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Serial, l'ovni qui bouleverse la radio

Serial, un ovni qui bouleverse la radio

Avec plus de 5 millions d'écoutes depuis septembre, Serial s'impose comme un succès de la rentrée. Un phénomène de baladiffusion qui pourrait bien bouleverser les codes de la radio.

Un texte de Raphaël Bouvier-Auclair

À l'origine, il y a un fait divers. En 1999, une adolescente disparaît, puis est retrouvée morte à Baltimore, au Maryland. Son petit ami de l'époque sera inculpé, puis emprisonné en lien avec le meurtre.

Mais l'affaire n'est pas aussi simple. Avec Serial, la journaliste américaine Sarah Koening revient sur le cas tous les jeudis, en présentant de nouveaux détails aux auditeurs.

Serial est la baladodiffusion qui a atteint le plus rapidement les 5 millions d'écoutes en ligne ou de téléchargements dans l'histoire de la plateforme iTunes d'Apple.

Un nouveau modèle narratif et économique

La formule est en train de changer la donne dans l'univers de la radio, estime Sarah Hoyles qui est réalisatrice et animatrice à la station radiophonique d'Edmonton CKUA. Elle revient d'une conférence sur la radio à Chicago, où la baladodiffusion a occupé les débats.

« Cela change tout. Maintenant, les gens n'ont plus à être associés à un grand média pour produire une émission. Ils peuvent le faire de manière indépendante. »

— Sarah Hoyles, réalisatrice à CKUA

« Bien sûr, c'est plus difficile. Mais il y a moyen d'attirer des auditeurs en mettant un bon produit en ligne », ajoute-t-elle. Sarah Hoyles. Elle note aussi que la baladodiffusion permet plus de liberté au niveau de la forme. Les épisodes ne sont plus obligés de respecter des durées fixes.

Dans le cas de Serial, la durée des épisodes varie entre une trentaine et une cinquantaine de minutes selon la semaine. La fin n'est pas encore écrite et le nombre exact d'épisodes n'est pas déterminé.

Une place pour la fiction à la radio?

Serial n'est pas une œuvre fictive. L'intrigue se base sur une histoire réelle qui évolue de semaine en semaine grâce à des informations obtenues.

N'empêche, le style descriptif utilisé par la narratrice et journaliste Sarah Koening a des airs de roman policier, voire de série télévisée criminelle. D'ailleurs en entrevue sur le site internet Vulture, elle confiait qu'avant de lancer sa baladodiffusion, elle s'était demandé « pourquoi ne pas créer une émission qui serait comme un livre, mais à la radio »?

Vu le succès de Serial, certains croient que la baladodiffusion pourrait permettre à la fiction radiophonique de gagner en popularité.

L'écrivaine de Calgary Gisèle Villeneuve a participé à l'écriture de plusieurs fictions à la radio, que ce soit pour la BBC au Royaume-Uni ou pour Radio-Canada. La popularité de la baladodiffusion la rend optimiste.

« On pourrait tous réaliser nos propres fictions radiophoniques et ensuite les mettre sur internet. Et l'idée de la baladodiffusion, c'est que c'est là, à la vie à la mort. »

— Gisèle Villeneuve, écrivaine

Selon Pierre Pagé, professeur associé à l'UQAM et chercheur en histoire des médias, tout n'est pas qu'une question de technologie et de plateforme.

« À la base de tout, il faut avoir toujours une bonne histoire et un bon scénario pour la raconter. »

— Pierre Pagé, professeur associé à l'UQAM

Des questions éthiques

Le style narratif emprunté par la journaliste Sarah Koening dans Serial soulève toutefois des questions éthiques, selon la professeure en droit et en éthique des médias à l'Université du Minnesota, Jane Kirtley.

« D'un côté c'est intéressant parce qu'en racontant à ses auditeurs ce qu'elle sait de nouveau entourant le meurtre, Sarah Koening nous en apprend davantage sur le processus de cueillette d'informations d'un journaliste », note-t-elle.

Mais Jane Kirtley souligne que Serial traite d'un cas réel impliquant de vrais individus. Elle se demande si la journaliste filtre ce qu'elle décide de partager.

La baladodiffusion en chiffres

  • 1,7 % : proportion qu'occupe la baladodiffusion dans les produits que les Américains écoutent (selon la firme de Recherche Edison).
  • 39 millions : nombre d'Américains qui disent avoir écouté une émission en baladodiffusion à l'intérieur d'un mois.
  • 6 % : augmentation en six ans du nombre d'Américains qui disent avoir écouté une émission en baladodiffusion à l'intérieur d'un mois.

Source : Edison Research

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