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Quand tricoter devient un art (PHOTOS)

Tricoter est maintenant un art
Myriam Lefebvre

Certains diront qu’il ne s’agit que d’un passe-temps, d’autres rallieront le tricot à la mode et à la couture, mais en 2014 il faut s’avouer que le point mousse et le point jersey sont aussi devenus des outils d’expression pour plusieurs artistes. Que ce soit par l’art public, aussi appelé le «yarn bombing», ou l’art tout court que l’on retrouve maintenant dans les galeries, le tricot prend peu à peu, ou plutôt maille par maille, son virage artistique. Survol de la situation.

Des graffitis de balles de laine

Le phénomène n’est plus nouveau quoiqu’il enchante toujours: le «yarn bombing», aussi appelé le tricot graffiti a vu le jour en 2005, grâce à une idée de l’artiste Madga Sayeg. Voulant recouvrir la poignée de porte de sa boutique de Houston, aux États-Unis, l’artiste n’aurait jamais pensé créer un mouvement d’une aussi grande ampleur. Le geste, à la base coquet, s’est rapidement transformé en une activité consistant à sélectionner un élément du paysage urbain, puis à l’envelopper de laine.

Des groupes de tricoteurs du monde entier ont emboîté le pas, choisissant de colorer à l’aide de fils des lieux déshumanisés ou ternis par le temps. Le but est donc demeuré simple: se réapproprier l’espace public. Parmi les œuvres graffitées les plus populaires, notons le taureau de Wall Street, le tank rose de Copenhague et la statue de Rocky devant le Philadelphia Museum of Art.

Les Ville-Laines, du carré St-Louis à l’échangeur Tricot

À Montréal, c’est le collectif féminin les Ville-Laines qui nous a permis de découvrir le tricot graffiti. En entrevue avec le Huffington Post Québec, l’une de ses membres, Marilène, raconte qu’elle pratiquait l’activité avant même que le groupe se tisse. «Personne ne se connaissait vraiment. Je crois que l’on faisait toutes des œuvres individuellement, chacune de notre côté. Au fil du temps, on est entré en contact sur les médias sociaux», explique-t-elle.

Les Ville-Laines ont notamment enveloppé de laine le Carré St-Louis, le métro de Montréal et les rampes de l’Hôtel de Ville, tout en prenant part à différents projets tels l’habillement extérieur d’une école primaire et la création d’œuvres pour des festivals comme Phenomena ou le Symposium international d’art-nature multidisciplinaire de Val-David. L’an dernier, voyant toujours plus grand, le collectif s’est attaqué au très fade et très gris échangeur Turcot, question de l’embellir…et de le rebaptiser «Échangeur Tricot».

Au fil du temps, leurs réalisations sont devenues si populaires que la SDC Pignons rue St-Denis les a mandatées d’enjoliver la rue Saint-Denis en y ajoutant du tricot sur 50 de ses lampadaires. Malgré le fait que les œuvres aient disparu après quelques semaines seulement, le résultat a été très positif et les passants n’avaient que de bons mots pour cette réalisation.

Plus que de l’art urbain

Au-delà de «vandaliser» à coup de balles de laine, les Villes-Laines ont grandement évolué depuis leurs débuts. «Cela nous a permis de prendre confiance en la légitimité de la laine comme un médium. Maintenant, on peut dire qu’on ne fait plus juste de l’artisanat, on est aussi artiste. La laine, pour nous, est devenue un médium comme un autre, qui a acquis ses lettres de noblesse», raconte à son tour Dinette.

Alors que le «yarn bombing» est bel et bien classifié comme une forme d’art urbain, il reste encore un flou quant à la classification du tricot comme un art. «Le graffiti, à la base, c’est des mots», mentionne Marilène. «Avec le street art, on pensait davantage aux murales auparavant. Maintenant, le street art englobe beaucoup de choses, beaucoup de pratiques. Je pense même à un gars en Allemagne qui bouche les trous dans les murs avec des blocs lego. C’est aussi de l’art urbain», renchérit-elle.

Et même dans les galeries

De nos jours, il est même possible de retrouver des œuvres de tricot, crochet, dentelle et broderie dans certaines galeries d’art. «Les artistes s’intéressent à la maille et réalisent des œuvres très sculpturales qui n’ont plus rien à voir avec les napperons de nos grand-mères», relatait Anne Laure Rousille, directrice de la galerie Collection à Paris en entrevue avec l’Obs.

À l’Institut d’art contemporain de Boston, une exposition sur le sujet est présentement en cours. Fiber: Sculpture 1960-present met en vedette la fibre sous toutes ses formes et prouve ainsi la grande évolution du tricot au fil du temps. Bien loin le temps où les femmes tricotaient de façon machinale comme tâche domestique. Et maintenant, fini les pinceaux! À vos aiguilles!

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