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Fêter la mort comme au Mexique: «el dia de los muertos» gagne en popularité

Mieux qu'Halloween et La Toussaint, «El dia de los muertos»
David Pedre via Getty Images

Tout a commencé lorsque nous avons changé d'heure. C'était il y a sept jours. Depuis, quand la journée de travail se termine, il fait nuit. Il fait aussi de plus en plus froid. C'est le début de la saison des rhumes, de la grippe, des nez qui coulent. Au sol, les feuilles mortes s'accumulent. Et puis voilà la Toussaint et le jour des morts. Les pots de chrysanthèmes et les cimetières venteux. Rien de bien joyeux en somme.

Si Halloween avait réussi à faire une entrée remarquée en France à la fin des années 90 et au début des années 2000, la mayonnaise peine encore à prendre. La citrouille n'a jamais convaincu que les enfants désireux de sucreries, les supermarchés avides de rayons à thème et les fêtards à la recherche d'une excuse pour organiser une nouvelle soirée.

Depuis quelques saisons, un petit nouveau se fait de plus en plus remarquer. Vous l'avez peut-être vu au cinéma, sur les tee-shirts des ados ou dans les soirées branchées. Lui c'est "El dia de los muertos" en VO, la fête des morts mexicaine.

Guirlandes de papier, cierges et nourriture

Il s'agirait au départ du mélange d'une tradition aztèque, la célébration de la déesse souterraine, Mictecacihuatl, et surtout de la Toussaint, une fête chrétienne apportée par les conquistadors espagnols.

Pendant deux jours, le Mexique se transforme. Les familles se rassemblent, des petits autels sont construits pour rendre hommage aux morts. Des présents y sont déposés. Comme en France, les Mexicains se rendent aussi dans les cimetières pour fleurir et nettoyer les tombes. Des bougies, des colliers de fleurs, des guirlandes de papier, de la nourriture viennent orner les sépultures. Le 1er novembre est traditionnellement consacré aux "angelitos", les enfants morts, le jour suivant aux adultes décédés.

"Pour les Mexicains, il s'agit de recréer une connexion avec les amis, les proches et les ancêtres décédés en mêlant le souvenir et la célébration festive", affirme Andrew Chesnut, professeur d'études religieuses à l'Université de Virginie dans une tribune sur Le HuffPost américain. Squelettes en sucre, confiseries en forme de têtes de mort, cela pourrait ressembler aux festivités anglo-saxonnes d'Halloween, la symbolique est plus profonde: "On mange des squelettes pour se souvenir que la mort n'est pas une fin amère mais une douce continuation du cycle de la vie", explique-t-il encore.

Pendant ces deux jours, deux personnages accompagnent les Mexicains dans leurs célébrations. La Santa Muerte d'abord, qui personnifie la mort sous la forme d'un squelette féminin.

Calavera Catrina, ensuite, une autre figure extrêmement populaire. Née sous la plume de l'illustrateur mexicain José Guadalupe Posada en 1910, il s'agit aussi d'un squelette féminin, devenu au cours de la révolution mexicaine entre 1910 et 1920, une figure centrale de la culture du pays. Sous les traits de ce squelette et de son chapeau très chic était représentée la femme du président contesté Portifio Diaz. La révolution qui conduit à la redécouverte de l'héritage pré-hispanique rétablit aussi la figure du squelette comme symbole du cycle de la vie. Catrina traverse les années, symbolisant "l'indépendance culturelle des Mexicains face à l'élite euro-centrée", avance Andrew Chesnut.

Le muraliste Diego Riviera, mari de Frida Khalo la représentera aussi dans l'une de ses fresques :

Frida Khalo, les têtes de mort et le cinéma

Frida Khalo justement. La Fridamania a commencé dans les années 80 en France et dans le monde. Ses œuvres, son style, son couple terrible, sa souffrance ont fait le tour du monde. Elle a été une formidable carte de visite pour le Mexique et sa culture. C'est aussi dans ces années-là que les célébrations du jour des morts de la communauté latino aux États-Unis se développent. Aujourd'hui à San Francisco, dans le Texas ou à Los Angeles, les parades sont aussi fastueuses que celles du Mexique.

En France, l'influence mexicaine est plus subtile. Elle est d'abord arrivée par la mode et la décoration grâce à la tête de mort. C'était jusque là l'apanage des rockers, des motards, des bad boys, des membres des gang. Désormais, c'est le motif préféré des collégiennes. On ne compte plus les pull ornés de têtes de mort strassées sur le dos, de bracelets multicolores alignant des perles macabres.

"On n'est plus dans le marginal ni dans l'underground. C'est un courant émergent, qui commence à devenir une vraie tendance de fond avec, devant elle, une durée de vie d'au moins vingt ans", affirme Christine Pollet, fondatrice d'Inter°View et directrice conseil du département Consumer Lab du groupe Colorado, spécialiste des études qualitatives, quantitatives et prospectives au magazine spécialisé LSA. Dans le rayon tête de mort, on trouve évidemment celle en noir et blanc et celles bien plus festives, adorées par les Mexicains.

En haut, torchon de la marque Pottery Barn. En bas à gauche la marque "Bon Cheap bon genre", à droite Cara Delevingne pour H&M

"El dia de los muertos" a aussi gagné en popularité à la faveur de plusieurs événements culturels. En 2007, le musée du Quai Branly a par exemple organisé une grande exposition sur le Mexique et toute une semaine consacré à la mort.

Deux ans plus tard, c'est l'année du Mexique en France, une grande célébration annulée un mois après son début à cause de l'affaire Florence Cassez. En 2013, l'exposition sur Frida Khalo et Diego Riviera remporte un énorme succès au musée de l'Orangerie, à Paris. La Fridamania reprend de plus belle.

En juin dernier, le clip du remix de la chanson de Lilly Wood & The Prick "Prayer in C" met aussi à l'honneur les maquillages traditionnels de cette fête. La chanson reste numéro 1 pendant de longues semaines. Cette année, le Wanderlust, club branché du 13e arrondissement de Paris a choisi de mettre à l'honneur la fête mexicaine plutôt qu'Halloween le 31 décembre. À Montpellier aussi une petite parade Dia de los muertos est organisée.

Le 22 octobre un film d'animation salué par la critique a aussi permis de mettre le focus sur cette fête, "La légende de Manolo". Petit miracle de la 3D, ce film de Guillermo del Toro et de Jorge R. Guttierez met en scène un héros au royaume des morts, un endroit coloré et plein de vie dans une jolie fable sur l'amitié et l'amour. Le film n'a attiré que 200.000 spectateurs pour le moment mais la popularité des maquillages "del dia de los muertos" pour les soirées et déguisements d'Halloween pourrait bien en motiver d'autres.

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