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TransCanada confiante de pouvoir opérer à Cacouna

TransCanada confiante de pouvoir opérer à Cacouna
Patrick Bellerose

QUÉBEC - Alors que les travaux géotechniques sont toujours suspendus à Cacouna, TransCanada va de l'avant et dépose son projet devant l'Office national de l'énergie du Canada. L'entreprise a même conclu des premières offres d'achat conditionnelles sur des terrains de la petite municipalité pour installer ses citernes.

TransCanada a déposé jeudi une volumineuse demande d'approbation à l'ONE, l'organisme réglementaire fédéral chargé de surveiller les oléoducs. L'entreprise albertaine espère ainsi être en mesure de mettre en activité son oléoduc Énergie Est dès la fin de l'année 2018.

Le projet d'oléoduc Énergie Est, évalué à 12 milliards$, transférerait quotidiennement 900 000 barils de pétrole par jour de l'Alberta vers le Nouveau-Brunswick, en passant par le Québec.

La demande de TransCanada déposée devant l'organisme réglementaire fédéral fait plus de 30 000 pages, qui ont été livrées dans 70 classeurs. La compagnie estime qu'il s'agit d'une «des demandes d'approbation officielle les plus documentées de l'histoire de TransCanada».

Pourtant, de nombreuses données demeurent inconnues. TransCanada a dû cesser temporairement ses travaux de forages exploratoires à Cacouna parce que l'entreprise n'avait pas respecté les règles mises en place pour éviter de nuire aux bélugas de la région.

TransCanada pourra-t-elle aller de l'avant s'il s'avère impossible de construire un port pétrolier à Cacouna? Le président d'Oléoduc Énergie Est se dit confiant de pouvoir s'installer dans la petite municipalité. «C'est notre plan, on continue avec Cacouna», a dit François Poirier.

L'entreprise albertaine a d'ailleurs déjà conclu des offres d'achat conditionnelles sur des terrains en bordure du Saint-Laurent à Cacouna. TransCanada a notamment conclu une entente avec Doris Pelletier, un citoyen de la petite municipalité. L'entreprise y installera ses citernes, si le projet est accepté.

Au moins un autre terrain de la municipalité aurait été acquis, mais il a été impossible de confirmer l'information jeudi.

Questions sans réponses

En conférence de presse, les représentants de TransCanada ont été incapables de répondre à de nombreuses questions sur la sécurité de l'oléoduc. Un journaliste a fait remarquer que cinq ruptures se sont produites cette année dans l'infrastructure existante de TransCanada.

«Des incidents, bien sûr, ont lieu à travers notre système. Nous ne voulons pas que ça ait lieu, bien sûr, mais ça peut arriver», a dit en anglais le président et chef de la direction, Russ Girling, soulignant que l'entreprise opère près de 70 000 kilomètres d'oléoduc à travers l'Amérique du Nord. Un milliard de dollars est investi annuellement pour la sécurité du système, a-t-il ajouté.

Au sujet de l'Oléoduc Énergie Est, l'entreprise a été incapable de dire quel sera le délai d'intervention en cas de bris. L'entreprise assure toutefois qu'elle possède des senseurs afin de détecter les problèmes à distance. Des données sont envoyées au centre de contrôle toutes les cinq secondes. Si une rupture survient, les employés doivent fermer les valves dans un délai de moins de dix minutes.

Impossible également de savoir combien de pétroliers viendront s'approvisionner chaque mois au port de Cacouna. «Ça va dépendre, évidemment, du volume d'export de barils de pétrole, a dit François Poirier. C'est le fournisseur et les expéditeurs qui vont déterminer où leur pétrole va être livré, soit aux raffineries à Montréal et à Québec, ou l'export.»

Alors que l'entreprise a souvent répété que le projet permettra de réduire la dépendance énergétique des provinces de l'Est face aux pays étrangers, le président et chef de la direction a admis jeudi qu'il ne sait pas quelle part du pétrole servira aux besoins canadiens et quelle part sera exportée. «Je ne peux pas vous dire exactement. C'est le marché qui va décider combien de pétrole est consommé domestiquement et combien nous allons exporter», a dit Russ Girling.

Retombées au Québec

TransCanada promet d'importantes retombées économiques pour le Québec. Le président d'Oléoduc Énergie Est, François Poirier, a affirmé que le projet créera des retombées 5,8 milliards$ au Québec durant la phase de construction, puis de 1,9 milliard$ en recettes fiscales pour la province.

«Une somme qui pourra être affectée au financement des programmes sociaux ou encore à l'équilibre des budgets», a fait valoir François Poirier.

Pour la période de construction, l'entreprise prévoit créer 4 000 emplois directs et indirects dans la province. Ensuite, 500 emplois directs et indirects au cours des 20 prochaines années seront créés au Québec pour l'exploitation du pipeline, dit l'entreprise en citant une étude du Conference Board.

Les opposants s'organisent

Les opposants au pipeline n'ont pas tardé à dénoncer cette nouvelle étape. «Le projet ne passera pas, écrit Patrick Bonin, de Greenpeace Canada, dans un communiqué signé par de nombreux organismes. Énergie Est annulerait tous les efforts des provinces dans la lutte aux changements climatiques et poserait un risque majeur pour l'eau potable dans la moitié du pays.»

D'ailleurs, les représentants de 35 organismes opposés au pipeline de TransCanada se sont réunis à Québec la semaine dernière afin de créer un front commun. Équiterre, Greenpeace, la Fondation David Suzuki et le RVHQ étaient notamment du nombre.

«Ça fait plus d'un an qu'on se dit qu'on devrait parler d'une voix plus unifiée et de façon plus coordonnée», explique un des organisateurs de la rencontre, Jacques Tétreault, également porte-parole du RVHQ.

La première rencontre s'est terminée sur une série de propositions qui seront étudiées par les divers organismes. Il n'est pas prévu, toutefois, que les membres se réunissent sous une organisation parapluie ou se dote d'un unique porte-parole. «Peut-être qu'on se donnera quelques porte-paroles officiels», dit Jacques Tétreault. Dans le milieu communautaire, on précise toutefois que les organismes préfèrent généralement parler en leur propre nom.

Cacouna divisée

À Cacouna, le débat divise la population de quelque 2 000 âmes. Doris Pelletier, dont le terrain pourrait accueillir les futures citernes, se dit en faveur du projet. «Le port, ça fait cinquante ans qu'il est là, argue-t-il. Ceux qui sont contre, c'est ceux qui viennent de l'extérieur pour rester ici de façon saisonnière.» Il estime que le port pétrolier créera de l'activité économique dans la région.

La mairesse, Ghislaine Daris, estime elle aussi que les opposants viennent principalement de l'extérieur. Elle se défend toutefois de prendre position sur le projet.

Plusieurs résidants s'opposent malgré tout au projet, comme en témoignaient des pancartes «coule pas chez nous» observés au cours des derniers mois.

La municipalité est à mettre en place un «protocole» pour s'assurer de ne pas faire les frais d'un déversement. L'entreprise versera un montant d'environ 200 000$ annuellement à la municipalité pour le passage de son pipeline. La mairesse n'a toutefois pas pu chiffrer les retombées économiques pour le port pétrolier.

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