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«Quai d'Orsay», la diplomatie française au vitriol (ENTREVUE)

«Quai d'Orsay», la diplomatie française au vitriol (ENTREVUE)

Bertrand Tavernier fait sa première incursion dans la politique française avec Quai d'Orsay présentement en salles, film survolté et verbeux qui nous fait entrer dans la diplomatie française, un milieu complètement chaotique que le réalisateur filme avec beaucoup de plaisir.

Le long-métrage est une adaptation de la bande dessinée politique éponyme signée Christophe Blain et Antonin Baudry et dresse aussi le portrait d'un des hommes politiques français les plus spectaculaires de sa génération : Dominique De Villepin qui avait refusé d'appuyer les Américains lors de la Guerre en Irak de 2003.

Nous avons rencontré le cinéaste lors d'une rencontre à Paris. Une trentaine de minutes où il nous a aussi parlé de son amour du cinéma.

Quelle est la genèse de Quai d'Orsay?

Un ami m'a fait le cadeau de la bande dessinée qui venait de sortir en me disant que ça pourrait m'intéresser. Je l'ai lue et le lendemain j'appelais mon producteur en lui disant que je voulais avoir les droits. Je trouvais la bande dessinée absolument formidable.

Le côté comique était-il déjà présent dans la bande dessinée?

Oui. Il y a des scènes extrêmement drôles, mais il y a une justesse incroyable. L'auteur Arthur Vlaminck nous a dit : tout est vrai. Toutes les situations, il les a vécues! Et il travaille toujours au Quai D'Orsay d'ailleurs.

Le ministre des Affaires étrangères est à ce titre toute une figure...

Il est un personnage gigantesque, très complexe. Extravagant, délirant, épuisant, incompréhensible. Mais il a des qualités qui sont importantes pour un ministre : il a une vision, il ne change jamais là-dessus. Sur la politique générale du ministère, il ne change également jamais. Il le dit rapidement : il ne faut pas suivre les néoconservateurs Américains, il n'y a pas d'armes de destruction massive. Il ne faut pas aller en Irak.

En même temps, on a l'impression que le film est une grosse caricature...

En effet, c'est souvent l'impression des gens. Mais plusieurs ministres des affaires étrangères ont vu le long-métrage et l'ont trouvé d'une immense justesse. Hubert Védrine, Alain Juppé ou Laurent Fabius...

Et le principal intéressé, Dominique de Villepin?

Il m'a dit que c'était très juste. Mais il a trouvé que c'est en dessous de la vérité! Vous imaginez? On pense souvent que j'ai fait un film caricatural, mais le principal intéressé trouve que ce n'est pas assez déglingué!

Sur de Villepin, il faut dire que sa vision était forte. C'était une vision gaullienne. Si on compare avec Tony Blair qui a menti à son peuple. John le Carré a d'ailleurs montré que les services secrets britanniques étaient à la solde des Américains.

Avez-vous aimé plonger dans cette atmosphère?

J'ai découvert un ministère où il y a des gens dans l'ombre. Et ce sont de véritables serviteurs de l'État. Le personnage que joue Niels Arestrup, il est un véritable serviteur de l'État.

Vouliez-vous dénoncer la guerre en Irak?

Oui, mais en même temps, je voulais faire rire. Certains ont réussi à faire des sujets très drôles avec des thèmes graves. Ernest Lubitsch l'a fait. Billy Wilder a réalisé des comédies à propos du mur de Berlin. On peut à travers la comédie montrer en arrière-plan des choses graves. Par exemple, la toile de fond de plusieurs films de Frank Capra, c'est le chômage.

Vous avez ajouté des éléments comme le discours de De Villepin à l'ONU...

Je voulais montrer que tout a été écrit dans le chaos. Et c'est un discours formidable. C'est aussi une fable sur la fabrication d'un film : ça se fait également dans un chaos terrible. Finalement, les plans se suivent. Il y a une histoire et ça finit par passer.

Pour le casting, comment cela s'est-il passé?

Je fais le casting moi-même. Je voulais travailler avec Anaïs Demoustier, Raphaël Personnaz, Niels Arestrup, Bruno Raffaelli et Thierry Lhermitte. Je me suis amusé énormément et les acteurs aussi. Niels m'a dit : vous ne pouvez pas savoir à quel point je vous suis reconnaissant. Vous êtes le seul à avoir vu que je pouvais jouer dans une comédie.

Et comment avez-vous aimé travailler avec lui?

J'ai été un peu intimidé par lui la première fois. Et en fait, il a été adorable. Il m'avait posé des exigences. Il ne voulait pas déjeuner avec l'équipe. Il voulait toujours être seul, car il savait que c'était un rôle difficile pour lui. À la première prise, il était hallucinant. Il n'était pas aimable de manière générale avec les autres acteurs, mais il était parfait. Donc le rapport se faisait dans le jeu. Il ne se faisait pas dans la vie sociale. Mais c'est la finalité qui est importante. Ce qui se passe à la cantine, on ne le retrouve pas sur l'écran.

L’entrevue a été réalisée grâce à l’invitation des Rendez-vous d’Unifrance.

Quai d’Orsay – Axia Films – Comédie satirique – 114 minutes – Sortie en salles le 14 mars 2014 – France.

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