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Thaïlande: création d'un groupe en exil pour riposter contre la junte

Thaïlande: création d'un groupe en exil pour riposter contre la junte

L'ex-dirigeant du parti au pouvoir en Thaïlande évincé par un coup d'Etat a lancé mardi un groupe d'opposition à la junte, première tentative organisée de riposte au régime militaire, qui veut rassembler opposants en exil et ceux du pays.

"La junte a violé la loi, abusé des principes démocratiques et détruit vos droits, libertés et dignité humaine", a dénoncé Jarupong Ruangsuwan, recherché en Thaïlande, dans la déclaration annonçant la création de cette "Organisation des Thaïlandais libres pour les droits de l'Homme et la démocratie".

L'armée qui a pris le pouvoir le 22 mai a suspendu la Constitution et exclu des élections avant un an, limité les libertés individuelles, imposé un contrôle des médias et interdit les manifestations.

Nouvelle tentative de restriction des libertés publiques, elle a lancé lundi un appel au grand public à dénoncer tout manifestant d'opposition, en lui fournissant photos et vidéos, contre une récompense de 500 bahts (11 euros).

Et la junte a immédiatement rejeté la formation de cette nouvelle organisation qui doit opérer depuis un pays étranger non précisé.

"Il n'y a qu'un gouvernement légitime, c'est cette administration" sous contrôle de la junte, a ainsi insisté devant la presse le Secrétaire permanent du ministère des Affaires étrangères Sihasak Phuangketkeow.

Le groupe anti-putsch est voué à résister à toutes les tentatives de la junte, soutenue par les élites, de truquer le système politique en sa faveur, a expliqué Jarupong, dénonçant le "vol" de la démocratie.

L'ancien ministre de l'Intérieur du gouvernement renversé, qui a démissionné la semaine dernière de son poste à la tête du Puea Thai, est en fuite depuis qu'il a refusé de se rendre à une convocation de la junte.

Les militaires ont depuis le putsch convoqué des centaines de personnes, militants, hommes politiques ou journalistes, principalement des partisans du gouvernement et de l'ancien Premier ministre en exil Thaksin Shinawatra, chassé du pouvoir par le précédent coup d'Etat en 2006.

La plupart ont été libérés, en étant forcés de s'engager à se retirer de la politique.

L'Organisation des Thaïlandais libres regroupe d'anciens députés, universitaires et responsables des Chemises rouges, puissant mouvement soutenant Thaksin, dont les formations ont gagné toutes les législatives depuis 2001.

"La population demande une riposte", a précisé son porte-parole Jakrapob Penkair lors d'un entretien avec l'AFP par Skype depuis Londres.

"Nous apporterons un soutien psychologique aux opposants au coup d'Etat, les groupes démocratiques à l'intérieur et à l'extérieur de la Thaïlande", a ajouté celui qui fut porte-parole d'un gouvernement de Thaksin, soulignant que le milliardaire ne faisait pas partie de l'Organisation.

"Ce n'est que le début", a encore insisté ce membre fondateur des Chemises rouges, assurant qu'aucune violence ne serait utilisée.

En 2010, jusqu'à 100.000 Chemises rouges avaient occupé le centre de Bangkok pour réclamer la démission du gouvernement de l'époque. Ils avaient finalement été délogés par l'armée et cette crise avait fait plus de 90 morts et 1.900 blessés.

Les opposants à la junte sont aujourd'hui bien moins nombreux à braver les menaces des militaires. Peu nombreux mais très médiatisés, ils organisent depuis le coup d'Etat des opérations symboliques, comme des lectures de "1984" de George Orwell, qui aboutissent souvent à des interpellations.

L'armée a expliqué avoir pris le pouvoir pour restaurer l'ordre public après sept mois de manifestations meurtrières contre le gouvernement de Yingluck Shinawatra, soeur de Thaksin.

Mais cette justification n'a pas convaincu la communauté internationale qui a dénoncé le coup d'Etat. L'Union européenne a notamment annoncé lundi la suspension des visites officielles vers et de Thaïlande, ainsi que le report de la signature de l'Accord de partenariat et de coopération avec Bangkok.

Au coeur du conflit politique thaïlandais, la domination de la scène politique depuis 2001 par des partis créés par Thaksin, mal supportée par les élites traditionnelles proches du palais royal, parmi lesquelles l'armée, selon les analystes.

Thaksin reste malgré son exil une figure de division entre ces élites et les masses populaires du nord et du nord-est qui lui sont fidèles. Et depuis 2006, la Thaïlande est engluée dans des crises politiques à répétition mettant en scène ces deux camps.

apj-dth-abd/ros

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