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Le Portugal sort de la tutelle de la troïka, mais l'austérité reste

Le Portugal sort de la tutelle de la troïka, mais l'austérité reste

Le Portugal est devenu samedi officiellement le deuxième pays sous perfusion de la zone euro à retrouver son autonomie financière et s'apprête, à l'instar de l'Irlande, à faire le grand saut sans filet sur les marchés.

Le gouvernement se garde de tout triomphalisme: "l'heure n'est pas à l'euphorie", a assuré son porte-parole Luis Marques Guedes. "Il faut maintenir la rigueur pour éviter de retomber dans les erreurs du passé", a-t-il martelé.

Très attendu par la population, le départ définitif des inspecteurs de la troïka (UE-FMI-BCE), surnommés les "men in black", est loin de signer la fin de l'austérité.

"Le Portugal a réussi à surmonter une des pires crises de l'histoire récente, mais il reste encore beaucoup à faire. La discipline budgétaire sera une responsabilité de tous les jours", a prévenu le Premier ministre Pedro Passos Coelho.

A l'instar de l'Irlande, le Portugal a renoncé à demander à ses partenaires européens une ligne de crédit de précaution, profitant de la brusque baisse de ses taux d'emprunt et de ses confortables réserves financières.

"C'est une décision définitive, qui a été réfléchie et bien mesurée par le gouvernement. Nous avons la certitude que c'est la meilleure décision pour les Portugais", a assuré Carlos Moedas, secrétaire d'Etat adjoint au Premier ministre.

Au bord de la faillite et incapable de se financer sur les marchés, le Portugal s'était résolu en avril 2011 à appeler à la rescousse la troïka, après la Grèce et l'Irlande.

En contrepartie d'un prêt de 78 milliards d'euros, le gouvernement de centre droit a appliqué une sévère cure d'austérité, taillant dans les retraites, prestations sociales et salaires des fonctionnaires.

A l'issue d'un conseil des ministres extraordinaire, le gouvernement a donné samedi des gages aux investisseurs sur la poursuite du programme de réformes et de rigueur au-delà du 17 mai, dans un document intitulé "Le chemin vers la croissance".

Côté croissance, l'annonce jeudi d'une rechute du Produit intérieur brut du Portugal de 0,7% au premier trimestre a fait l'effet d'une douche froide.

Dû à l'essoufflement passager des exportations, ce recul ne devrait pourtant pas compromettre la reprise progressive de l'économie, selon les analystes. Et le gouvernement a maintenu samedi à 1,2% sa prévision de croissance pour l'année en cours.

Pour Pedro Lino, gérant de Dif Broker, ce contretemps fâcheux n'empêchera pas le Portugal de retourner la tête haute sur les marchés, "tant que le pays poursuit les réformes".

De nombreux économistes ont cependant plaidé en faveur d'une rallonge, estimant que l'ancien maillon faible de la zone euro se retrouverait en première ligne en cas de turbulences sur les marchés.

"Sans filet, nous serons seuls face aux marchés, et la moindre erreur peut nous coûter cher. Il va falloir continuer à tailler dans les dépenses publiques", estime Joao Cesar das Neves, professeur d'économie de l'Université catholique de Lisbonne.

L'intervention de la troïka a été efficace dans ce domaine: en trois ans, les déficits publics ont été divisés par deux, à 4,9%. Mais la dette a continué à enfler, passant de 94% à 129% du PIB, et la croissance est encore timide.

"Les politiques de rigueur budgétaire et les réformes visant à soutenir la croissance doivent être maintenues pendant les mois et années à venir", a averti le vice-président de la Commission européenne Siim Kallas.

Pour Joao Camargo du collectif "Que se lixe a troika" (Que la troïka aille se faire voir), "ces trois années ont été une catastrophe pour les Portugais. Et le départ de la troïka, c'est une farce, de fait elle reste".

Le Portugal célèbre la fin de la tutelle, mais les créanciers continueront à surveiller le pays jusqu'au moment où 75% des prêts seront remboursés, ce qui ne devrait pas arriver avant vingt ans.

bh/jeb

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