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L'armée ukrainienne en position défensive en Crimée

L'armée ukrainienne en position défensive en Crimée

L'Ukraine a placé son armée en état d'alerte mais ses troupes, dans un piètre état général, ont pris soin de rester en position défensive en Crimée, où elles sont inférieures en nombre face aux forces russes.

Le Parlement russe a donné samedi le feu vert pour une intervention des forces armées russes en Ukraine. En Crimée, des milliers de soldats aux uniformes dépourvus d'identification, mais dont tout indique qu'ils agissent pour le compte de Moscou, bloquent les militaires ukrainiens dans leurs casernes.

Ils n'auraient pas eu à venir de bien loin: la Crimée, conquise au XVIIIe siècle par la Russie sur les Turcs, faisait partie de la Russie sous l'URSS et n'a été rattachée à l'Ukraine qu'en 1954. Et elle abrite toujours la flotte russe de la mer Noire à Sébastopol (quelque 20.000 hommes), ses fusiliers marins et leurs véhicules blindés, dans le cadre d'un accord entre les deux pays.

Kiev a réagi en appelant à la mobilisation des réservistes, accusant la Russie de lui avoir "déclaré la guerre" et d'avoir entamé une "invasion armée".

Dans les faits, le contrôle d'une bonne partie de la Crimée échappe déjà aux autorités ukrainiennes. Les soldats ukrainiens stationnés dans la péninsule se sont d'ailleurs bien gardés de réagir, leur commandement expliquant vouloir éviter toute "provocation", qui pourrait servir de justification à une invasion russe de grande ampleur.

Kiev a déjà subi une défection de taille: le commandant fraîchement nommé de la marine ukrainienne, l'amiral Denis Berezovski, a annoncé dimanche qu'il prêtait allégeance aux autorités pro-russes de Crimée, au cours d'une conférence de presse tenue... à l'état-major de la flotte russe à Sébastopol.

Les officiers placés sous ses ordres sont sommés de choisir leur camp, entre la fidélité au drapeau ukrainien et l'hommage aux autorités de Crimée.

Sur le papier, le combat annoncé évoque celui de David contre Goliath: "la Russie compte six fois plus de soldats que l'Ukraine et ses avions et ses hélicoptères sont de modèles plus récents", rappelle Valentin Badrak, directeur du Centre de recherche sur l'armée, la démilitarisation et le désarmement à Kiev.

Face à l'armée russe qui compte 845.000 soldats, les forces ukrainiennes n'ont que 130.000 hommes, dont la moitié sont des conscrits, dotés d'un matériel souvent dépassé. "Les forces armées ont souffert d'un financement inadéquat (...). Elles continuent à utiliser un équipement datant de l'époque soviétique", souligne le rapport 2014 de l'Institut international des études stratégiques (IISS), qui relève aussi des défaillances dans la maintenance du matériel et le faible nombre d'heures de vol des avions.

Le nouveau Premier ministre ukrainien Arseni Iatseniouk a d'ailleurs dénoncé dimanche le "sabotage délibéré" des capacités de défense du pays par le précédent régime, tout en assurant que le gouvernement allait "trouver la possibilité de financer les forces armées ukrainiennes à travers cette période très difficile".

En sus de ces carences matérielles, le moral de l'armée ukrainienne, restée à l'écart de la crise politique qui a abouti au renversement du président Viktor Ianoukovitch, est incertain.

L'ancien ministre de la Défense Anatoli Gritsenko a ainsi jugé humiliante la situation en Crimée, appelant le président et le gouvernement à choisir entre la reddition et le combat.

"Nos militaires bloqués dans leurs casernes par des soldats qui leur demandent de rendre leurs armes attendent des ordres précis. Si on ne leur en donne pas, leur moral va chuter car ils vont croire qu'on les abandonne", a-t-il écrit sur son blog.

Quelque 15.000 soldats ukrainiens sont théoriquement stationnés en Crimée. Mais la plupart ne semblaient pas se trouver dans leurs casernes lors de l'arrivée des mystérieux commandos armés pro-russes.

Et Kiev accuse Moscou d'avoir transporté par voie aérienne vendredi et samedi quelque 6.000 soldats supplémentaires en Crimée.

Au-delà de la Crimée, certains s'inquiètent déjà de la perspective d'une entrée de soldats russes dans l'est russophone de l'Ukraine, et jusqu'à Kiev.

"Nous allons nous procurer des armes à feu pour nous tenir prêts à affronter les troupes d'occupation russes", affirme ainsi Artem Skoropadski, porte-parole de Pravy Sektor (Secteur droit), groupe en première ligne dans les affrontements contre les policiers à Kiev pendant la contestation.

Ce mouvement nationaliste paramilitaire revendique l'héritage de l'Armée insurrectionnelle ukrainienne, une formation controversée qui s'est battue pour l'indépendance de l'Ukraine contre les Soviétiques, la résistance polonaise et les nazis pendant la Seconde guerre mondiale. Et dont les derniers maquis n'ont été anéantis par l'Armée rouge qu'au milieu des années 1950.

thm/nm/gg

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