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«Directions», de Gaëtan Essiambre : trouver son propre son

«Directions», de Gaëtan Essiambre : trouver son propre son
Courtoisie

On connaît Gaëtan Essiambre sans réellement savoir qui il est. De tout temps auteur-compositeur, l’homme a signé les musiques de plusieurs succès télévisuels d’ici, dont Lance et compte, Un gars, une fille, Annie et ses hommes et Salut, Bonjour! Il a aussi collaboré avec plusieurs humoristes, comme la bande de Rock et Belles Oreilles, Mario Jean, Jean-Michel Anctil et Les Denis Drolet.

Essiambre n’avait pas proposé de matériel personnel depuis le milieu des années 1980. À l’époque, ses chansons Tcha-tcha-coung et Le droit de rêver s’étaient hissées au sommet des palmarès radio. Il nous revient aujourd’hui avec Directions, un opus aux accents pop-rock, folk et country, dont le premier extrait, l’accrocheuse Va donc savoir, expose avec lucidité les contradictions des êtres humains, que ceux-ci se trouvent aux plus éloignées extrémités de la planète ou dans la même pièce d’une même maison. L’artiste nous a parlé de sa démarche.

Gaëtan, qu’est-ce qui vous a convaincu de faire le saut et de lancer un nouvel album sous votre propre nom, après toutes ces années à composer pour d’autres et pour la télévision?

«J’ai sorti mon mini-album de quatre chansons, sur lequel se trouvaient Tcha-tcha-coung et Le droit de rêver, en 1985. Ensuite, sans m’étaler sur les raisons, j’ai orienté ma carrière sur la musique à l’image pour la télé. Or, après avoir passé près de 25 ans à me consacrer à cette facette du métier, je considérais en avoir fait le tour, et l’appel de la chanson est revenu naturellement. Pendant toutes ces années de composition pour l’écran, je n’ai pas cessé d’écrire des chansons en parallèle.»

Qu’est-ce qui diffère dans le fait d’écrire pour soi, pour d’autres artistes ou pour un projet?

«Quand on écrit de la musique pour l’image, il y a déjà un concept, une direction. On s’assoit avec les producteurs, les réalisateurs, et on définit l’enveloppe musicale de l’œuvre audiovisuelle. On développe des thèmes à partir des caractères des personnages, des situations. Quand on écrit des chansons, tout part de soi. À la base, il faut avoir quelque chose à dire, un besoin imminent de communiquer.»

Avez-vous été plus - ou moins - exigeant envers vous-même pour Directions que vous ne l’avez été pour vos autres projets?

«Je dirais que c’est la même exigence. Il est important d’être content du résultat, qu’il soit original, bien fait et, surtout, qu’il dise quelque chose aux gens qui l’écoutent. Pour moi, si une chanson est un trip personnel thérapeutique, elle doit rester sur les tablettes.»

Est-ce que Directions est une entreprise plus intimidante, parce que personnelle? Aviez-vous plus de pudeur en y travaillant, plus de réserves?

«La première chose qui vient, c’est d’assumer la composition, les propos et l’interprétation. Tu te retrouves seul devant un micro; tu n’es plus derrière une production. Tu parles directement aux gens par tes chansons, et ils peuvent aimer ou ne pas aimer. Mais, quand tu as quelque chose à dire, en général, il se trouve des gens pour écouter. Je suis très heureux, lorsque je chante mes chansons en public. C’est une confirmation que je suis à la bonne place.»

Quelles sont les thématiques qui vous ont guidé pour l’écriture de Directions? Quels sujets teniez-vous absolument à aborder?

Vous semblez aimer parler de l’être humain sous toutes ses facettes…

«Je m’inspire de la vie qui m’entoure, des gens, des situations. Il y a des sujets légers, et d’autres, plus sérieux. Il faut être contemplatif, se permettre un angle de vision différent. Sortir un peu du continu, un peu comme dans la chanson des Beatles, The Fool on the Hill. Aussi, il est impératif pour moi d’écrire simplement. Je fais attention à la métaphore, car elle demande une analyse et, par le temps qu’on comprend le sens d’une phrase, la suivante est déjà passée et on perd souvent le fil. J’essaie d’être original, autant dans les sujets que dans la façon de les aborder. Je n’écrirai jamais des phrases telles que “Pour toi j’irai décrocher la lune” ou “Nous ferons l’amour jusqu’au petit jour”!»

Après toutes ces années de carrière, avez-vous encore des artistes qui vous inspirent?

«J’aime ces artistes qui ne campent pas dans un style défini, qui créent leur propre environnement sonore : Peter Gabriel, Sting, Tent Reznor (Nine Inch Nails), Frank Zappa, Radio Head, les Beatles. Il m’est difficile d’écouter tout du long un album de blues ou de musique latine sans me lasser à la sixième trame! J’apprécie beaucoup la fonction “Aléatoire” sur mon telephone intelligent!»

Vous qui avez touché à plusieurs aspects du métier, vous êtes bien placé pour juger des changements qui ont transformé l’industrie de la musique, au Québec, au fil des ans. Comment définiriez-vous celle-ci, présentement ?

«S’il est plus facile qu’auparavant de faire une production audio grâce à la technologie, il est plus difficile de faire sa place comme artiste vu le grand nombre d’œuvres qui sont présentées quotidiennement. Je me questionne sur les programmes de subventions qui permettent de produire sans trop de coûts ; si les producteurs avaient à sortir plus d’argent de leur poche, peut-être choisiraient-ils de présenter des artistes plus matures, plus prêts. Et il en irait de même pour les créateurs, qui auraient à livrer un meilleur produit. Je trouve triste de voir toutes ces productions soi-disant “épurées” qui, pour moi, sous-tendent un manque de connaissances musicales et de travail de la part des créateurs.»

«En province, 75% des spectacles qui se promènent sont composés d’un ou deux musiciens. Avec, la plupart du temps, un accompagnement de guitare sèche 101. En tant que spectateur, tu sais d’avance à quoi t’attendre. Souvent, un manque de mise en scène et une attitude à la bonne franquette font qu’il n’y a plus de “spectaculaire” dans le spectacle. L’expression “prestation publique”, selon moi, définit mieux la plupart des présentations qui nous sont proposées. Pas étonnant que les salles de spectacles aient de la difficulté à attirer les audiences.»

L’album Directions est présentement en magasin. Gaëtan Essiambre donnera des spectacles partout au Québec cet été. Pour connaître les dates, on consulte son site web.

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