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USA: le rêve américain au centre d'une réforme des prêts immobiliers

USA: le rêve américain au centre d'une réforme des prêts immobiliers

Une refonte en cours du financement du crédit immobilier aux Etats-Unis soulève d'intenses discussions sur le rôle de l'Etat dans la garantie des prêts sur 30 ans, part du rêve Américain qui veut que chacun accède à la propriété.

L'administration ne veut pas répéter le scénario de septembre 2008 où l'argent des contribuables (188 milliards de dollars) avait sauvé les deux organismes de refinancement immobilier, évitant qu'ils n'emportent dans leur chute l'énorme marché des obligations hypothécaires.

Freddie Mac et Fannie Mae --dont les noms ne sont que l'adaptation phonétique de leurs acronymes comme Federal National Mortgage Association (FNMA) pour Fannie Mae--, ne font pas de crédits mais rachètent aux banques les prêts immobiliers et les garantissent. Les deux organismes les transforment en titres et les revendent aux investisseurs.

En garantissant plus de 6.000 milliards de dollars de titres, ces géants financiers représentent "le 2e marché obligataire du monde après les bons du Trésor", explique à l'AFP Ed Pinto, un ancien responsable de Fannie Mae aujourd'hui expert à l'American Enterprise Institute.

Avec d'autres agences fédérales, Fannie Mae et Freddie Mac garantissent aujourd'hui près de 85% des prêts immobiliers individuels. "Aux Etats-Unis, le gouvernement est très impliqué dans le financement du crédit immobilier", reconnaît M. Pinto.

Agences hybrides depuis des décennies, cotées en bourse mais réglementées par l'Etat avec une mission de service public pour encourager une accession équitable à la propriété, elles sont tombées dans l'escarcelle du Trésor américain au plus fort de la crise.

Le Trésor en conserve toujours le capital (170 milliards de dollars). Elles lui reversent de juteux dividendes, tirés de bénéfices retrouvés, notamment grâce aux amendes infligées aux banques qui leur avaient vendu des crédits douteux avant que la bulle immobilière n'éclate.

La réforme des sénateurs démocrate Tim Johnson et républicain Mike Crapo vise à introduire davantage de capital et donc de risque privé dans le système tout en conservant le prêt à taux fixe sur 30 ans.

Apparu dans les années 60, ce prêt immobilier --une rareté ailleurs qu'aux Etats-Unis et au Danemark--, est associé au "rêve américain". Il est crédité d'avoir permis à des millions d'Américains de devenir propriétaires.

"Il a prouvé être un instrument sûr pour le développement du patrimoine des familles américaines", affirme à l'AFP Nikitra Bailey de l'organisation à but non-lucratif Center for Responsible Lending.

Mais sur une telle durée, "il est virtuellement impossible qu'il soit financé totalement par le secteur privé", estime Rob Couch, du centre d'études Bipartisan Policy Center.

Un postulat qui n'est pas partagé par tous: "Je ne comprends pas cette notion sacro-sainte du prêt à 30 ans. Pourquoi le fait que le gouvernement subventionne le prêt à 30 ans irait de soi ?", s'insurge l'économiste Dean Baker, co-directeur du Center for Economic and Policy Research.

Certains soulignent aussi que cette formule de prêt a davantage profité aux banques et au marché immobilier qu'aux propriétaires. "On l'aime parce qu'il abaisse les échéances mensuelles mais pour finir, il fait grimper le prix des maisons", affirme Ed Pinto.

Cet expert rappelle qu'avec un taux de propriétaires de 62% (sans tenir compte des saisies en cours), les Etats-Unis sont seulement dans la moyenne des pays riches et sont redescendus au niveau des années 60. Pendant la bulle immobilière, ce taux est monté à plus de 69% en 2004 ce qui, précisément, s'est révélé "intenable".

Le projet de réforme crée un nouveau régulateur baptisé FMIC (Federal Mortgage Insurance Corporation) à la place de Fannie, Freddie et de leur chaperon, la FHFA. Il impose des règles plus strictes à l'émission de titres hypothécaires par de nouvelles entités privées: 3,5% à 5% d'apport personnel, 10% du prêt garanti par la banque émettrice en cas de défaillance.

Le projet de loi suscite d'intenses discussions et son adoption en commission du Sénat fin avril a été repoussée, laissant des doutes sur son passage avant les élections de novembre. "C'est un bon signe, cela prouve qu'il y a un débat sérieux", juge Rob Couch qui parie sur une adoption de la réforme l'année prochaine.

En attendant, les derniers tests de résistance imposés à Fannie et Freddie, mettant en scène une chute des prix des maisons de 25%, ont montré que les deux organismes auraient encore besoin du sauvetage de l'Etat. Pour quasiment le même montant qu'il y a six ans...

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