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Ukraine: les pays baltes caressent l'idée d'une TV russe qui ne soit pas la voix de Moscou

Ukraine: les pays baltes caressent l'idée d'une TV russe qui ne soit pas la voix de Moscou

Inquiets de la crise ukrainienne, les pays baltes, où vivent d'importantes minorités russophones, caressent l'idée de lancer une chaîne de télévision commune en langue russe qui ne soit pas la voix de Moscou.

De nombreux médias en russe existent déjà en Estonie, en Lettonie et en Lituanie, mais la plupart sont des émanations de la Russie et propagent la ligne du Kremlin dans cette région qui a vécu pendant un demi-siècle sous le joug soviétique.

La Lettonie et la Lituanie ont décidé récemment de suspendre les émissions de la chaîne de télévision russe du groupe RTR, l'accusant d'inciter à la haine ethnique, et Vilnius en a même supprimé deux autres.

La crise ukrainienne, la pire entre l'Est et l'Ouest depuis la fin de la guerre froide, est au coeur de cette idée de chaîne de télévision commune en russe et a précipité les discussions des Baltes.

"La crise russo-ukrainienne a conduit à une situation où attendre encore (pour le faire) est inacceptable, étant donné le nombre de chaînes russes diffusées dans les pays baltes", estime Ivars Belte, le patron de la télévision publique lettone LTV.

"Le public russophone dans les pays baltes a besoin d'une chaîne dans une langue qu'il comprend et qui rapporte objectivement les évènements", déclare-t-il à l'AFP.

Le chef de la diplomatie lettone Edgars Rinkevics a souligné sur Twitter que ce serait "un outil efficace pour contrer la propagande officielle russe".

Mais l'idée n'est pas très avancée, remarque Audrius Siaurusevicius, le directeur de la chaîne de TV lituanienne LRT: "Nous avons seulement eu une première discussion".

Alors que 6% seulement des habitants de la Lituanie sont russes contre environ 25% en Estonie et en Lettonie, Vilnius a ouvert la voie en dénonçant les campagnes de désinformation de Moscou.

Pour la présidente lituanienne Dalia Grybauskaite, les chaînes de TV russes mènent "une guerre ouverte de l'information".

"Désinformation constante, provocations et propagande hostile sont devenus une menace pour la sécurité nationale", a-t-elle averti récemment.

En octobre 2013, l'autorité lituanienne de l'audiovisuel avait suspendu une TV russe, la Première Chaîne de la Baltique, après la diffusion d'un documentaire controversé attribuant à la Lituanie la responsabilité d'une attaque meurtrière des forces soviétiques à Vilnius en janvier 1991 quand que cet Etat balte luttait pour retrouver son indépendance.

Plus récemment, Vilnius a suspendu pour trois mois deux chaînes russes contrôlées par Moscou, NTV Mir et RTR.

L'Estonie avait envisagé des mesures similaires, notamment en 2007 après de violentes manifestations de la minorité russe contre le déplacement d'une statue en bronze d'un soldat soviétique dans le centre de la capitale, les médias russes accusant à tort le gouvernement d'avoir détruit ce monument symbolique.

Mais Tallinn rechigne à couper l'antenne aux chaînes russes.

"Combattre la propagande par la propagande conduirait à la guerre froide et ne ferait qu'augmenter le danger", estime Yana Toom, députée estonienne du Parti du Centre, proche de la minorité russe.

Certains s'interrogent sur la viabilité d'une chaîne russe commune aux Baltes.

"C'est une bonne idée, mais après une dure journée de travail dans les chantiers navals de Riga, l'ouvrier russe veut rentrer à la maison et regarder quelque chose de divertissant", estime Ainars Latkovskis, ancien ministre letton de l'intégration sociale.

"Les émissions de divertissement russes disposent d'énormes budgets avec lesquels même une chaîne balte commune ne pourrait pas rivaliser", dit-il à l'AFP.

Anvar Samost, candidat estonien aux élections européennes, a lancé l'idée d'une chaîne de TV russe à l'échelle européenne.

"C'est un défi trop important pour un pays de mettre en place une chaîne de télévision russe qui soit compétitive, mais ce ne le serait certainement pas pour l'Union européenne" a-t-il écrit dans le quotidien Postimees.

L'idée est à "prendre au sérieux", a estimé devant la presse le Premier ministre estonien Taavi Roivas, ajoutant qu'il allait "en parler avec ses homologues des autres pays".

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