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Vol MH370: la Chine, modèle d'opacité, se fait le chantre de la transparence

Vol MH370: la Chine, modèle d'opacité, se fait le chantre de la transparence

La Chine fustige la Malaisie pour son manque de transparence après la disparition du vol MH370, mais l'indignation de Pékin contraste avec sa propre tendance à l'opacité sur les catastrophes survenant sur son propre territoire.

Le Premier ministre chinois Li Keqiang a sèchement demandé lundi à son homologue malaisien de fournir des informations avec "ponctualité, précision et exhaustivité" sur le Boeing de Malaysia Airlines disparu il y a dix jours, avec à son bord 239 personnes, dont 153 Chinois.

Depuis une semaine, les médias d'Etat ont multiplié les éditoriaux virulents, tançant les autorités malaisiennes pour leur manque de transparence, puis pour leur annonce tardive que le changement de cap de l'avion avait été une manoeuvre "délibérée", ce qui orientait les recherches dans une toute autre direction.

La Chine peine pourtant elle-même à jouer le jeu de la transparence, comme en a témoigné lundi un point-presse régulier du ministère chinois des Affaires étrangères.

Est-ce que la Chine exclut la possibilité que l'appareil soit entré dans son espace aérien ? L'enquête s'intéresse-t-elle à des passagers chinois ? Les Chinois mènent-ils des recherches en mer seulement ou aussi sur terre ? Et quid des régions occidentales du pays, Xinjiang et Tibet, figurant sur l'une des trajectoires possibles de l'avion ?

A cette salve de questions de la presse étrangère, Hong Lei, porte-parole du ministère, a refusé obstinément de répondre, se contentant de rappeler que Pékin "collaborait activement avec la Malaisie".

Ce n'est que mardi qu'une brève dépêche de l'agence officielle Chine nouvelle annonçait que des recherches en territoire chinois "avaient commencé" et qu'aucun élément de l'enquête n'impliquait des passagers chinois.

Mais là encore, Huang Huikang, ambassadeur de Chine en Malaisie cité dans la dépêche, n'a pas voulu livrer de plus amples détails: "Il ne serait pas convenable que cette enquête (criminelle) se fasse à la lumière du jour".

Et lors d'un nouveau point presse mardi, Hong Lei s'est contenté de confirmer les maigres annonces de Chine nouvelle, sans apporter aucune précision supplémentaire.

Certes, les autorités chinoises avaient diffusé la semaine dernière des images satellites d'objets flottants repérés en mer --mais sans expliquer pourquoi ces clichés étaient rendus public plus de trois jours après avoir été collectés.

Quant aux médias chinois, ils sont priés de s'en tenir strictement aux dépêches de Chine nouvelle, selon des sources du milieu --un contrôle que la Fédération internationale des Journalistes a jugé "profondément regrettable".

Mais si elle contraste avec les reproches véhéments faits à la Malaisie, la réticence de la Chine à dévoiler elle-même des informations n'étonne guère les experts, l'incident, pour les pays de la région, revêtant aussi un caractère géopolitique sensible.

Les opérations de recherche des premiers jours en mer de Chine du Sud évoquaient "un vaste déploiement en temps de paix de moyens militaires qui s'avéreraient critiques en cas de conflit", observe James Brown, analyste défense du Lowy Institute for International Policy à Sydndey.

Autant dire que chacun a "scruté avec beaucoup d'attention les capacités et performances des autres, en prenant soin de ne pas exposer ses propres vulnérabilités", a-t-il ajouté.

La Chine se distingue tout autant par son opacité sur les incidents et catastrophes survenant sur son territoire, qu'elle cherche instinctivement à étouffer, renforçant censure et pression sur les médias.

Après le séisme de 2008 au Sichuan, où l'effondrement d'écoles avait provoqué la mort de milliers d'enfants, des activistes s'étaient interrogés sur la piètre qualité des bâtiments scolaires. Résultat: arrestations et tabassages des citoyens trop curieux.

Scandale trois ans plus tard: après un accident de train meurtrier près de Wenzhou (est), un wagon entier avait été précipitamment enterré sur place sous prétexte de "protéger les secrets technologiques du pays".

Et en octobre dernier, les médias ont été enjoints de ne pas publier d'informations indépendantes sur un attentat place Tiananmen à Pékin, ainsi que sur une attaque où quelque 170 personnes ont été poignardées au Yunnan début mars.

Pékin "utilise une définition vague, tautologique et extrêmement large de ce qui constitue un +secret d'Etat+", pour réduire au silence les voix dissidentes ou critiques, sur la politique, l'environnement et autres sujets, selon l'ONG basée aux Etats-Unis Human Rights in China.

Une situation qui n'échappe pas à nombre d'internautes chinois, qui raillaient ces jours-ci la pusillanimité des médias officiels.

"La Malaisie et la Chine ont simplement mis au jour leur bureaucratie irresponsable, en délivrant des informations inexactes et décousues" tandis que les médias d'Etat "étaient à la traîne derrière les médias étrangers", ironisait un usager du site de microblogs Sina Weibo.

fms-jug/abk

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