Un haut responsable taïwanais se rend cette semaine en Chine pour des entretiens historiques marquant le premier contact officiel entre les gouvernements des deux territoires depuis la fin de la guerre civile en 1949.
Wang Yu-chi, président du Conseil des Affaires continentales qui dessine la politique chinoise de Taïwan, est attendu mardi 11 février à Nankin (est) où il rencontrera son homologue Zhang Zhijun, chef du Bureau chinois des Affaires taïwanaises.
Les pourparlers doivent se tenir jusqu'au 14.
Leur entrevue illustre les efforts menés depuis quelques années de part et d'autre du détroit de Formose pour panser les plaies de la guerre civile ayant accouché en 1949 de la "République de Chine" et de la "République populaire de Chine".
Cette année-là, deux millions de Chinois fidèles au chef nationaliste Chiang Kai-shek, défait par les hommes de Mao, se réfugient sur l'île de Taïwan.
Depuis, Pékin et Taipei revendiquent séparément leur pleine autorité sur la Chine.
Pékin considère Taïwan comme lui appartenant et n'a pas renoncé à la réunification, par la force si nécessaire. Mais les relations entre les deux entités se sont apaisées depuis l'élection en 2008 du président Ma Ying-jeou, réélu en 2012 et favorable à des liens avec la Chine.
Après de timides contacts dans les années 1990, Taïwan et la Chine ont franchi en 2010 une étape décisive sur la voie du dégel en signant un accord-cadre de coopération économique sous l'impulsion de Ma Ying-jeou.
Cet accord, et d'autres gestes d'ouverture comme la reprise des vols aériens directs, n'ont toutefois été négociés que par des organismes semi-officiels, Pékin et Taipei n'ayant toujours aucune relation officielle.
"Ce voyage a des implications cruciales pour poursuivre l'institutionnalisation des relations entre les deux rives du détroit" de Formose, a déclaré M. Wang à la presse lors de l'annonce de son déplacement fin janvier.
"En tant que premier président du Conseil des Affaires continentales, j'ai conscience que ma responsabilité est grande et que le chemin sera long", a-t-il ajouté.
Le diplomate doit notamment évoquer la création de bureaux de liaison, l'intégration économique régionale et l'accès aux soins médicaux des étudiants taïwanais en Chine.
En fonction de ce qu'il produira, le séjour de M. Wang en Chine pourrait poser le premier jalon d'une rencontre entre Ma Ying-jeou et le président chinois Xi Jinping, estime George Tsai, politologue à Taipei.
Néanmoins "les deux parties cherchent les pierres sous leurs pieds en traversant la rivière", dit-il, citant un proverbe chinois sur la prudence.
Le sommet des dirigeants de l'Apec (Coopération économique des pays d'Asie-Pacifique) à Pékin en octobre serait à cet égard une occasion idéale, selon Wang Yu-chi.
Le président chinois Xi avait rencontré l'ancien vice-président taïwanais Vincent Siew en marge du dernier sommet de l'Apec en Indonésie en octobre 2013. La Chine s'oppose toujours à la présence officielle de dirigeants taïwanais au sein de l'organisation Asie-Pacifique.
Taïwan aura à coeur durant ces entretiens de faire avancer des dossiers pratiques sur l'économie ou la sécurité. La Chine, elle, vise le retour de Taïwan dans son giron, observe Jia Qingguo, professeur à l'université de Pékin.
La Chine "attache probablement plus d'importance à l'accélération de l'intégration économique, en pensant à l'unification politique à plus long terme", estime-t-il.
Le chemin reste long et semé d'embûches jusqu'à une normalisation des relations entre Pékin et Taipei mais le rendez-vous de Nankin a une forte "portée symbolique", selon lui.
"Il accroît la confiance de part et d'autre", souligne Jia Qingguo.
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