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En Suisse, les pédophiles ne pourront plus travailler avec des enfants

En Suisse, les pédophiles ne pourront plus travailler avec des enfants

En Suisse, les pédophiles se verront désormais interdits à vie et de façon automatique de travailler avec des enfants. Une tolérance zéro que les citoyens helvétiques ont acceptée dimanche à 63,5%, malgré l'opposition du gouvernement.

Le texte approuvé par les Suisses stipule que toute personne condamnée pour abus sexuel sur un enfant ou une personne dépendante soit automatiquement privée à vie du droit d'exercer une activité professionnelle ou bénévole en contact avec des mineurs ou des personnes dépendantes. Tous les cantons suisses ont accepté le projet.

Les arguments émotionnels ont pris le dessus sur les principes constitutionnels -- proportionnalité de la peine et non automaticité de la peine -- mis en avant par le gouvernement.

"Je suis soulagée. J'avais très peur que cela ne passe pas", a déclaré à la télévision RTS une des présidentes de l'association Marche blanche Suisse, Christine Bussat, à l'origine de l'initiative.

Le Parlement n'avait pas donné de consigne de vote, mais le gouvernement s'était opposé au projet, estimant qu'une loi récemment adoptée par le Parlement et qui devait entrer en vigueur en 2015 portait sur le même sujet. Il avait aussi jugé que l'initiative pénaliserait les amours d'adolescents.

"Cette question sera réglée dans la loi d'application", selon le comité de la Marche Blanche, pour qui l'initiative vise les pédophiles et non les adolescents.

Le comité avait également fait valoir que la loi adoptée par le Parlement n'était pas assez ferme, car prévoyant une interdiction professionnelle obligatoire de seulement dix ans, et uniquement à la suite d'une peine minimale de six mois.

Parmi les co-présidents de l'initiative figurent des représentants des partis de droite et du centre. L'association Marche blanche Suisse a été créée, en juin 2001, par un groupe de parents choqués par la réalité de la pédocriminalité et qui estiment que la pédophilie n'est pas guérissable.

Le système de démocratie directe en Suisse permet d'organiser des référendums sur un texte donné pour autant que ses partisans aient obtenu le nombre de signataires prévus par la constitution. Pour un référendum au niveau fédéral, il faut 100.000 signatures.

La Suisse va ainsi disposer d'une loi plus rigide que ses voisins car la justice ne pourra plus tenir compte de la gravité des actes et devra automatiquement appliquer l'interdiction d'exercer.

L'acceptation du projet par le peuple met la Suisse face à un "dilemme" car il est impossible d'appliquer l'initiative telle quelle "sans violer la Constitution et cela me préoccupe", a estimé la ministre de la Justice et Police, Simonetta Sommaruga, lors d'une conférence de presse.

Elle a également souligné qu'une possibilité serait d'inclure des exceptions dans la loi d'application, comme le suggère la Marche blanche.

"Nous sommes tous d'accord que nous devons mieux protéger (les enfants) contre les violences sexuelles, mais nous ne devons pas oublier que les agressions ne peuvent être évitées que si tout le monde fait preuve de vigilance. C'est un état d'esprit que nous devons cultiver chaque jour", a-t-elle également fait remarquer.

L'Autriche, la Belgique, la France, l'Allemagne et l'Italie ont la possibilité d'interdire des activités professionnelles ou bénévoles avec des enfants. L'interdiction peut également être à vie, mais, selon l'Institut suisse de droit comparé (ISDC), cité par les médias, ces cas de figure restent des exceptions dans ces pays.

En France, par exemple, il n'y a aucune automaticité dans l'interdiction de travailler avec des mineurs pour quelqu'un condamné pour pédophilie. C'est décidé au moment du jugement par le tribunal.

La personne condamnée à plus de 5 ans de prison est inscrite à un fichier des délinquants sexuels (pour les moins de 5 ans, c'est le tribunal qui décide de l'inscription ou non). Ce fichier peut être consulté par les autorités judiciaires, les préfets, et certaines administrations de l'État pour les décisions administratives de recrutements, d'affectation, d'autorisation, d'agrément ou d'habilitation concernant des activités ou des professions impliquant un contact avec des mineurs.

Selon l'ISDC, l'Italie serait le pays à présenter le plus de similitudes avec la Suisse, mais l'interdiction d'exercer s'applique automatiquement seulement pour six délits. En outre, la sanction s'applique uniquement en cas d'activité dans les écoles, ainsi que dans les institutions ou autres structures officielles, fréquentés par des mineurs, selon les experts.

Suite au vote, les enseignants suisses ont indiqué espérer une mise en oeuvre "la plus raisonnable possible" du texte. Georges Pasquier, président du Syndicat des enseignants romands, s'est dit tout de même content que le "oui" n'atteigne pas les 80% pronostiqués.

En 2008, les Suisses avaient déjà accepté l'imprescriptibilité des actes pédophiles, au même titre que les crimes contre l'humanité, le génocide et les attaques terroristes.

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