère apprécié. Aucun membre de l'administration ne compte d'ailleurs le rencontrer.

M. Nétanyahou, qui effectue cette visite en pleine campagne électorale, a affirmé lundi devant l'AIPAC que son discours ne visait pas à être « irrespectueux » envers le président américain. Mais dans une entrevue exclusive accordée peu après à Reuters, Barack Obama n'a pas mâché ses mots à son endroit.

Il a notamment accusé M. Nétanyahou de s'être trompé sur le bien-fondé de l'accord définitif que le groupe 5+1 (États-Unis, Russie, France, Royaume-Uni, Chine et Allemagne) tente de sceller avec Téhéran.

Il a pris l'exemple de l'accord provisoire, signé entre les parties en novembre 2013, qui a gelé une partie des activités nucléaires iraniennes en échange d'une levée partielle des sanctions.

« M. Nétanyahou a fait toutes sortes de déclarations », a critiqué M. Obama. « Cela allait être un très mauvais accord. Cela allait permettre à l'Iran de récupérer 50 milliards de dollars. L'Iran ne respecterait pas l'accord. Rien de cela ne s'est vérifié », a-t-il dénoncé.

Le président américain reconnaît qu'il existe un désaccord avec M. Nétanyahou sur les façons d'empêcher l'Iran de se doter de l'arme nucléaire. Mais selon lui, un accord pourrait être bénéfique, tant pour les États-Unis que pour Israël.

« Si les Iraniens acceptent [les conditions d'un accord], ce sera nettement plus efficace pour contrôler leur programme nucléaire que n'importe quelle opération militaire que nous pourrions entreprendre, n'importe quelle opération militaire qu'Israël pourrait lancer, et beaucoup plus efficace que ne pourront l'être les sanctions », a-t-il déclaré.

« Israël et les États-Unis sont d'accord pour que l'Iran n'ait pas d'armes nucléaires. Mais nous ne sommes pas d'accord sur la meilleure manière de l'empêcher de développer ces armes », avait aussi convenu M. Nétanyahou devant l'AIPAC. Israël estime qu'un accord n'empêcherait en rien Téhéran de se doter à terme de la bombe atomique.

Washington a d'ores et déjà mis en garde le premier ministre contre d'éventuelles fuites sur le contenu de l'accord actuellement négocié, l'entourage de M. Nétanyahou s'étant vanté, en arrivant dimanche à Washington, de détenir d'« excellentes informations » sur ce texte. Le cas échéant, « la confiance serait trahie » entre les deux pays, a prévenu le département d'État.

Une quarantaine de représentants et quelques sénateurs démocrates vont boycotter le discours de M. Nétanyahou. Le vice-président Joe Biden, qui est aussi président du Sénat, n'y sera pas non plus, puisqu'il effectue une tournée en Amérique centrale.

M. Nétanyahou en était à son troisième discours devant le Congrès; il y a déjà pris la parole en 1996 et en 2011. Il est devenu le seul dirigeant étranger, avec Winston Churchill, à s'être exprimé à trois reprises dans le temple de la démocratie américaine.

L'Iran dénonce les propos d'Obama

« Si, véritablement, l'Iran accepte de geler son programme là où il en est pendant au moins 10 ans (...), si nous obtenons cela, ainsi que des moyens de le vérifier, aucune autre mesure que nous pourrions prendre ne nous donnera mieux la garantie qu'ils n'ont pas l'arme nucléaire », a aussi dit le président américain à Reuters.

L'objectif des États-Unis, a-t-il poursuivi, est de faire en sorte qu'« il y ait au moins un an entre le moment où nous constatons qu'ils cherchent à se doter d'une arme nucléaire et celui où ils sont en mesure de l'avoir. »

Ces propos ont été qualifiés d'« inacceptables » mardi par le chef de la diplomatie iranienne, qui participe depuis lundi à des discussions sur les capacités nucléaires de son pays avec le secrétaire d'État américain John Kerry à Montreux.

« Il est clair que les positions de M. Obama visent à gagner l'opinion publique et à contrer la propagande du premier ministre [Nétanyahou] et des autres opposants extrémistes aux négociations, en utilisant des termes et des formulations inacceptables et menaçants », a déclaré Mohammad Javad Zarif, à l'agence officielle iranienne Irna.

Cela n'a pas empêché M. Zarif d'avoir une discussion de deux heures avec John Kerry mardi. Ces pourparlers se poursuivront plus tard dans la journée, et mercredi.

Ces discussions se déroulent en parallèle avec les travaux de négociateurs et d'experts qui continueront leur travail jusqu'à la fin de la semaine. L'Iran et le groupe 5+1 tentent de sceller avant le 31 mars un accord historique, qui garantirait la nature pacifique du programme iranien, soupçonné de cacher un volet militaire, ce que Téhéran dément.

Le président Obama a assuré lundi que les Iraniens négociaient sérieusement, une information confirmée mardi par le ministre allemand des Affaires étrangères. « J'irais même jusqu'à dire qu'en dix ans de négociations, nous n'avons jamais accompli autant de progrès que nous l'avons fait depuis le début de l'année.

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