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Héros de guerre, le capitaine Limbu se bat pour son "honneur" et celui des gurkhas

Héros de guerre, le capitaine Limbu se bat pour son "honneur" et celui des gurkhas

Décoré de la Victoria Cross, Rambahadur Limbu est l'un des plus grand héros vivants de l'armée britannique, mais à 74 ans il se sent "déshonoré" par la manière dont sont traités les soldats gurkhas comme lui.

Légèrement courbé sur sa canne devant le Parlement de Westminster, Rambahadur Limbu se dit que c'est peut-être la dernière fois qu'il revient à Londres. "Je sais que je ne vais pas vivre très vieux", murmure le guerrier népalais, retiré dans son village reculé du Damak, près de la frontière du Sikkim, auprès de ses sept petits-enfants.

Sa santé décline, il souffre de la goutte, marche péniblement et a peur de ne pas être de la prochaine réunion en octobre de la "Victoria Cross and George Cross Association".

Mais un dernier combat lui tient à coeur, celui pour lequel il milite inlassablement depuis tant d'années: que les Gurkhas, soldats recrutés au Népal pour servir sa Majesté, aient droit à la même retraite et aux mêmes prestations sociales que leurs compagnons d'armes britanniques, avec lesquels ils combattent côte à côte depuis 200 ans.

Environ 200.000 Gurkhas ont combattu pour la Grande-Bretagne pendant les première et deuxième guerres mondiales. Réputés pour leur vaillance - leur devise est "plutôt mourir que vivre en lâche" - ils ont continué à servir, aux Malouines, au Kosovo, en Irak ou en Afghanistan.

Mais le montant de leur retraite est calculée sur le coût de la vie au Népal et s'avère donc bien inférieure.

Mercredi, une commission d'enquête, qui se penche sur les moyens d'améliorer le sort des Gurkhas, se réunissait une dernière fois à Londres avant de rendre ses conclusions dans quelques mois. Rambahadur Limbu a effectué le déplacement en espérant que sa déposition permettra de rendre justice aux Gurkhas rendus à la vie civile.

La Victoria Cross est la plus haute distinction militaire britannique, attribuée pour des actes de bravoure exceptionnelle, face à l'ennemi.

L'honneur est tellement rare qu'ils ne sont que quatre aujourd'hui encore en vie à porter cette croix en bronze, frappée de l'écusson royal.

Le capitaine Limbu a gagné la sienne à l'âge de 26 ans, le 21 novembre 1965, dans la jungle de Sarawak sur l'île de Bornéo, durant le conflit frontalier entre l'Indonésie et la Malaisie.

Ce jour-là, sous le feu constant des mitrailleuses lourdes, il est reparti vers l'avant à deux reprises pour secourir deux camarades, finalement décédés, avant de tuer quatre ennemis et forcer le camp adverse à abandonner ses positions.

"C'était tellement intense que je n'ai pas eu peur. Je me disais seulement qu'il fallait donner tout mon possible pour arrêter l'ennemi et mettre nos blessés en sécurité", confie-t-il à l'AFP.

Pour autant, Rambahadur Limbu ne se considère pas comme un héros. "Ceux qui sont morts l'étaient plus que moi." Et la "Victoria Cross" s'accompagne aujourd'hui d'un goût amer qui n'a fait que s'accentuer avec les années.

"Pendant les dix-huit premières années de mon service, j'ai pensé que les Britanniques étaient les meilleurs amis qu'on puisse avoir. Mais ensuite je n'ai ressenti que de la discrimination dans chaque aspect de la vie militaire, que ce soit la nourriture, l'hébergement, le salaire, tout", dit-il.

Le capitaine Limbu a pris sa retraite en 1985.

Sa première épouse, décédée le lendemain de son retour de la jungle, lui a laissé deux enfants. Aujourd'hui il a sept petits-enfants qui, dit-il, "prennent soin de moi et de ma petite ferme".

A cause de la Victoria Cross, "tout le monde pense que je mène grande vie mais en réalité elle est très modeste". "N'est-ce pas une insulte à mon égard et à l'égard de ma bravoure?", s'interroge-t-il. "Que suis-je supposé faire de cet honneur lorsqu'il ne m'offre pas le droit à une vie digne?"

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