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Ukraine: quelles options lors des pourparlers à Genève ?

Ukraine: quelles options lors des pourparlers à Genève ?

Ukraine, Russie, Etats-Unis et Union européenne se retrouvent jeudi à Genève : quelles sont leurs options face à une crise qui pourrait conduire à un éclatement du pays, entre l'est russophone et le centre et l'ouest tournés vers l'Europe ?

Pour Maria Lipman, une analyste au sein du Centre Carnegie à Moscou, la Russie cherche à "obtenir la garantie que l'Ukraine ne va pas faire partie de la sphère d'influence des Occidentaux, alors qu'elle était justement une zone tampon entre l'Occident et la Russie".

A cette fin, estime John Lough, expert au sein de Chatham House, groupe de réflexion britannique sur les relations internationales, Moscou "essaie d'acculer les autorités ukrainiennes à recourir à la force. Les Russes veulent en permanence donner l'impression que Kiev n'a plus d'autorité, que le gouvernement central est incompétent et qu'il attise lui-même les tensions".

"Ce qu'ils souhaitent, c'est une Ukraine dont la souveraineté serait explicitement limitée", abonde Anne de Tinguy, chercheuse à l'Institut d'études politiques de Paris. Selon cette spécialiste citée mardi dans le quotidien français Libération, Vladimir Poutine, avec son projet de fédéralisme, "veut une Ukraine aux ordres".

Pour M. Lough, les Russes cherchent à persuader les Etats-Unis et l'Europe que seule la Russie a "une solution réaliste aux problèmes". "Ils vont souligner le fait que les puissances occidentales ne sont pas préparées à soutenir financièrement l'Ukraine, ils vont dire qu'eux sont prêts à jouer un rôle constructif et qu'ils peuvent trouver un moyen de réduire les prix du gaz, reporter la dette ukrainienne sur le gaz du moment qu'ils obtiennent l'assurance que le gouvernement à Kiev va prendre en compte les intérêts de tous les Ukrainiens".

Augmentant la pression, le chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov, a prévenu mardi que tout ordre "criminel" des autorités ukrainiennes de recours à la force contre les insurgés pro-russes dans l'est de l'Ukraine ferait capoter le dialogue prévu à Genève.

Washington et l'Union européenne ont d'une même voix dit leur inquiétude face aux assauts d'activistes pro-russes dans l'est, appelé à la retenue et plaidé pour le respect de la souveraineté ukrainienne. Le président américain Barack Obama a exhorté son homologue russe à user de son influence pour que les "forces irrégulières" déposent les armes. Réponse en forme de dialogue de sourds de Vladimir Poutine: les accusations d'ingérence sont pures "conjectures" reposant sur des "informations infondées".

Après le rattachement de la Crimée par la Russie, les puissances occidentales avaient décidé de sanctions, notamment financières à l'encontre d'un nombre limité de hauts responsables russes et ukrainiens pro-russes, et diplomatiques en annulant un sommet prévu en juin à Sotchi (Russie).

Selon Anne de Tinguy, l'argument dissuasif qui permettrait aujourd'hui de mettre un terme aux manoeuvres russes serait que l'Union européenne "signifie qu'elle va chercher à réorienter ses importations de gaz. Ce type de décision montrerait qu'elle considère que l'inacceptable a été atteint".

Pour Andy Hunder, qui dirige l'Institut ukrainien basé à Londres, les pays occidentaux peuvent aussi étoffer leurs sanctions avec notamment des interdictions de visas, des gelées d'actifs ou des sanctions similaires à celles imposées à l'Iran en ciblant des secteurs précis.

"Vladimir Poutine craint plus les banques occidentales que les chars occidentaux. Il y a beaucoup d'argent russe sur des places financières comme Londres et si des gens proches de lui sont visés, ils vont commencer à lui dire qu'il doit faire quelque chose", pronostique-t-il.

Outre les actions à l'encontre de la Russie, le fragile pouvoir ukrainien a par ailleurs besoin de l'aide occidentale, notamment en terme de prêts et d'assistance technique pour l'armée, souligne M. Hunder.

Pour John Lough, les Occidentaux n'ont toutefois pas beaucoup de marge de manoeuvre.

"L'Union européenne peut étendre sa liste mais elle ne peut le faire qu'en accord avec la loi, ce qui veut dire qu'elle doit prouver que des personnes-clé ont fomenté des troubles en Ukraine ou ont pris part à l'annexion illégale de la Crimée", détaille-t-il.

Et Marie Lipman de mettre en garde: "L'Ukraine n'a que très peu de pouvoir, mais elle en a assez pour que commence l'effusion de sang. Le risque d'une guerre à grande échelle doit rester sans cesse à l'esprit".

L'Ukraine n'étant pas l'un des 28 pays membres de l'Otan, l'Alliance n'envisage pas d'intervenir militairement même si les violences s'aggravaient dans l'est. L'Otan, que ses statuts obligent à garantir la défense des membres potentiellement les plus exposés, comme les pays Baltes et la Pologne, a préparé des plans, gardés secrets, pour renforcer les mesures de sécurité si la crise s'aggravait.

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