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La Nouvelle-Orléans, au-delà de Bourbon Street (PHOTOS)

La Nouvelle-Orléans, au-delà de Bourbon Street
Sarah-Émilie Nault

Après avoir déjeuné à la terrasse d'un café, je marche doucement le long de la rue Chartres, l'une de mes préférées à La Nouvelle-Orléans. Je m'arrête tantôt zieuter dans l'une de ces mignonnes boutiques vintage, tantôt bouquiner (parfois même en français) dans une librairie d'occasion. Des passants me sourient, d'autres sont trop occupés à danser dans les rues. À quasi chaque intersection du French Quarter, un noyau de musiciens de talent se charge de maintenir la réputation festive de NOLA; surnom affectueux donné à la ville par ses fiers habitants. Après seulement quelques jours ici, entre les allées du French Market comme en promenade à vélo au coeur du City Park, je ne me sens plus comme une touriste, mais comme l'une des leurs.

La Nouvelle-Orléans, au-delà de Bourbon Street

Vivre la «créole attitude»

Dans la boutique bondée de clients et de vins locaux et étrangers, nous nous prêtons au rituel convivial de l'endroit: sélectionner et plonger soi-même dans la glace ses bouteilles de vin pour la soirée et traverser, sceaux sous le bras, du côté de la terrasse du nouveau restaurant-bar à vin Bacchanal. Une terrasse aux allures de jardin privé qui charme d'ailleurs le visiteur au premier regard. Ici, on partage des tapas savoureuses tout en se gavant de jazz. On déguste du vin à la lueur des flambeaux. Dans le nouveau quartier branché et hip Bywater, nous nous mêlons avec bonheur aux locaux, loin, très loin de la folie de Bourbon Street.

Si l'expression «attitude créole» signifie avoir du plaisir et prendre ça cool, c'est exactement ce que nous faisons dans ce quartier où les restaurants gastronomiques et les bars branchés pullulent.

C'est que j'avais envie de tout sauf de me retrouver coincée dans la horde de touristes éméchés et se croyant tout permis de la rue Bourbon. De tout, sauf d'effluves fétides et d'images désolantes que l'on tente de redorer à grands coups de colliers de perles multicolores. De tout, sauf de revenir au Québec en croyant que La Nouvelle-Orléans n'est que cela.

Au cours de ce périple dans la Big Easy, je m'enivre plutôt d'une Frenchmen Street musicale, jazzée et certainement plus noble, fortement recommandée par les locaux. Je dévore les huîtres, gombos, poboys, crevettes, écrevisses, poissons, fruits de mer et autres festins apprêtés à la créole concoctés par les chefs des kiosques du French Market. (Je laisse les alligators, tortues et autres spécialités excentriques à mon copain gourmand et aventurier). Je laisse le chic quartier Garden District se dévoiler à moi avec ses élégants manoirs, son histoire d'ancienne plantation et ses résidences de stars (Sandra Bullock, John Goodman, Nicolas Case, Anne Rice ou la maison où fut tourné le film «The Curious Case of Benjamin Button».) Je m'imprègne de l'histoire de NOLA alliant dualité des religions (catholique et vaudou), influences créoles, caribéennes, françaises et espagnoles et tristes souvenirs acadiens.

Dans la plus grande ville de la Louisiane – historique en journée, un peu folle et assurément musicale en soirée – je n'ai rien en commun avec ces gens qui repartiront, déçus, en croyant que NOLA n'est qu'une Bourbon Street déjantée. Et je me sens privilégiée.

Les relents de Katrina

«Il y a plusieurs façons de voir La Nouvelle-Orléans, elle a de nombreuses facettes et possède tant de secrets», explique Norma, la guide octogénaire qui nous fait découvrir les dessous de sa ville et les secrets de l’ouragan Katrina. (Katrina Tour)

À bord d’un petit autocar, nous longeons la rivière Mississippi pour nous rendre jusqu’aux fameux Lower 9th Ward, aujourd'hui tristement célèbre. Neuf ans plus tard, l’endroit porte toujours les marques de cette tragédie et surprend par ses contrastes.

Le long d'une même rue, j'entrevois des maisons restaurées, jolies et colorées, souvent élevées sur pilotis en prévision du prochain caprice de la nature, puis des demeures qui n’en sont plus, placardées, éventrées et couvertes de graffitis que jamais on ne reviendra gommer. À quelques coins de rue, les maisons modernes et équipées de panneaux solaires construites par des amis architectes de Brad Pitt forment un nouveau petit quartier où la vie et l'espoir semblent avoir repris le dessus.

«Tout le monde ici a sa propre histoire de survie et de reconstruction», ajoute-t-elle. Cette promenade nous fera aussi croiser le 8th Ward (deuxième quartier le plus touché par l'ouragan), le Upper 9th, le mémorial érigé en plein cœur du cimetière Charity Hospital en hommage à ces 83 victimes dont les corps ne furent jamais identifiés ni réclamés, la banlieue de Lakeview et le joli village des musiciens.

Prise par l'émotion en me baladant à travers l'exposition Katrina and Beyond présentée au Louisiana State Museum, je me rassure en discutant plus tard avec Renée Maxwell, directrice du marketing à l'hôtel Sheraton. «Quelle autre ville a eu l'occasion de tout recommencer, de prendre un nouveau départ?, me demande-t-elle en souriant. Il est faux de croire que Katrina a tout détruit, la tragédie a aussi affecté la ville de manière positive.»

NOLA (et son histoire) à vélo

Sur mon joli vélo rétro, je dévale les ruelles de ces quartiers qui me sont encore inconnus à la Nouvelle-Orléans. Celui de la communauté noire de Treme me fascine avec ses nombreuses maisons toujours placardées, ses habitants excentriques et son ambiance de série télévisée (ce n'est pas pour rien qu'HBO a choisi d'y situer l'une de ses récentes productions, baptisée... Treme!) Parce que je prends part au Creole Crescent Tour, une promenade de trois heures et d'une vingtaine de kilomètres à vélo, je suis reconnaissante de pouvoir me promener en toute sécurité, flanquée de mon guide, Teddy (lui-même nous ordonne de ne jamais nous aventurer dans les rues de Treme seuls et encore moins à la nuit tombée.) (Free Wheelin’Bike Tours)

De l'histoire de la fondation de la Nouvelle-Orléans en 1718 jusqu'au passage de Katrina, en passant par la qualité musicale du Faubourg Marigny, la division entre Créoles et Américains, le cas Plessy contre Ferguson menant vers la naissance de droits civils pour la communauté noire, l'Esplanade Avenue et ses énormes manoirs, le bayou Saint-Jean, la Desire Street (celle-là même du «Tramway nommé désir» de Tennessee Williams!) jusqu'au véritable temple vaudou de la Rosaly Alley (inconnu des touristes); la promenade à deux roues est significative et captivante.

Au City Park, en m'arrêtant sous le vénérable et énorme chêne du sud qui me regarde du haut de ses 900 ans et puis, plus tard, au parc Louis Amstrong et au Congo Square (exactement là où est né la musique Jazz), je tombe amoureuse de cette ville de libre expression où la musique est omniprésente.

«Sans la souffrance, il n'y aurait pas eu le jazz», explique Teddy. J'ajouterais que sans la souffrance, il n'y aurait pas eu la splendide Nouvelle-Orléans.

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