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Attentat d'Omagh: un auteur présumé devant la justice, seize ans après

Attentat d'Omagh: un auteur présumé devant la justice, seize ans après

Seize ans après l'attentat d'Omagh, le plus sanglant du conflit nord-irlandais, un suspect apparenté à l'IRA-véritable a comparu devant un tribunal vendredi, à la satisfaction de ceux qui veulent que le retour à la paix célébré cette semaine encore avec une visite historique du président irlandais à Londres n'éteigne pas l'action de la justice.

Seamus Daly, membre présumé du groupe républicain dissident, a été maintenu en détention après sa comparution devant le tribunal de Dungannon protégé par des policiers en armes.

Il avait été arrêté lundi dans la ville de Newry, et inculpé jeudi pour le meurtre des 29 victimes de l'attentat à la voiture piégée d'Omagh du 15 août 1998, commis quatre mois après la signature des accords de paix dits du Vendredi saint.

Revendiqué trois jours plus tard par l'IRA-véritable, cet attentat, qui avait notamment coûté la vie à une femme enceinte de jumeaux et deux touristes espagnols, était survenu en plein processus de paix.

Immédiatement condamné par tous les partis politiques de l'île d'Irlande, y compris le Sinn Féin, l'aile politique de l'IRA, qui observait un cessez-le-feu depuis 1997, le carnage a suscité une union sacrée, cimentant l'accord de paix au lieu de saboter un processus encore bien fragile.

Mais les circonstances de l'attentat demeurent entourées de zones d'ombre. Les enquêteurs estiment que c'est parce que les auteurs n'ont pas trouvé de place de parking devant le tribunal d'Omagh, leur cible initiale, qu'ils ont garé la voiture piégée dans une rue commerçante, où elle a explosé au milieu des promeneurs et des touristes un samedi après-midi d'été.

Deux appels anonymes avaient donné l'alerte quarante minutes plus tôt. Mais la police affirme que l'emplacement donné pour la bombe était erroné et que, cherchant à faire évacuer les passants, elle n'a fait que les concentrer vers le lieu du drame.

Les proches des victimes continuent aujourd'hui à penser que l'attaque aurait pu être évitée et déplore un manque de communication au sein des forces de police.

La responsabilité de l'attentat n'a jamais été établie au pénal. Seamus Daly, un ancien employé âgé aujourd'hui de 43 ans, a cependant été, avec trois autres militants loyalistes, condamné au civil à verser 1,9 million d'euros de réparation aux familles des victimes en 2009.

Une fois cette peine confirmée en appel en novembre dernier, les familles des victimes ont continué à "faire pression sur la police ainsi que sur les gouvernements britannique et irlandais", selon les mots de Michael Gallagher, qui a perdu son fils unique Aidan dans l'attentat, pour que les responsables de la tragédie soient également traduits devant un tribunal pénal.

La détermination des familles traduit la difficulté à évacuer un passé douloureux. Sur le plan politique, beaucoup de progrès ont été faits depuis 1998, illustrés cette semaine encore par la visite d'Etat historique du président irlandais Michael D. Higgins en Grande-Bretagne.

Mais dans les coeurs, les plaies restent profondes. Jeudi, alors que l'ancien haut-responsable de l'IRA Martin McGuinness, aujourd'hui vice-Premier ministre nord-irlandais, échangeait une poignée de main avec la reine Elizabeth II, Victor Baker, un autre père ayant perdu son fils dans l'attentat d'Omagh, protestait devant le château de Windsor avec la pancarte suivante: "Un terroriste en cravate blanche et queue de pie reste un terroriste. Martin McGuinness, il est temps de dire la vérité."

La soif de justice des familles s'oppose à ceux qui veulent aujourd'hui "tourner la page", en accordant l'immunité aux responsables d'attentats, qu'ils soient républicains ou unionistes.

Fin 2013, le procureur général d'Irlande du Nord, John Larkin, avait proposé d'arrêter les poursuites pour tous les crimes commis avant les accords de paix de 1998, une amnistie applicable aussi bien aux groupes paramilitaires qu'à la police ou l'armée.

En février, un tribunal londonien a ravivé la polémique en accordant l'immunité au suspect n°1 d'un attentat de l'IRA à Hyde Park en 1982. L'épisode a permis de révéler que 187 ex-militants républicains "en cavale" ("on the run") avaient reçu une lettre, négociée dans le cadre de l'accord de paix, leur offrant la garantie ne de jamais être poursuivis par la justice.

jk/dh/pt

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