Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Québec, qui a fermé ses portes en 2021.

L'après-Cannes de Xavier Dolan (VIDÉO)

L'après-Cannes de Xavier Dolan (VIDÉO)

Débarqué du Festival de Cannes dimanche, Xavier Dolan avait à peine eu le temps de reprendre ses esprits qu’il rencontrait déjà la presse québécoise, lundi matin, au Cinéma Excentris, pour faire le point sur la fabuleuse aventure qu’il vient de vivre.

Le jeune cinéaste, qui a remporté le Prix du jury de la prestigieuse compétition cannoise pour son film Mommy, ex aequo avec Adieu au langage, de Jean-Luc Godard, est parvenu à attirer une meute impressionnante de journalistes, de photographes et de caméramans qui l’ont mitraillé de flashs et de questions pendant près d’une heure. Anne Dorval, vedette principale de Mommy, était avec lui pour répondre aux médias.

D’entrée de jeu, Xavier a fait le point sur la récompense reçue samedi et sur la Palme d’or, que plusieurs lui prédisaient, mais qui est finalement allée au long-métrage turc Winter Sleep. Bien sûr, le garçon de 25 ans aurait aimé repartir avec la plus haute distinction de l’événement, mais il se réjouit bien davantage d’avoir su toucher le cœur des gens avec sa plus récente œuvre et ne perçoit nullement le Prix du jury comme un «prix de consolation».

«Le Prix du jury est un prix coup de cœur, un prix très important, a-t-il détaillé lentement, les larmes aux yeux, visiblement encore ému. La quantité d’amour qu’on a reçu pendant le festival était extrêmement bouleversante, tant de la part du public que des journalistes. Le jury a reconnu notre travail, notre existence. C’est un jury de gens pour qui j’ai une admiration sans bornes.»

«Il y a deux ans, j’ai osé être honnête et émettre un soupçon de déception à l’effet que mon film [Laurence Anyways] avait été choisi dans la catégorie Un certain regard. J’ai exprimé cette déception-là parce qu’on nous avait gonflés à bloc de l’espoir d’être en compétition. Aujourd’hui, je peux émettre avec plus de prudence que, oui, on se rend à Cannes avec les rêves les plus fous. Mais le jury a parlé et nous a quand même choisis, et j’en suis fier.»

«Je ne rêve pas d’une Palme d’or pour mon ego ou ma carrière, a-t-il ensuite précisé. J’en rêvais pour nous tous, ensemble. Comme image, comme métaphore, comme allégorie sur le combat pour l’identité, sur le fait qu’on nous reconnaisse. Mommy est un film extrêmement québécois, près de notre culture et nos problématiques. J’aurais voulu, pour ce rendez-vous avec l’histoire, que ça arrive, mais le Festival a été tellement généreux avec nous, à tous les niveaux… Je pense qu’on a gagné tout ce qu’on pouvait gagner. Il y a une certitude au sortir de Cannes : on a touché le cœur des gens et, en ce sens, notre mission est accomplie. On a gagné ce pari, qui était le pari le plus risqué.»

Mommy aux Oscars?

Xavier Dolan et les siens ont suivi de près la fièvre qui a gagné la province ces derniers jours via les réseaux sociaux et, de Cannes, ont senti tout l’appui que les Québécois leur prodiguaient.

«J’avais pris une trousse de voyage Rogers. Donc, j’avais accès à Twitter, a rigolé le réalisateur. J’ai été extrêmement ému et on s’est sentis transportés par vous. On a senti la vague d’amour.»

Avant de revenir à Montréal, Xavier a eu le temps d’échanger un brin avec Jane Campion, présidente du jury du Festival de Cannes, mais pas aussi longtemps qu’il l’aurait voulu. «On a su que le film l’avait beaucoup touchée, qu’elle était sortie de la salle en larmes», a-t-il souligné. Il a aussi entendu dire que, parmi les décideurs du palmarès, Gael Garcia Bernal et Carole Bouquet avaient beaucoup apprécié Mommy, et que Sofia Coppola l’avait ouvertement défendu. Avec d’aussi belles marques d’assentiment, tout semble maintenant possible pour Xavier Dolan et l’équipe de Mommy. La prochaine étape sera-t-elle celle des Oscars? Peut-être, mais, encore ici, Dolan ne veut pas s’avancer trop vite.

«Pourquoi pas, a-t-il lancé, un brin d’hésitation dans la voix. On a eu un accueil tellement chaleureux de la communauté médiatique et industrielle. Les distributeurs étaient extrêmement enthousiastes. Le film s’est vendu à peu près partout dans le monde. Dès que le film aura un distributeur aux États-Unis, on sera en mesure de réfléchir à une stratégie pour l’avenir du film.»

En ce sens, Xavier a avoué qu’il aimerait peut-être, un jour, tourner aux États-Unis, mais que les conditions gagnantes devraient être réunies pour qu’il accepte de s’exiler ainsi ailleurs. «Il faut trouver le bon projet et le bon moment», a-t-il plaidé.

Quant à savoir à quel moment Mommy prendra l’affiche au Québec, le mystère plane toujours. Le créateur de la fiction voudrait que les spectateurs puissent la voir immédiatement, mais, croit-il, il faut faire les choses «avec élégance».

«Il y a toute une mathématique derrière la sortie d’un film. Personnellement, je ne sais pas s’il devrait sortir tout de suite. Ce serait peut-être un peu excité, hyperactif. Je pense que ça vaut la peine de se poser et de réfléchir à la façon la plus intelligente de l’offrir au public. Il faut faire les choses avec élégance et assurance.»

«Une rockstar»

Souriante aux côtés de Xavier tout au long de la conférence de presse, Anne Dorval s’est emballée lorsqu’un journaliste lui a demandé de décrire le jeune homme qui l’avait d’abord engagée pour son premier long-métrage, J’ai tué ma mère, et qui lui a de nouveau donné le rôle d’une mère d’un adolescent dans Mommy.

«C’est quelqu’un qui a une intelligence hors du commun, a fait valoir l’actrice. Quand on voit des gens intelligents comme ça, ça bouleverse, ça impressionne tout le monde. Je regarde le parcours qu’il a fait en six ans… Tout ce qu’il a appris, toutes les connaissances qu’il a acquises, sa façon d’utiliser ces connaissances pour devenir encore meilleur… Je me demande toujours ce que ce sera dans 20 ans. C’est immense!»

«Quand on est sur place avec lui, dans la rue, les gens crient son nom. D’être à côté de lui, de voir les gens hurler comme si c’était Mick Jagger, de voir des filles et des garçons le toucher… Je n’ai jamais vu une chose pareille. Je n’ai jamais été aussi proche d’une rock star! En même temps, ça ne m’étonne pas; j’ai tellement d’admiration pour lui. Et je suis contente que le monde entier le reconnaisse, le salue», a encore vanté Anne pendant que, près d’elle, Xavier s’esclaffait d’un rire gêné.

Avec un tel destin d’idole qui se trace devant lui, Xavier Dolan se sent-il toujours prêt à mettre sa carrière sur pause et à retourner aux études, comme il a souvent répété vouloir le faire une fois l’épopée Mommy terminée? Celui qui dit ne pas savoir «quoi faire» avec tous les qualificatifs qu’on lui accole, de «génie» à «jeune prodige» souhaite, toujours, prendre son temps avant d’apposer une décision finale. La réception de son dernier-né sur la Croisette pourrait avoir mêlé les cartes, mais Xavier tient à garder la tête froide devant le brouhaha.

«On a vécu une semaine vraiment bouleversante, a-t-il déclaré en substance. C’est dur de répondre à cette question, dans le décalage horaire et dans le décalage, même, de ma propre vie. J’ai le désir de retourner aux études, qui contient le désir, plus vaste, de me reposer et de vivre une vie un peu plus normale, paisible. Comment va s’exprimer cette pause-là? Je ne le sais pas. Mommy a reçu un accueil auquel on ne pouvait pas s’attendre, et il faut que je puisse l’accompagner dans sa promotion. Je ne sais pas ce qu’il adviendra de ce projet de retour aux études. Je vais me prodiguer à ce type de réflexion dans les prochaines semaines…»

INOLTRE SU HUFFPOST

Xavier Dolan et Anne Dorval de retour de Cannes

Close
Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Canada, qui ont fermé en 2021. Si vous avez des questions ou des préoccupations, veuillez consulter notre FAQ ou contacter support@huffpost.com.