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Désespoir dans un quartier de Bujumbura ravagé par les intempéries

Désespoir dans un quartier de Bujumbura ravagé par les intempéries

Il pleuvait très fort depuis des heures à Bujumbura, dans la nuit de dimanche à lundi. Après une longue journée aux champs, Espérance Niyonzima dormait avec son bébé d'à peine une semaine lorsqu'un choc terrible l'a réveillée. Trop tard pour l'enfant.

"Une grosse vague m'a sortie de la maison et jetée dehors avec mon enfant", raconte la jeune femme de 21 ans d'une voix monocorde. "Mon enfant a été emporté, je n'ai pas pu le sauver (...) On a retrouvé son corps loin, au bas de la colline" sur laquelle est situé le quartier de Gatunguru, à la périphérie nord-est de Bujumbura.

Gatunguru est l'une des zones les plus touchées par les pluies diluviennes qui se sont abattues sur la capitale du Burundi et ses environs dans la nuit de dimanche à lundi, faisant au moins 60 morts - en grande majorité des enfants - et 81 blessés, selon la Croix-Rouge.

Le bilan, toujours provisoire, est certainement plus lourd. Mardi à Gatunguru, des secouristes ont encore retrouvé trois corps, dont ceux de deux petites filles de 10 ans, selon des témoins.

"L'eau a déferlé par là, un grand mur d'eau qui charriait de grosses pierres, des arbres, de la boue et je ne sais quoi encore. Tout cela venait des hauteurs qui surplombent la ville et a tout emporté sur son passage", explique Jean Ngeze, un ouvrier d'une trentaine d'années habitant le quartier.

Le torrent a creusé une trouée d'une quarantaine de mètres de large à travers les habitations, emportant habitants, maisons et voitures, créant des trous béants dans les murs les plus solides. Au milieu d'imposantes pierres abandonnées là par l'eau émergent parfois un bout de meuble, un morceau de béton.

De part en part de la trouée, des maisons sont restées debout, parfois sur des fondations branlantes.

Dieudonné Nzeyimana, petit commerçant de 33 ans, a vu ses deux enfants emportés par la vague meurtrière. Sa fillette a été retrouvée vivante, avec seulement quelques égratignures, mais son fils reste porté disparu.

"J'ai aussi perdu ma maison, mon fonds de commerce, mon argent. J'ai tout perdu", lance-t-il, disant craindre "de mourir de faim bientôt" si personne ne lui vient en aide.

Quand la vague est arrivée, Spéciose Ntirampeba, veuve de 53 ans, était chez elle. "Je suis sortie en courant. J'ai vu le courant emporter des pierres, des gens, c'est un cauchemar", explique-t-elle d'une voix tremblante, blessée au visage.

"Même les habits que je porte, ce sont des amis qui me les ont donnés", explique-t-elle. "Je suis pauvre, vieille, veuve depuis longtemps et ma maison a été détruite. Qu'est ce que je vais devenir, où vais-je vivre?"

La Croix-Rouge recensait mardi matin plus de 1.000 maisons détruites et plus de 10.000 sans-abri. La police parle de 3.700 habitations totalement ou partiellement détruites dans Bujumbura et sa périphérie. Aucune donnée n'était disponible dans l'immédiat sur d'éventuelles victimes ou dégâts dans le reste du Burundi.

Une partie des sinistrés a trouvé refuge sur un terrain de football - où rien n'est prévu dans l'immédiat - ou dans des écoles.

Les autorités burundaises ont pris en charge l'enterrement des 60 victimes déjà retrouvées, inhumées immédiatement faute de place dans les morgues. Elles ont également promis de payer les frais d'hôpitaux des blessés, d'aider à reloger les sans-abri...

En attendant, à Gatunguru, c'est la solidarité qui prime, ceux dont la maison est encore debout accueillant ceux qui n'ont plus de toit, comme Patrick Mvuyekure, hébergé chez un voisin avec sa femme et ses cinq enfants.

Mais "la maison du voisin ne va pas tenir longtemps, car elle s'est fissurée (...) A la moindre pluie, la maison va tomber", craint ce maçon de 40 ans, qui a préféré passer la dernière nuit dehors, par peur de nouvelles précipitations.

Son autre crainte concerne les maladies: "La plupart des toilettes ont débordé (...) Il y a également des animaux morts, probablement des cadavres encore ensevelis sous la boue et les maisons détruites, je crains bientôt le choléra si rien n'est fait", explique-t-il, alors qu'une odeur nauséabonde flotte sur la colline ravagée.

esd-ayv/mba

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