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Livraison de casseroles aux bureaux de Couillard

Des casseroles livrées à Philippe Couillard
Ex Aequo

Pour dénoncer les coupes dans le soutien à domicile pour la préparation des repas, un organisme montréalais de défense des personnes handicapées livrera dès ce matin des casseroles aux bureaux du premier ministre du Québec. Les membres d'Ex aequo comptent répéter l'opération chaque jour jusqu'au prochain budget dans l'espoir d'être entendus.

Un texte de Marie-Ève Maheu

Rencontrée dans les bureaux de l'organisme, Dominique Riel est de ceux qui viennent de perdre l'aide qu'elle recevait du CLSC pour confectionner des plats. Elle a un bras et une jambe paralysés. « J'avais un service de préparation de repas toutes les deux semaines, raconte-t-elle. On venait me faire à manger. Et là, pour une raison X - manque de budget ou autres -, mon ergothérapeute arrive chez moi il y a deux mois et elle me dit « je te coupe ». Je lui ai répondu : je fais quoi? »

Ce genre de témoignage, le groupe communautaire Ex aequo en reçoit de plus en plus de la part de ses membres. « Là où des préposés faisaient les menus pour la semaine pour les gens qui n'ont pas la capacité de le faire, il y a des coupures », dit Benoît Racette, organisateur communautaire.

Pour certains, le service a été réduit de moitié, et pour d'autres, totalement. « On le sait, notre monde est déjà pas mal appauvri. Eh bien, maintenant, ils doivent payer pour avoir un service qui était gratuit », dit M. Racette.

Les gens sont dirigés vers des entreprises d'économie sociale. Les prix varient selon les ressources et selon les revenus des usagers. Répit-Ressource, par exemple, qui dessert le territoire du CSSS Lucille-Teasdale à Montréal facture entre 8 $ (aux plus démunis) et 17 $ de l'heure pour la préparation des repas. Ex aequo s'inquiète de cette façon de faire qu'elle associe à une privatisation sournoise des services.

De son côté, Dominique Riel s'est fait proposer une popote roulante. « À 6 $ le plat, ça n'avait pas d'allure! » dit-elle, alors qu'avant elle n'avait qu'à payer ses denrées.

Elle prépare donc ses repas elle-même, comme elle peut. En s'achetant « beaucoup de poulets rôtis », souligne-t-elle.

Mais son bras fonctionnel la fait souffrir.

« Je me retrouve à me maganer. J'ai déjà 42 ans et si je magane le seul bras que j'ai, je ne sais pas combien de temps je vais pouvoir rester en appartement et être autonome. » — Dominique Riel

Son histoire, comme celle d'une vingtaine d'autres, sera glissée dans les casseroles qui seront envoyées ces prochaines semaines à Philippe Couillard.

Les cas moins lourds laissés pour compte?

Certains CSSS sont en pleine révision de leurs services. Ex aequo craint que la tendance s'accélère avec la loi 10, qui abolira sous peu les agences de santé régionale et fusionnera les CSSS sous de nouvelles structures.

Au centre Lucille-Teasdale à Montréal, la direction a entrepris de réajuster, depuis juin, son offre en fonction des besoins et de la lourdeur des cas. Elle explique procéder selon la grille d'évaluation du ministère de la Santé et des Services sociaux.

« C'est vrai qu'il y a des gens qui ont vu une diminution de leur offre de services, mais toujours en fonction des besoins qui sont documentés. Mais il y a une proportion importante de la clientèle qui a vu une augmentation de son offre de service », soutient le directeur général adjoint du CSSS, Sylvain Lemieux.

Dans l'absolu, le nombre d'heures de services augmente. Mais sur le terrain, on s'inquiète que les cas moins lourds, notamment les personnes en début de perte d'autonomie, soient laissés pour compte. Non seulement les personnes avec des handicaps, mais aussi les aînés.

Une travailleuse sociale du CSSS Lucille-Teasdale, qui a préféré ne pas être identifiée, constate non seulement la disparition progressive de l'aide à la préparation des repas, mais aussi de certains services d'hygiène, comme les bains à domicile. « On voit que des personnes qui recevaient un bain par semaine, parce qu'elles ne peuvent pas le prendre de façon sécuritaire, perdent ce service. »

« Dans ce cas, on ne juge pas que tu es suffisamment en besoin, mais tu as besoin d'aide. C'est que d'autres en ont plus besoin que toi », déplore-t-elle.

Les budgets pour le soutien à domicile ont un peu augmenté sous le dernier gouvernement péquiste, mais ces services demeurent largement sous-financés, selon l'Institut de recherche en politiques publiques, qui a publié une étude sur le sujet l'an dernier. Surtout que les besoins explosent avec le vieillissement de la population.

La province comptait 1,3 million d'aînés de 65 ans et plus en 2011. Ce nombre va doubler d'ici 25 ans environ, dit l'Institut de la statistique du Québec.

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