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Rendez-vous du cinéma québécois: «Autrui» de Micheline Lanctôt présenté en première (VIDÉO/PHOTOS)

Rendez-vous du cinéma québécois: «Autrui» de Micheline Lanctôt présenté en première

Avec Autrui, son dixième long-métrage, Micheline Lanctôt parle d’itinérance, mais surtout d’altruisme. Elle relate la rencontre entre Lucie (Brigitte Pogonat), une jeune femme timide, et Éloi (Robin Aubert), un clochard mal en point au comportement autodestructeur.

«Autrui» de Micheline Lanctôt aux RVCQ

Lucie recueillera Éloi chez elle dans un acte de générosité gratuit et désintéressé. Deux êtres qui se croisent de façon tout à fait fortuite dans l’hiver du Centre-Sud de Montréal, un geste que Lucie imagine sans suite ; leurs deux mois de cohabitation transformeront pourtant à jamais leurs existences.

Autrui était présenté en première lors d’une «Soirée Tapis Bleu», lundi, au Cinéma Cinéplex Odéon Quartier Latin, dans le cadre des Rendez-vous du cinéma québécois (RVCQ). En matinée, une avant-première s’était tenue à la Maison du Père, devant les aidants et les aidés de l’établissement.

«Le film regarde la relation extrêmement complexe qui se crée entre une personne qui a besoin d’aide et une personne qui veut aider, explique Micheline Lanctôt. Ce n’est pas toujours facile ; c’est complexe, c’est compliqué, c’est dur, c’est difficile. Autrui s’attarde au geste de Lucie et aux conséquences du geste, à la relation qui se construit entre ces deux êtres, qui sont extrêmement seuls, qui sont des exclus, chacun à leur manière.»

Micheline Lanctôt n’a pas cherché longtemps pour trouver les acteurs qui donneraient vie à son duo d’écorchés vifs. Robin Aubert, qui a un parcours similaire au sien en combinant jeu et réalisation, et Brigitte Pogonat, à qui elle a enseigné au Conservatoire d’art dramatique en 2004, «étaient» véritablement, selon elle, Éloi et Lucie.

«Pour moi, c’est un casting qui s’est imposé tout de suite, remarque la cinéaste. Je n’ai pas auditionné du tout, je n’ai pas cherché, je n’ai pas eu besoin.»

Une grande peur

Micheline Lanctôt possède un pied-à-terre dans le Centre-Sud de Montréal, à proximité de la Maison du Père, de l’Accueil Bonneau, de la Mission Bon Accueil et d’autres refuges. Or, ce ne sont pas tant les conditions de vie des moins nantis qu’elle souhaitait observer, comme les réactions de l’être humain devant une telle détresse. Combien grand est-on prêt à ouvrir notre porte à un inconnu, duquel on ne sait absolument rien?

«Je côtoie beaucoup d’itinérants. Il y a quelques années, j’étais en France avec mon mari, et on a vu un reportage à la télévision, où il y avait un sans-abri qui racontait comment, un jour, une jeune femme était allée le voir et lui avait offert d’aller vivre chez elle. Il était resté deux mois.»

«Ça m’avait renversée, poursuit Micheline Lanctôt. Puis, je me suis demandé : qui pourrait faire une chose pareille? Est-ce que moi, je le ferais? Ça m’avait beaucoup interpellée. Plusieurs m’ont dit que c’est impossible mais, depuis que j’ai commencé à écrire ce film-là, je n’arrête pas de rencontrer des gens qui me disent qu’ils l’ont fait, pour une journée, pour une nuit, ponctuellement. Je connais beaucoup de personnes qui ont offert l’asile à des gens, pour une nuit ou une semaine.»

Et pourquoi juge-t-on spontanément qu’il est «impossible» de donner au suivant et d’inviter chez soi un étranger dans le besoin? De quoi a-t-on peur?

«Je pense que la peur fondamentale, c’est de devenir comme eux. De se dire qu’un jour, peut-être, on va se retrouver dans cette situation. Ils nous mettent en face de nos propres possibilités de tout perdre, comme eux l’ont vécu. Ils représentent un futur qui pourrait être le nôtre. C’est une peur viscérale, que la majorité des gens ont», estime Micheline Lanctôt.

Juste un regard

Micheline Lanctôt n’a pas nécessairement l’ambition de soulever un débat avec Autrui, mais espère à tout le moins toucher suffisamment le cœur des cinéphiles pour que ceux-ci aient envie d’ouvrir davantage les yeux. Et ensuite, qui sait…

«Ce ne sont pas tous les gens qui sont dans la rue qui ont des pathologies mentales, précise la réalisatrice. Beaucoup sont là parce qu’ils ont perdu le contrôle de leur vie. Et nous, on ne les regarde pas, on ne veut pas les voir, on passe par dessus…Ces gens méritent qu’on les regarde, qu’on les aide, qu’on les prenne en compte.»

Autrui prendra l’affiche au Québec vendredi le 27 février. Micheline Lanctôt participera aujourd’hui, mardi le 24 février, à une table ronde portant sur le thème «Itinérance et cinéma», à 14h30, au Bistro SAQ de la Cinémathèque québécoise, toujours dans le cadre des RVCQ. David LaHaye, Matthew Pearce, de la Mission Old Brewery, et Mélanie Charbonneau, de l’Accueil Bonneau, seront également de la discussion. L’entrée est gratuite.

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