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Seigneurs de guerre et clans pèsent lourd dans la présidentielle afghane

Seigneurs de guerre et clans pèsent lourd dans la présidentielle afghane

Pour remporter la présidentielle afghane, les candidats n'ont pas hésité à nouer des alliances hétéroclites entre différents clans. Un signe que le pays reste divisé par les lignes de faille tribales.

Un reportage de Marie-Ève Bédard, envoyée spéciale en Afghanistan

Sur une colline qui domine Kaboul, le soldat Wazir Mohamed garde le tombeau de l'ancien président afghan Burhanuddin Rabbani. Assassiné en 2011, ce dernier dirigeait le Conseil pour la Paix, un organisme qui devait permettre la réconciliation avec les talibans. Or, encore aujourd'hui, cet objectif demeure hors d'atteinte.

Wazir fait partie d'un groupe de 300 soldats de l'Armée nationale afghane responsable du secteur. L'endroit est populaire auprès des Afghans qui viennent y admirer la vue spectaculaire sur Kaboul et les sommets enneigés de la chaîne de montagnes Hindu-Kush.

100 $ de l'armée, 200 $ du seigneur de guerre

En prenant le thé, Wazir raconte qu'en plus de son salaire mensuel de l'armée - 100 $ américains -, il reçoit 200 $ de la poche d'Abdoul Rachid Dostum, l'homme fort des Ouzbeks. Considéré comme un seigneur de guerre brutal, ce dernier est autant admiré que craint.

« Je porte les armes pour le général Dostum depuis 20 ans. Il est très bon pour nous, il s'occupe de ses hommes », explique le soldat.

L'entrée de Wazir Mohamed dans l'armée nationale n'a en rien altéré cette fidélité. Ses ordres, il les reçoit toujours de Rachid Dostum.

Une double allégeance qui illustre bien toute la complexité de mettre sur pieds des services de sécurité centraux dans un pays en guerre depuis plus de trente ans.

Les divisions persistent

Les nombreuses milices afghanes ont été en grande partie absorbées par la police et l'armée nationale, mises sur pied par la communauté internationale à grands frais. Et ce, avec l'espoir de démobiliser l'arsenal d'armes en circulation dans le pays depuis leur arrivée et de mettre fin aux conflits interethniques sanglants.

Mais quand ça tourne mal, les Afghans ont toujours le réflexe de s'en remettre à leurs commandants locaux, à leurs seigneurs de guerre.

La course à la présidence, une élection où huit candidats se disputent la succession à Hamid Karzaï, n'échappe pas à cette logique des clans. Les affiches électorales des différents candidats ont un point commun : aux côtés du candidat principal, on retrouve souvent la photo de ces puissants guerriers.

Ce retour à l'avant-scène politique est peut-être le signe que les choses n'ont pas beaucoup changé en Afghanistan.

Un passé encoure tabou

En 2007, le parlement afghan a voté une loi décrétant une amnistie pour les crimes commis dans les guerres passées. Il semble que l'Afghanistan ne soit pas prête à ressasser un passé douloureux, ce qui fait qu'aucun de ses hommes ne risque de devoir un jour répondre des gestes qu'ils ont posés.

Wazir Mohamed, le fidèle soldat de Rachid Dostum, votera bien sûr pour Ashraf Ghani. L'air un peu gêné, il avoue ne savoir ni lire ni écrire. Mais il sait qu'il doit choisir l'image du livre, symbole de l'éducation choisi par la campagne de Ashraf Ghani, pour permettre aux illettrés, plus de la moitié de la population adulte en Afghanistan, d'exercer leur droit de vote.

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