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«Mazza/Fortin»: les deux font la paire

«Mazza/Fortin»: les deux font la paire
Jocelyn Malette/Agence QMI

Elles sont tout aussi craquantes l’une que l’autre et feront probablement toutes deux un malheur en solo, mais, pour leur premiers pas dans la cour des grands, Virginie Fortin et Mariana Mazza ont choisi d’unir leur talent et de proposer un spectacle conjoint où chacune dispose de son temps de glace, avec des saynètes en duo au début, au milieu et à la fin. Après la première montréalaise de Mazza/Fortin, au Théâtre St-Denis, jeudi, on applaudit haut et fort cette judicieuse décision. Les deux filles ont des styles différents, mais complémentaires, qui se marient à merveille. Et elles sont tordantes, chacune à sa façon.

Leurs parcours ne sont pas les mêmes, mais se sont croisés à quelques reprises dans les dernières années, jusqu’à cet aboutissement ultime qu’est Mazza/Fortin. Mazza s’est jusqu’ici surtout démarquée dans le circuit parallèle aux grandes scènes, dans des événements comme Zoofest, tandis que Fortin a fait de l’improvisation, a chanté au sein du groupe Which is Which avec sa sœur Corinne et s’est récemment fait valoir dans le groupe de jeunes comédiens de SNL Québec. L’an dernier, elles ont croisé le fer en finale de l’émission En route vers mon premier gala Juste pour rire, à MAtv. C’est Virginie qui a remporté le concours. En revanche, cette année, Mariana pourrait être sacrée Découverte de l’année au prochain Gala les Olivier. En somme, malgré leur différence d’âge – Mazza a 22 ans et Fortin, 27 -, les deux amies combattent à armes égales. Et puisque l’union fait la force…

Mariana Mazza et les clichés racistes

Le numéro d’ouverture de Mazza/Fortin nous expose d’ailleurs d’entrée de jeu les personnalités contrastantes des demoiselles. Celle, posée, pince-sans-rire, à la limite de la suffisance, de Virginie, en opposition à celle, bon enfant, exaltée, sans filtre, de Mariana. L’image de la petite sœur casse-pieds qui tourne comme une mouche autour de son aînée nous revenait sans cesse en tête en voyant Virginie tenter de faire une entrée digne et Mariana, avec sa bonhomie et sa candeur, lui gâcher complètement son moment. «On a autant de fun que deux adolescents qui vivent leur première relation sexuelle, il y en a juste une qui a du fun», finit par balancer Virginie, excédée, avant de céder l’espace à son acolyte. Le ton était donné, on savait à peu près à qui on avait affaire.

Mariana Mazza pige allègrement dans ses expériences personnelles pour nourrir ses monologues. Et la matière est riche. À elles seules, ses origines lui fournissent un terreau fertile. «J’ai trop d’origines», clame cette fille d’un père latino et d’une mère arabe. Excédés des clichés racistes? Mazza nous les défile tous à une vitesse fulgurante, avec l’air de la jeune effrontée qui a le droit de tout dire, «parce qu’elle peut se le permettre», «parce qu’elle a grandi dans le ghetto [Montréal-Nord]». La phrase qui vient est toujours plus coup-de-poing que la précédente. Les oreilles sensibles échapperont peut-être quelques «Hon!» Elle suggère, par exemple, que, chez elle, sa mère n’avait pas droit de parole. «On sait tous que les Arabes ne volent pas les banques. Ça, c’est la job des Noirs. Non… Les Noirs n’ont pas de job», risque-t-elle plus tard.

Sinon, Mariana Mazza parle beaucoup de sa mère, qui semble avoir un fichu caractère. Elle jase de ses tatouages, de Lara Fabian, dont elle est étonnamment une admiratrice («J’ai pas une face de fille qui aime Lara Fabian, j’ai plus une face de fille qui va lui voler ses bijoux»), de ses relations amoureuses et du fait qu’elle n’est pas lesbienne («J’ai pourtant toutes les caractéristiques pour être lesbienne: j’ai une bedaine de bière, des tatous et j’ai la voix de Dan Bigras en lendemain de brosse»). Et elle tourne ses propres travers en dérision avec grande aisance. «J’adore la scène. C’est le seul endroit au monde où on ne peut pas me dire de fermer ma gueule. Quand j’étais petite, mon surnom, c’était “ta gueule”.»

On salue l’audace de cette petite dynamo verbomotrice, aussi bien capable de nous brandir les plus gros tabous en plein visage que de pousser un gag de crotte de nez à la fin de son tour de piste. Un gag drôle, soit dit en passant.

Virginie Fortin et les personnes âgées

Et Virginie, elle? Elle nous emmène complètement ailleurs, dans un monde où on vogue constamment entre l’absurde et le grinçant, et c’est drôlement réussi. De son air faussement sérieux s’échappent quelques perles juste assez choquantes, juste assez corrosives.

Il faut du cran pour amorcer sa prestation avec une blague de masturbation impliquant son grand-père. Il en faut aussi pour déclarer qu’on déteste les personnes âgées. «Les personnes âgées sont aussi utiles à la société que les skateboards sont utiles aux personnes âgées.» Elle propose de les expédier dans un pays où la limite de vitesse, sur la route, serait de 4. Elle s’insurge de s’être fait envoyer paître par un sans-abri.

Son opinion sur les dépanneurs? «Ça dépanne personne, les dépanneurs. Ça dépanne juste les Chinois quand ils arrivent ici». Elle s’indigne de trouver le nom d’une maladie grave (cancer) dans le répertoire des signes astrologiques. «Maintenant, les gens nés du 22 juin au 22 juillet, vous allez être gastro», a-t-elle ordonné pour alléger les «souffrances» des natifs du symbole. Le segment où elle trace le parallèle entre divers quartiers de Montréal et les membres d’une famille est efficace, à condition de connaître la métropole («Verdun, c’est l’oncle célibataire alcoolique; Hochelaga, la cousine de 16 ans enceinte; Outremont, le papa du Mile-End qui agit cool, mais qui vote libéral»).

Et sa finale, où il est question des instants d’intimité (et de vulnérabilité) qu’on vit tous dans la salle de bain, est impayable. Scatologique… mais classe. Représentatif du ton de l’humour de cette étoile montante. À qui pourrait-on comparer Virginie Fortin? À personne. Et c’est ce qui fait son charme. La jeune femme a le coffre et le caractère pour aller très loin.

Mariana Mazza et Virginie Fortin présenteront Mazza/Fortin en tournée pendant toute l’année 2014. Consultez le site www.mazzafortin.com pour connaître toutes les dates. Une supplémentaire a été ajoutée à Montréal, au Théâtre St-Denis, le 28 novembre.

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