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Piratage: Washington frustré par Pékin qui refuse de suivre les "règles du jeu"

Piratage: Washington frustré par Pékin qui refuse de suivre les "règles du jeu"

L'offensive de Washington contre la Chine, accusée d'espionnage industriel, met au jour la frustration grandissante des Etats-Unis, qui s'efforcent de convaincre Pékin de respecter les règles internationales qu'ils ont édictées.

La justice américaine a inculpé lundi cinq officiers de l'armée chinoise pour "piratage informatique" et "espionnage économique", une première reflétant l'inquiétude de Washington quant à l'ampleur du pillage informatique téléguidé par Pékin. La Chine a immédiatement dénoncé des accusations "absurdes" qui mettent "en danger la coopération et la confiance mutuelle" entre les deux puissances.

Le président Barack Obama et ses prédécesseurs ont longtemps répété qu'ils se félicitaient de la montée en puissance de la Chine, ne manquant toutefois pas de préciser systématiquement que Pékin devait accepter de suivre les "règles du jeu" et avoir sa part de responsabilité dans la gestion des affaires mondiales.

"Je pense que l'administration Obama ces six dernières années a été frustrée par le fait que les Chinois n'aient pas joué le rôle qu'elle espérait qu'ils joueraient, en respectant le système", constate Adam Segal, du centre de réflexion Council on Foreign Relations.

"Les Chinois disent en substance: nous n'avons pas écrit la moindre de ces règles et nous ne sommes pas forcément d'accord avec elles, donc ne vous attendez pas à ce que nous les suivions", explique-t-il.

Dans la foulée de la tempête provoquée lundi, la Chine a accusé les Américains d'hypocrisie alors que l'ancien consultant de la NSA Edward Snowden, recherché par Washington, a révélé l'étendue des programmes de surveillance des Etats-Unis dans le monde entier, y compris chez le géant asiatique.

Les Etats-Unis ont répliqué qu'ils respectaient les règles et que leurs activités de renseignement avaient uniquement pour objectif la sécurité nationale et non des avantages commerciaux.

Si les responsables américains ont assuré que ces inculpations étaient sur le feu depuis longtemps, elles interviennent au moment où la Chine agit de façon unilatérale dans une série de disputes maritimes avec le Japon, le Vietnam et les Philippines, malgré les appels répétés de Washington à respecter les lois internationales.

Pékin estime jouir d'une souveraineté inaliénable sur la quasi-totalité de la mer de Chine méridionale.

Douglas Paal, du Carnegie Endowment for International Peace, estime que Washington a la tâche difficile pour essayer de contenir la Chine.

Selon lui, le message des Américains aux Chinois a été jusqu'à présent: "Nous changerons les règles pour vous --par exemple au sein du Fonds monétaire international, en augmentant vos droits de vote-- mais vous ne pouvez pas en sortir et réécrire les lois maritimes" internationales.

Autre sujet de friction entre les deux plus grosses économies de la planète: l'énergie solaire, chaque partie accusant l'autre de pratiques commerciales déloyales.

Douglas Paal se demande si, au final, l'option de la force choisie par Washington lundi était la meilleure approche à suivre avec la Chine.

Il note que l'administration Obama commence à ressembler aux néoconservateurs de l'époque de George W. Bush, qui apparaissaient comme "recherchant la confrontation" avec Pékin, alimentant ainsi le sentiment anti-américain parmi la jeunesse chinoise.

"La meilleure réponse n'aurait probablement pas dû se faire en public, mais plutôt consister en une sorte de cyber-attaque américaine sur des biens chinois avec une carte de visite disant +Vous en voulez encore? Alors continuez dans cette voie+", suggère-t-il.

Robert Daly, directeur de l'Institut Kissinger au Woodrow Wilson International Center for Scholars, souligne lui que la tactique de montrer du doigt des officiers chinois risque de se retourner contre les Etats-Unis, en faisant perdre la face aux Chinois et en sapant la coopération militaire dans le Pacifique des deux puissances.

"La Chine craint plus de perdre la face que les Etats-Unis et elle se battra davantage pour la sauvegarder. Des consultations bilatérales et multilatérales produiraient de meilleurs résultats", selon lui.

Mais James Lewis, du Center for Strategic and International Studies, rappelle que Pékin n'a jamais répondu à quatre années de discussions en privé sur la question du piratage informatique.

"Les Chinois savent désormais qu'il s'agit d'un problème sérieux dans les relations bilatérales qu'ils ne peuvent tout simplement pas ignorer".

sct/sam/gde

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