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Brésil: Thuram "surpris par la violence de la division dans la société"

Brésil: Thuram "surpris par la violence de la division dans la société"

Venu à Rio de Janeiro pour échanger sur la question du racisme, Lilian Thuram est "surpris par la violence de la division dans la société brésilienne", a-t-il dit à l'AFP dans un entretien exclusif dans la nuit de samedi à dimanche.

Q: Qu'avez-vous appris?

R: "J'ai appris sur l'histoire brésilienne et les personnages-clefs qui pourraient peut-être, par leurs parcours, rapprocher des personnes. J'ai été surpris par la violence de la division dans la société brésilienne. En France on a parfois une image idéaliste du Brésil, où tout le monde vit bien ensemble, est métissé, danse la samba, mais ce n'est pas le cas. Entre le centre-ville et les favelas, c'est incroyable, on est dans deux mondes différents. Quatre-vingt-dix pour cent de la population est afro-brésilienne, mais quand on regarde les journaux, on voit bien qu'il y a des absents et que prédominent les personnes de couleur blanche. Là, on voit bien la hiérarchie qui existait et existe encore aujourd'hui. On ne s'attend pas à ça en venant au Brésil".

Q: Le racisme relève-t-il de l'éducation?

R: "Oui. Chacun de nous devrait être conscient qu'il est porteur de l'histoire du monde, l'histoire de cette hiérarchie des couleurs de peau. Ces préjugés nous traversent. Quand j'étais joueur, j'avais demandé à des coéquipiers brésiliens pourquoi il y avait des personnes noires au Brésil, ils ne le savaient pas. Je leur avais demandé s'il y avait du racisme au Brésil, ils m'avaient dit que non. Si on veut dépasser un problème, il faut être conscient de ce problème. Si on pense que dans nos sociétés il n'y a pas de sexisme, on ne va pas comprendre les hiérarchies entre hommes et femmes. C'est exactement la même chose pour le racisme. Chacun de nous est issu d'une culture raciste".

Q: Pourriez-vous rejoindre les manifestants qui auraient préféré que les investissements pour les stades soient consacrés à la santé et à l'éducation?

R: "Je ne suis pas Brésilien, donc je ne rejoindrais pas les manifestants, mais je les comprends totalement. Quand on vit dans un pays avec des problèmes de santé et d'éducation, il y a des personnes pour qui ces priorités passent avant la construction des stades. Ca me paraît une évidence que ces personnes-là dénoncent les sommes injectées dans les stades plutôt que dans les hôpitaux".

Q: Vous disiez que dans les écoles, certains enfants noirs se revendiquaient blancs, et le rappeur blanc MC Smith revendique sa négritude...

R: "Quand on le regarde, on voit qu'il est afro-brésilien, c'est-à-dire qu'à un moment donné dans sa généalogie, il y a eu un Africain. Dans l'histoire de l'esclavage, on a inventé les hommes blancs et les hommes de couleur. S'il y a une goutte de sang noir, la personne sera noire. On a pris l'habitude pendant des siècles de dire qu'il y avait les Blancs et les non-Blancs. Ces Brésiliens qui ont vécu cette histoire dans leur chair demandent de changer de conception, qu'on voie les gens en dehors de leur couleur de peau".

Q: Comment sentez-vous l'équipe de France?

R: "Il s'est passé quelque chose de très important contre l'Ukraine, notamment avec le public. J'espère que l'équipe de France aura un très bon résultat en Coupe du monde. Elle a de très bons joueurs et une très bonne équipe, c'est une évidence, mais c'est le cas de beaucoup de pays..."

ybl/ol/gv

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