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Les murs du Vieux Homs, journal de bord de la rébellion

Les murs du Vieux Homs, journal de bord de la rébellion

Les murs de la vieille ville syrienne de Homs sont comme un livre ouvert qui conte l'histoire de la rébellion pendant les deux ans de siège de l'armée, avec ses moments d'exaltation, de doutes et de divisions.

Dans ce quartier en ruines, les graffitis des insurgés apparaissent à chaque coin des rues, surtout sur les murs criblés de balles et les devantures éventrées des magasins.

Dans les premiers temps du siège, l'esprit révolutionnaire domine, avec les slogans hostiles au régime de Bachar al-Assad qui avaient été scandés par les centaines de milliers de personnes au début de la révolte en 2011 avant que celle-ci ne soit réprimée dans le sang et que le pays ne bascule dans la guerre.

Entrés début mai dans le Vieux Homs après le départ des derniers rebelles en vertu d'un accord entre les belligérants, les soldats déambulent indifférents devant des slogans comme "Assad traître", "Homs libre", "Vive la Syrie libre sans Assad".

Sur d'autres murs, d'anciennes inscriptions à la gloire du "leader éternel" Hafez al-Assad, président défunt et père de Bachar, se superposent avec "A bas le régime d'Assad" ou encore "que Dieu maudisse ton âme Assad", insulte de prédilection des détracteurs du régime.

Avec les premiers morts dans les bombardements et les combats dans les quartiers de Hamidiyé, Jeb al-Jandali, Bab Dreib, Boustane al-Diwane, Safsafe, les slogans changent de ton: "La liberté se conquiert avec le sang des martyrs", voit-on sur les façades.

Dans des abris où se réfugiaient surtout des rebelles mais aussi des civils et où sont éparpillés des matelas, quelqu'un a gribouillé: "Le martyre ou la victoire".

Les mots d'ordre reflètent également les différentes tendances de la rébellion, que le régime accuse de "terrorisme" et d'"extrémisme" financés par l'étranger.

Désormais, les slogans révolutionnaires côtoient ceux peints par les groupes islamistes, dominants au sein de l'insurrection.

"Bienvenue aux gens du jihad" clame l'un d'eux, tandis que d'autres affichent des intentions bien claires: "L'avènement du califat est proche" ou encore "l'Etat islamique est notre revendication".

Le défi transpire parfois. "On va vous étonner" ou encore "L'Etat islamique (en Irak et au Levant) restera envers et contre tout", en référence au groupe jihadiste le plus radical combattant en Syrie.

"Chabbihas, on vous donne rendez-vous dans vos quartiers", est-il encore écrit en référence à ces hommes de main du régime accusés par les militants d'abus à l'encontre des civils et de pillages.

Puis, le vent tourne, avec les trahisons et les critiques contre les chefs rebelles.

"Libérez-nous des collaborateurs", peut-on lire, en référence à de rebelles soupçonnés de collaborer avec le régime.

A mesure que le siège du Vieux Homs devient de plus en plus insoutenable, le message est clair: "Le peuple a faim". Un appel à l'aide peint sur les murs.

Des slogans commencent aussi à s'en prendre aux chefs des groupes rebelles, accusés d'empêcher les civils de quitter les zones assiégées ou encore de garder les provisions pour eux-mêmes: "Abou Rateb, Abou Azzam, laissez les familles partir" ou encore "On veut manger, voleurs".

Aux derniers jours du siège, certaines inscriptions cherchent à justifier pourquoi les rebelles ont finalement accepté d'abandonner leur bastion, où les violences ont fait en deux ans quelque 2.200 morts.

"C'est pour la nourriture qu'on a signé un compromis", affirme l'une d'elle.

Mais la présence de la rébellion continue de hanter les quartiers avec les fosses creusées dans les jardins et les mosquées.

Dans la cour de la mosquée al-Kamel ravagée par les violences, une main à la peau asséchée et couverte de mouches jaillit d'une fosse à l'odeur nauséabonde et dans une stèle improvisée à côté, on lit le nom d'un "déserteur" tué le 29 avril, aux derniers jours du siège.

Tout près, une inscription, "cimetière des martyrs héros".

Malgré le succès de la stratégie du siège employée par l'armée, des slogans écrits vraisemblablement pendant le retrait des rebelles montrent que certains ont encore l'âme chevillée au corps. "Pendant deux ans nous n'avons pas quitté Homs. Nous reviendrons", affirme l'un d'eux.

ram/sk/tp

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