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Nouvel épisode dans la brouille avec Paris: Rabat suspend la coopération judiciaire

Nouvel épisode dans la brouille avec Paris: Rabat suspend la coopération judiciaire

La soudaine querelle diplomatique entre le Maroc et la France, née de plaintes à Paris visant le patron du contre-espionnage marocain, a connu un rebondissement mercredi avec l'annonce par Rabat de la suspension de tous les accords de coopération judiciaire.

"Il a été décidé de suspendre l'exécution de toutes les conventions de coopération judiciaire entre les deux pays, pour en évaluer l'impact et les actualiser dans le but de remédier aux dysfonctionnements qui les entachent", a affirmé le ministère marocain de la Justice dans un communiqué publié mercredi soir.

Il a également annoncé le "rappel du magistrat de liaison marocain en France en attendant des solutions garantissant le respect mutuel total des accords" bilatéraux.

Pour justifier cette décision, ce ministère, détenu par l'islamiste Mustapha Ramid, évoque "l'apparition de nombreux dysfonctionnements et lacunes dans (les) conventions" entre Paris et Rabat.

Il fait notamment référence à la descente de police effectuée jeudi dernier à la résidence de l'ambassadeur du Maroc en France, en lien avec les plaintes visant le patron du contre-espionnage marocain, mais mentionne aussi d'autres griefs.

Le magistrat de liaison marocain à Paris a effectué des "démarches" "en vue d'obtenir les éclaircissements nécessaires auprès des autorités judiciaires françaises" sur le "non-respect" des conventions, et ce "vainement durant trois jours", déplore le ministère.

Cela "dénote un comportement que les autorités judiciaires marocaines n'ont jamais observé dans leur coopération avec leurs homologues françaises", poursuit-il, avant de fustiger des "comportements" constituant "une atteinte grave aux règles élémentaires de la coopération entre les deux pays".

Les relations entre le Maroc et la France, deux proches alliés, connaissent un sérieux coup de froid depuis une semaine et le dépôt de plaintes à Paris par une ONG --pour "torture" et "complicité de torture"-- contre le Directeur général de la surveillance du territoire (DGST), Abdellatif Hammouchi.

Le royaume s'est en particulier montré furieux de la venue ce jour-là de sept policiers à la résidence de son ambassadeur pour notifier à M. Hammouchi --dont la présence à Paris avait été rapportée-- une convocation émanant d'un juge d'instruction, sans passer par les canaux diplomatiques.

Rabat a qualifié de "sans fondement" les accusations portées contre le patron de la DGST, et exprimé son courroux en convoquant l'ambassadeur de France et en reportant unilatéralement une visite d'un officiel français.

Ces tensions ont été aggravées par la médiatisation de propos sarcastiques sur le royaume prêtés à l'ambassadeur de France à l'ONU.

Le Maroc est une "maîtresse avec laquelle on dort toutes les nuits, dont on n'est pas particulièrement amoureux mais qu'on doit défendre", aurait affirmé, en 2011, le diplomate, selon l'acteur espagnol Javier Bardem, producteur d'un documentaire sur le Sahara occidental et bête noire de Rabat.

Le Sahara occidental, ex-colonie espagnole contrôlée par le Maroc mais revendiquée par des indépendantistes soutenus par l'Algérie, est le sujet le plus sensible qui soit pour Rabat. A l'ONU, Paris est un soutien traditionnel du royaume sur le Sahara.

Mardi, plusieurs milliers de Marocains ont manifesté, dans le calme, devant l'ambassade de France à Rabat pour exprimer leur vive désapprobation.

Le Quai d'Orsay a démenti que de tels propos aient été tenus, et la situation avait semblé s'apaiser dans le sillage d'un appel téléphonique du président François Hollande au roi du Maroc, Mohammed VI, lundi soir.

Mercredi, le chef de la diplomatie française, Laurent Fabius, a dit regretter "le tour" pris par cette brouille.

"Effectivement il y a eu ces jours derniers une certain tension", a déclaré le ministre, qui s'exprimait publiquement pour la première fois sur le sujet.

"Nous avons donné des explications utiles, regretté des incidents qui ont pu se produire, déploré qu'on puisse donner à cette situation un tour qu'elle ne devait pas avoir et j'espère bien que tout cela appartiendra, si ce n'est déjà fait, au passé", a ajouté M. Fabius, précisant avoir parlé avec son homologue marocain, Salaheddine Mezouar.

La France est le premier partenaire économique du Maroc, et le premier investisseur. Les liens humains et culturels sont également très denses entre les deux pays.

gk/cco

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